07/02/2019
Esambe Josilonus
Esambe Josilonus
©2015
IV. Les quenouilles de l'empereur Pierre
Tout semble sourire à Pierre, II du nom, le fils aîné de Pierre de Courtenay, auquel son cousin germain Philippe Auguste donne en mariage des héritières de premier choix. Comme son père et tant d'autres, Pierre "fait carrière" par les femmes mais un destin malicieux le poursuit. Il épouse d'abord des comtés bourguignons, puis le comté de Namur. Les premiers lui échappent, puis l'Empire (latin) de Constantinople que lui vaut le second lui glisse des doigts. Qui se sert des femmes, périra par les femmes ! Après quelques générations tout aussi malheureuses, sa lignée perd Courtenay (1313), fine en fille et n'existe plus pour les contemporains qui ne la voient pas briller de toutes ses comtesses et reines.

Pour la commodité de l'exposé, je sépare le devenir de chacun de ses mariages quoique les temporalités se chevauchent et les péripéties s'entremêlent. En tant que fils aîné de Pierre et Isabeau, Pierre II, reçoit l'essentiel du patrimoine maternel. Il fait fructifier Montargis (fortifications et franchises), dont, en 1184, il cède les droits au roi (Philippe Auguste) en contrepartie d'une bonne héritière : une petite Agnès, mise en réserve et gardée à la Cour après qu'elle eût reçu de son père Guy le comté de Nevers et, de son oncle Renaud, ceux d'Auxerre et de Tonnerre (Du Chesne, 1619). Cette union reste presque stérile, que les causes en soient biologiques ou conjugales : une seule et unique fille, Mathilde qui, à la mort d'Agnès (1192), reçoit les comtés dont, toutefois, Pierre exerce la garde noble (§1).

Le roi Philippe Auguste le recharge aussitôt en héritière : il arrange avec le puissant Baudouin, huitième comte de Flandre et cinquième de Hainaut, un double mariage stratégique ; celui, immédiat, de la fille du comte, Yolande, avec Pierre (cf. §2) et, celui, à terme, du fils du comte, Philippe, avec la petite Mathilde et ses comtés.

1) Les suites du mariage bourguignon

a) le Donzy et la donzelle

Dans les terres qu'il gouverne au nom de Mathilde, Pierre fait comme les autres comtes. A l'extérieur, il bataille avec ses puissants voisins (Champagne et Bourgogne). A l'intérieur, il abuse des abbayes (qui se défendent bien), s'oppose aux évêques dominateurs et endosse les vieilles querelles. C'est ainsi qu'il perd la petite Mathilde grâce à laquelle le Roi et lui auraient pu joindre possessions flamandes et bourguignonnes. Mathilde, formellement fiancée au comte de Namur, frère de la deuxième femme de son père, fut (littéralement) conquise par Hervé qui, grâce au décès sans héritiers de ses frères, avait rassemblé les terres de la maison de Donzy, à proximité de la Loire.

Les barons de Donzy, issus de Gérard de Vergy (Du Chesne, 1625), s'ils brillaient par le courage, se compromettaient quelquefois par la hardiesse de leurs prétentions (de Lespinasse, 1868). Depuis longtemps, les comtes de Nevers leur disputaient la terre de Gien (Gyen, Giem) à laquelle Hervé IV, comme son père III, était particulièrement attaché [1]. Notre Pierre, endossant l'habit des comtes de Nevers, partit en guerre contre Donzy : il fut vaincu et capturé (1199). Le roi Philippe Auguste accorda les adversaires et, en récompense, se fit donner par Hervé la terre de Gien, objet de la dispute ! Ce n'était pas cher payer puisque, pour prix de la libération de Pierre, Hervé recevait la petite Mathilde avec le comté de Nevers (Auxerre et Tonnerre restant à Pierre à titre viager). Voilà une chasse à l'héritière si fructueuse qu'on se demande si Hervé n'a pas provoqué l'entrée en campagne de Pierre dans l'espoir de le vaincre ! En 1199 la fille a onze ans. Le Donzy prend la donzelle qui, comme sa mère, Agnès, et peut-être pour les mêmes raisons, biologiques ou conjugales, ne lui donne pas d'héritier : une seule et unique fille (1205), nommée Agnès. Ironiquement, elle sera l'ancêtre des Bourbon royaux (cf. infra) auxquels, plus tard, les obscurs descendants des Courtenay demanderont de les reconnaître !

L'arbitrage du roi (Gien contre Agnès) terminait la querelle entre Donzy et Nevers et visait à allier Donzy et ses hommes au Roi de France [2]. De fait, Hervé participe aux guerres contre Jean sans terre (1204-1206) qui aboutissent à la récupération de la Normandie et à la conquête temporaire de l'Anjou et du Poitou. A cette occasion, il signe la charte des Barons défendant les droits du Roi contre les prétentions du pape. Ensuite, on le voit, avec ses chevaliers et leurs hommes, à la guerre des Albigeois (1210), à l'expédition d'Angleterre contre Jean sans terre (1216) où il reçoit du dauphin Louis l'éphémère possession du comté de Winchester et, enfin, à la croisade de Damiette en 1218. Néanmoins, s'il soutient le roi dans toutes ces opérations, ce n'est pas sans ambiguïté.

Lorsque, par devoir envers le roi ou par engagement avec le pape, Hervé se joint à l'expédition albigeoise de 1209, on lui offre, lui premier, le gouvernement des pays conquis sur le comte de Toulouse, il le refuse (c'est Montfort qui le ramassera) et rentre chez lui. Lors du laborieux siège de Damiette, il quitte le camp précipitamment en aout 1219, ce qui lui vaut des accusations de lâcheté (Matthew Paris ...le comte de Nevers..lorsque le péril fut imminent, se retira au grand détriment des chrétiens, p198). On verra que son retour précipité n'était pas sans raison.

Mais c'est surtout dans le conflit entre rois de France et d'Angleterre que, comme tant d'autres, il doit jouer une partie compliquée. En effet, sur le continent, les droits de ces rois, aussi enchevêtrés qu'indéfinis, s'affirment ou s'infirment au gré des combats ; dans cette vaste zone de dispute et à ses alentours, il valait mieux être flexible. A l'instar de la plupart des puissants, Hervé joue double jeu et, si sa "trahison" n'est pas avéré, sa réputation de Ganelon s'alimente au souvenir des alliances anglaises de son père : Hervé III avait d'abord obtenu le soutien de Louis le jeune pour reprendre Gien à Nevers ; puis, le Roi prenant contre lui le parti de Thibaut de Champagne, il s'était allié au Roi d'Angleterre et lui avait apporté plusieurs châteaux. En représailles, le roi de France avait alors lancé contre lui une opération punitive et, avec l'empressé concours du comte de Nevers, non seulement conquis, mais rasé le château familial de Donzy (1170).

La bataille de Bouvines (1214) éclaire, à la fois, les faits et les rumeurs. Hervé, hostile à Pierre II, le père de Mathilde, et à Philippe Auguste les aurait "trahis" en combattant aux côtés de Ferrand, le comte de Flandre. "Trahis" mérite des guillemets car, en contexte, la vassalité est une relation plus opportuniste que le proclame son idéaltype et, à Bouvines, les vrais traîtres étaient aussi nombreux que les faux. Notre Pierre avait aussi un pied de chaque côté [3], l'un à Nevers avec le Roi, le second en Flandre avec l'Empereur en tant que comte de Namur par sa femme Yolande. Même l'autre Courtenay, le féal Robert (Champignelles), a flotté (ou en est soupçonné) puisqu'on le trouve inclus dans la liste des punis, ceux qui, après la bataille, doivent donner des répondants pour cautionner qu'il servirait fidèlement le seigneur roi, au mépris de tous biens terrestres : une trentaine de Grands (dont Hervé) s'engagent à payer au total quelque 6000 marcs (1000 pour le seul Hervé) au cas où Robert ne tiendrait pas sa promesse. Si la victoire fut difficile à obtenir à Bouvines, sa liquidation le fut encore plus car elle devait apurer maints calculs légitimes, dictés par des soucis offensifs ou défensifs. Chacun savait que les intérêts comptaient plus que les suzerainetés et chacun avait fait preuve d'une prudence compréhensible entre l'Empereur Othon, le roi Jean, le comte de Flandres et le roi Philippe. Ils avaient raison avant cette bataille fortuite, gagnée grâce au recul de Jean sans terre à la Roche aux moines, à 600 kms de là [4].

Hervé était-il à Bouvines ? et dans quel camp ? Le chapelain du roi, Guillaume le Breton qui était présent, dit qu'il a joué la défaite de Philippe, avec tous ceux qui lui cherchaient un contrepoids :

...attirés par des dons et des promesses, Hervé, comte de Nevers, et tous les grands au-delà de la Loire, ceux du Mans, de l'Anjou et de la Normandie... avaient déjà promis leur secours au roi d'Angleterre. Ils l'avaient fait en secret cependant... Déjà, s'attendant à la victoire, ils avaient partagé tout le royaume (Guillaume le Breton).

Il y en avait tant, et si puissants, que Philippe, même après sa victoire et l'emprisonnement de Ferrand à Paris (il ne sortira qu'en 1227), dut les ménager : Quant au comte Hervée, et à d'autres qui lui étaient suspects, quoiqu'il eût pu les condamner comme coupables de lèse-majesté, le roi ne leur infligea aucune punition, si ce n'est qu'il exigea d'eux le serment d'observer au moins à l'avenir fidélité envers lui (Le Breton, après la liste des prisonniers de Bouvines). Dans le nouveau rapport de forces, ce serment insincère, permet à Philippe de reprendre la main.

Un an après Bouvines et un an avant le débarquement de Louis le lion en Angleterre, en 1215, Hervé pense encore à utiliser sa fille unique Agnès (Anne) pour une alliance anglaise et Philippe Auguste le fait convenir de la refuser à ses ennemis du moment, nommément, Jean roi d'Angleterre, Thibaud de Champagne, le fils du duc de Bourgogne et Enguerrand de Coucy [5]. Comme maints autres barons, Hervé n'est ni pour Jean ni pour Philippe, il cherche à prospérer dans l'entre-deux Rois. Jean, renié par une partie de ses barons de longtemps maltraités, ceux-ci mettent à sa place le fils du roi de France, Louis (futur VIII) qui se justifie par les droits au trône qu'aurait son épouse, petite-fille de Henri II. Malgré la réprobation du pape et l'excommunication subséquente, Louis le lion traverse et vient au secours des rebelles que Jean domine militairement. Hervé et ses troupes participent à l'expédition dont il est l'un des chefs, encore suspecté de jouer double jeu, directement à Lincoln, et indirectement en rendant Louis odieux par ses exactions [6]. Mais les autres pillaient tout autant, et Louis se fit haïr tout seul en distribuant aux siens les biens des barons anglais. A la mort de Jean, les barons se rallient à l'enfant successeur (Henry III) et chassent Louis et ses hommes.

Chez lui, dans ses comtés et à leurs limites Hervé s'active. Comme les autres puissants de son temps, et Pierre avant lui dans son comté d'Auxerre [7], Hervé a fort à faire avec les droits et prétentions de l'évêque. Comme d'autres, il joue les bourgeois contre l'évêque. Comme d'autres, il procède à des fondations religieuses et guerroie contre les riches abbayes qui, de leur côté, utilisent toutes leurs armes: droits féodaux, procédures, excommunication, interdit et appel au pape, malédictions, sans rechigner aux actions militaires.

La position d'Hervé présente une faiblesse puisque ses droits venaient de son épouse Mathilde. Dès 1205, le duc de Bourgogne, en rivalité avec Hervé pour certaines terres, saisit le pape du scandale incestueux que serait le mariage d'Hervé et Mathilde, consanguins au 4ème degré (par leur arrière grand-mère [8]). Le "théocrate" Innocent III faisant du droit matrimonial une arme politique acérée (cf. Ingelburge), cette prise d'otage est d'autant plus fâcheuse que les exactions répétées qu'Hervé fait subir aux moines de Vézelay entraînent son excommunication et celle de Mathilde. La paix entre Hervé et Vézelay conditionne l'arrêt de la procédure. Innocent III fait cesser l'enquête (lettre du 30 mai 1212) et leur accorde rétroactivement une dispense de parenté (lettre du 27 décembre 1213). Par lettres du 12 avril 1213 et du 2 janvier 1214, le pape règle et confirme le traité entre Hervé et l'abbé de Vézelay.

Contrepartie de cette "bienveillance" ? en septembre 1218, les deux époux embarquent ensemble à Gênes pour la 5ème croisade à laquelle le pape avait consacré tant d'efforts. Hervé participe un moment au malheureux siège de Damiette et le quitte précipitamment pour défendre ses droits: la mort du père de Mathilde (cf. infra), doit rendre à sa fille (donc à Hervé) les comtés d'Auxerre et Tonnerre qu'il tenait en viager [9], mais l'évêque d'Auxerre et le frère de Pierre, Robert (Champignelles, le futur bouteiller), qui les administrent  font obstacle à cette restitution, l'évêque réclamant ses droits et Robert son héritage. L'affaire est encore embrouillée par le doute sur la mort de Pierre. Hervé part en guerre et se livre à Auxerre à des violences exagérées qui lui valent une réprimande du pape. En outre, les comtés sont également revendiqués par Philippe et Robert de Namur, issus du second mariage de Pierre, De commissions d'arbitrages en manœuvres, ce contentieux durera longtemps.

L'histoire commune des époux se termine en janvier 1222 quand Hervé meurt dans des circonstances mystérieuses, empoisonné dit-on.

b) la bonne comtesse et ses filles

Mathilde a trente cinq ans. Veuve, comtesse de Nevers, Auxerre et Tonnerre, elle constitue une pièce trop stratégique pour rester exposée aux convoitises ou se remarier inconsidérément. Le Roi lui fait promettre aussitôt (février 1222) de ne pas convoler sans son consentement  et force ses alliés et vassaux à s'engager à la combattre si elle manque à sa promesse. Comme, en ces temps, une femme peut difficilement gouverner sans le bras armé d'un homme, Mathilde compte d'abord sur le mari d'Agnès, sa fille héritière. Mais la mort de la fille en 1225 et du mari en 1226 désarme les comtés. Aussi épouse-t-elle la même année Guigues (Guy) IV, comte de Forez [10] par l'entremise de son rival/allié Humbert VI, Sgnr de Beaujeu. Quinze ans plus tard (1241), Guigues meurt à la croisade des barons (Thibaut de Champagne). Mathilde s'accorde avec son successeur et, inusable comtesse de Nevers et Douairière du Forez, vit encore quinze ans, jusqu'en 1257. Sa longévité aura été telle qu'elle usera deux générations d'héritiers : ce sera son arrière petite fille qui lui succédera.

sceau de la comtesse mahaut

Sceau de Mathilde, comtesse de Nevers 1188-1257


Mahaut, la bonne comtesse [11], deux fois veuve, distribue des libéralités, confirme ou accorde des chartes de franchises urbaines (Auxerre 1223, Tonnerre 1224), promulgue des règles de paix rurale, fonde des abbayes, sans cesser d'être en compétition avec les évêques, de guerroyer gaillardement contre ses vassaux récalcitrants et de se défendre contre les comtes de Champagne et les ducs de Bourgogne qui guignent ses comtés.

Examinons sa descendance.

Sa fille unique, Agnès de Nevers-Donzy, pendant sa courte vie (1205-1225), fut d'abord une pièce de la diplomatie paternelle qui, on s'en souvient, l'offrit au petit Henry, fils aîné de Jean roi d'Angleterre (Duchesne, 1625). Philippe Auguste bloqua ce mariage dangereux et, pour circonvenir Hervé et contrôler les comtés, décida de la marier à l'aîné de son fils aîné, Philippe, roi de France en puissance. Des engagements furent pris, les conventions de mariage signées dans les formes, mais le petit Philippe mourut à 9 ans. L'on renonça à la clause de substitution qui transmettait le contrat au fils suivant, Louis, futur IX et saint, qui n'avait encore que quelques mois.

Après qu'elle eût ainsi frôlé deux couronnes et trois maris royaux, le roi l'unit à l'un de ses seigneurs, Gui de Chatillon, comte de Saint Pol. Elle mourut en 1225 et lui en 1226 au siège d'Avignon. Ils laissaient deux enfants en bas âge, Gaucher et Yolande, héritiers de Mathilde qui les recueillit et éleva. Gaucher mourut jeune sans postérité. Encore une fois, il ne restait qu'une fille, Yolande. Encore quenouille !

Héritière naturelle des comtés, Yolande épousa le riche et puissant Archambauld IX, sr de Bourbon, dont elle eut...encore une fois, deux filles, Mathilde (Mahaut) et Anne (Agnès). Elles épousèrent en même temps (1248) deux fils de Hugues IV duc de Bourgogne :

Ainsi, tandis que, issus de Louis VII, les Courtenay mâles s'obscurcissent, les filles issues de leur branche ainée, s'inscrivent dans la trame utérine des généalogies impériales, royales et princières.

Mathilde II du nom reçut l'héritage maternel et Agnès le paternel. Mathilde succéda donc à son arrière grand-mère, la comtesse Mathilde (Nevers, Auxerre, Tonnerre), tandis qu'Agnès devenait Dame de Bourbon. De leur Bourgogne respectif, Mathilde eut...trois filles et Agnès, suivant la tradition maternelle... une fille unique ! Aux yeux des contemporains, une telle obstination à ne pas engendrer de mâles devait avoir l'air d'une infirmité congénitale ou d'une malédiction héréditaire !

Les filles de Mathilde II du nom se marièrent joliment en 1268 :

Les trois héritières se disputèrent sauvagement les comtés de Mathilde jusqu'à ce qu'un arrêt du Parlement les départage en 1273 : Yolande a Nevers, Marguerite Tonnerre et Alix Auxerre [12].

Quant à la sœur de Mathilde II, Agnès de Bourbon, son mariage avec Jean de Bourgogne ne produit, encore une fois, qu'un seul enfant, une fille, Béatrice. Celle-ci, en 1272, épousera Robert de Clermont, fils cadet de St Louis. Elle sera ainsi à l'origine des Bourbon-Clermont dont, bien des générations plus tard, un rejeton, Henri de Navarre, deviendra Henri IV. Désormais, les rois seront des Bourbon [13]!

Si les Courtenay et leurs biographes n'avaient pas été aussi "saliques", ils auraient pu dire que les Bourbon régnant descendaient directement par filles des Courtenay  (Mathilde » Agnès »Yolande » Agnès » Béatrice) !

Malheureuses quenouilles ! si Pierre II du nom avait eu d'Agnès de Nevers un fils au lieu d'une fille, les comtés bourguignons seraient restés rassemblés et, pour peu que la biologie et la guerre favorisent les générations suivantes, une lignée de grands Courtenay aurait pu se consolider, toute royale.

Pierre, battu à la première manche, croit prendre sa revanche avec son remariage flamand et toucher un joker lorsqu'il pioche la dignité impériale mais la carte ne vaut rien. Pierre doit tout aux femmes, à sa mère, à ses épouses, à sa fille, et a trop peu en propre. Il perd.

2) Les suites du mariage flamand

On s'en souvient, à la mort d'Agnès, comtesse de Nevers, (1192) Philippe Auguste, soucieux de détacher les Flandres de l'Angleterre, recycle Pierre dans sa stratégie en le mariant à Yolande, la fille de  Baudouin, comte de Flandre et du Hainaut (1193), la sœur de la Reine. Tout en restant actif à Auxerre, tant directement que par procuration, Pierre entame une deuxième vie. Avec Yolande, il retrouve la prolificité paternelle : leur mariage donnera dix enfants vivants. Outre les garçons que dévorera Constantinople, six filles dont trois contribueront à la brève diplomatie impériale de Yolande [14]. Parmi les autres, l'une se fera nonne; une autre, Isabelle, épousera Gautier, seigneur de Bar puis Eude seigneur de Montaigu; une autre, Marguerite, Raoul d'Issoudun puis Henri comte de Vianden — cette comtesse de Vianden ne sera pas la moins active.

Yolande donne à Pierre non seulement des héritiers mais un héritage. En 1212, la mort de son frère Philippe (l'ex fiancé de Mathilde) lui apporte le comté (marquisat d'empire) de Namur que, en 1194, il avait hérité de son père, le comte Baudoin. Son frère aîné, Baudoin, devient comte de Flandre et du Hainaut puis, en 1204, premier empereur latin de Constantinople. Quand ce Baudoin meurt en 1205, Philippe Auguste récupère sa fille et héritière Jeanne pour l'élever à sa cour et la tenir à sa main : en 1212, il la "vend" au fils du roi du Portugal, Ferrand, sans parvenir à s'attacher celui-ci qu'il devra vaincre à Bouvines en 1214. On a vu que, à cette occasion, Pierre fait preuve d'une prudence dont Philippe ne lui tient pas rigueur.

a) calamiteuse dignité "impériale"

Pierre, comte viager d'Auxerre et Tonnerre qui appartiennent à sa fille Mathilde, comte de Namur par sa femme Yolande...n'est rien par lui-même. Aussi se laisse-t-il tenter par la couronne "impériale" que fait tomber sur sa tête la mort de son beau-frère Henri dont il est le mâle le plus proche. En 1217, quand toute la famille part à Constantinople, Yolande confie à son fils aîné Philippe le comté de Namur que lui dispute le comte de Luxembourg.

empereur latin

A partir de ce moment, plusieurs générations vont s'épuiser à soutenir leur dignité impériale, ce fantôme latin, attaqué de toutes parts et défendu d'aucune, engendré par la prise de Constantinople, l'éviction de l'empereur grec et les partages subséquents entre les Vénitiens et les autres parties pillantes. Non seulement, la branche ainée des Courtenay s'anéantira en vendant ses terres pour trouver l'argent nécessaire à Constantinople mais le dernier empereur Courtenay (Philippe) restant sans fils, la branche s'éteindra. 

A la suite des ambitions des Normands de Sicile, des croisades [15], des antagonismes qu'excitent les trahisons réciproques, la quatrième croisade se laisse dévier par les Vénitiens, intermédiaires obligés entre l'Orient et l'Occident. Le détour par Constantinople vise à rendre leur couronne à Alexis et Isaac Ange qui, une fois rétablis, paieraient la facture que les Francs doivent à Venise. On le sait, cela finit par l'invasion de la ville, incendie, massacres et pillage éhonté (1204). Les Francs élisent pour "empereur" Beaudoin, inoffensif comte de Flandre et du Hainaut, frère de Yolande, l'épouse de Pierre II. Venise est seigneur de un quart et demi de l'empire, l'empereur de un quart et les barons (Montferrat en premier) du reste. Mais le quart de l'empereur est largement en Asie que les Grecs de Nicée défendent bien et sa suzeraineté sur les barons est toute théorique.

Coupé de l'arrière-pays agraire dont le drainage conditionnait la puissance et même la survie d'une ville géante (dont les trois cinquièmes sont aux Vénitiens), l'empereur doit se défendre contre les Grecs (Nicée, Epire), les Bulgares, les "Turcs", sans oublier les "Tartares" épisodiques et les aventuriers de tous poils. Sans ressources, attaquée de toutes parts, du dedans comme du dehors, déchirée de rivalités, Constantinople, pendant un demi-siècle, deviendra un trou noir engloutissant l'argent et les hommes et annihilant l'énergie et la sagesse des meilleurs.

Sans me limiter à Du Cange (1657), je lui emprunte le pittoresque de la narration qui suit. Le premier empereur, Beaudoin, merveilleusement empesché, ne parvient qu'à exciter encore plus les Grecs contre les Francs et à se faire bêtement battre et capturer par les Bulgares à Andrinople (1205). Son frère Henri le remplace, rétablit la situation militaire, noue des alliances et se concilie une partie de l'aristocratie grecque. Quand il meurt sans héritier (1216), les barons choisissent sa sœur, Yolande, et son mari, Pierre de Courtenay, proche parent du roi de France et grand personnage lui-même (Auxerre etc.). Pour son malheur, Pierre cède à la séduction d'une couronne impériale. Il met ses terres en gage pour lever des fonds et part avec de nombreux vassaux et hommes d'armes.

Arrivé à Rome en avril 1217, il cherche à se faire couronner empereur en anticipation de son sacre à Ste Sophie. A un moment confus de l'Empire Romain Germanique, cette prétention rencontre une vive opposition car un tel sacre impérial (par le pape à Rome) a un petit air de concurrence capétienne. Pierre arrache un demi couronnement, informel et hors les murs. Tandis que son épouse et ses enfants gagnent directement Constantinople, Pierre et ses hommes, pour payer leur transport aux Vénitiens, assiègent Duras (Durazzo, aujourd'hui Durrës) sur la côte albanaise. Ayant échoué, les Vénitiens les lâchent et ils tentent de passer par les montagnes où ils sont assaillis et vaincus par les Grecs d'Epire : Pierre et beaucoup d'autres sont capturés et disparaissent. Fin de l'empereur !

Reste l'empérière, Yolande qui vient d'accoucher à Constantinople d'un Baudouin, le premier et seul latin qui sera jamais né dans la pourpre (porphyrogénète). De concert avec les barons, elle gouverne Constantinople et poursuit la sage stratégie d'Henri en utilisant judicieusement ses filles pour nouer des alliances prometteuses : Yolande épouse en 1215 André II, roi de Hongrie ; Agnès, en 1217, Geoffroy II de Villehardouin, prince de Morée ; Marie, en 1219, devient la troisième épouse de Théodore Ier Lascaris († 1222), empereur grec qui assure, "en Asie", la continuité de l'empire (Nicée). Mais Yolande meurt trop vite (1219) : Après la mort de l'impératrice Yolande... entre les enfants de l'empereur Pierre il n'y avait à Constantinople que le jeune Baudoin qui y avait pris naissance, et n'avait que trois ans au plus, les autres étaient en France où ils possédaient de grandes seigneuries (Du Cange, T1, p165).

Les barons, fidèles au droit héréditaire, envoient une députation au fils aîné de Pierre et Yolande, Philippe, comte/marquis de Namur. Ce dernier, qu'il soit ou non tenté, a trop à faire pour défendre son propre comté et renvoie les barons à son frère cadet, Robert, que, avec l'assentiment du roi Louis VIII, ils conduisent à Constantinople pour le couronner. Ce Robert va faire preuve d'une rare incapacité. L'oraison funèbre que lui accorde du Cange cingle :

 la faiblesse de son esprit et la bassesse de son courage causèrent les funestes révolutions qui arrivèrent de son temps dans l'empire d'Orient, et donnèrent sujet à ses ennemis de s'en prévaloir, et de le dépouiller de plusieurs provinces et places considérables. Ce qu'il fit assez paraître en la facilité qu'il apporta à rompre avec ses voisins au lieu d'entretenir avec eux les traités d'alliance que ses prédécesseurs avaient solennellement contractés. Et ce qui montre le peu d'adresse et de conduite qu'il eut dans le maniment des affaires, est qu'il ne put profiter de leurs divisions (T1, p 198).

Pis encore (et ce fut là la dernière disgrâce qui lui arriva et le comble des malheurs qui accablèrent dans la suite l'empire des Français), au lieu de mettre en œuvre de raisonnables stratégies matrimoniales, il se laissa prendre par les charmes de la beauté d'une jeune demoiselle française fiancée à un seigneur bourguignon. Cette aventure poussa au paroxysme la haine que les barons lui vouaient pour sa fainéantise : tous ensemble, ils s'introduisirent chez lui de force, mutilèrent la fille et noyèrent sa mère. Ulcéré de cette insurrection, il s'enfuit à Rome. Le pape le console et le renvoie au front. Il meurt de colère au cours de son voyage de retour en 1228.

b) mésaventures de Baudoin, fils de Pierre

Baudouin, fils de Pierre II, étant toujours trop jeune (11 ans), les barons élisent comme Régent le vieil aventurier Jean de Brienne qui s'était fait roi de Jérusalem. Il trompa l'espérance que l'on avait conçue de sa valeur dont il avait donné des preuves en tant d'occasions, ne fit rien pendant deux ans puis fit mal et, comme les autres, appela le pape, les rois et l'Europe à son secours et mourut. Il avait réussi toutefois à se faire donner le titre d'Empereur (1231) et à marier sa dernière fille Marie au jeune Baudouin.

Ce dernier eut fort à faire pour mettre son héritage au service de sa couronne. En 1237, il revendiqua le comté de Namur que sa sœur Marguerite avait usurpé à la mort de Henri [16]. Il la chassa au terme d'une guerre sanglante. Voulant en tirer hommes et argent pour se soutenir à Constantinople, Baudoin gagea le comté au Roi de France (1238). St Louis accepta bien volontiers ce fief qui relevait de l'Empire. Le suzerain, le comte de Hainaut, objecta et mit la main dessus. Baudoin envoya Marie demander secours au roi de France et occuper Namur (1253), cible de multiples ambitions dont celle, permanente, du comte de Luxembourg. Ce dernier, en 1256, appelé par le peuple révolté, chassa Marie qui ne réussit pas sa contre-offensive. Il en fut du comté de Namur comme de l'empire de Constantinople, l'un et l'autre furent perdus pour la maison de Courtenay. En 1263, Baudoin reconnut son échec et vendit ses droits sur Namur.

Malgré ses efforts, les Francs, coincés dans Constantinople, manquent tellement d'argent que l'empereur, après avoir dévoré ses terres, fondu les toits de plomb pour frapper de la monnaie, vendu la "couronne d'épines" du Christ et autres reliques, doit mettre en gage son fils Philippe chez des prêteurs vénitiens (où il restera plusieurs années) ! A la fin, surdéterminée par la guerre des Vénitiens et des Génois qui s'allient avec l'un ou l'autre des empires grecs ennemis des latins, par les autres rivalités européennes (France-Angleterre-Empire germanique) et par les alliances antagoniques régionales, la situation devient absolument sans issue : l'Empire, toujours insoutenable, en raison de son vice organique et des erreurs commises, est repris en 1261 par les "Grecs" (Michel Paléologue).

Et même cette fin est ridicule, résultant en partie du hasard d'un souterrain oublié, en partie de l'affolement des Francs qui, cherchant à sauver leurs meubles, ne pensent pas à se regrouper pour combattre Strategopoulos et ses maigres troupes (voyez Du Cange [17]).

Baudoin fuit jusqu'à Naples auprès du roi Charles d'Anjou. Ce fils de Philippe Auguste, comte de Provence par sa première femme, vient d'épouser (1268) notre Marguerite de Bourgogne, comtesse de Tonnerre, l'une des trois filles de cette Mathilde de Chatillon qui reçut l'héritage de la comtesse Mahaut, elle-même fille unique d'Agnès et de Pierre II de Courtenay : l'arrière-arrière-petite-fille de Pierre accueille en Sicile le dernier fils de son second mariage !

Baudoin et Charles s'allient pour reprendre Constantinople qu'ils convoitent tous deux. L'aventurier, en conquérant Naples et la Sicile sur les Hohenstaufen (bataille de Bénévent, 1266), a été conquis par les anciennes visées orientales des Normands. Selon l'habitude, ils cimentent leur accord en mariant leurs enfants : Philippe de Courtenay, tout juste dégagé des Vénitiens, épouse Béatrice, issue du premier mariage de Charles d'Anjou. Les "empereurs", Baudoin et Marie, continuent à courir l'Europe pour lever des fonds et chercher des soutiens.

Baudoin meurt (1273) :

après avoir mené une vie pleine d'incommodités et de tracas, depuis ses plus tendres années, sans avoir jamais goûté le repos ou la paix; il la finit pareillement dans les déplaisirs, dépouillé non seulement de la couronne, mais encore de la plupart de ses terres patrimoniales. Son fils Philippe ne fut pas moins héritier de ses disgraces que de ses prétentions (Du Cange).

c) disgrâces et prétentions

La reconquête subit échecs sur échecs : destruction de la flotte par une incroyable tempête, insuccès du siège de Berat qui aurait ouvert la route de Constantinople (1281)... Enfin, en 1282, Charles maintenant le souverain le plus puissant d'Europe (Norwich, p 374) a noué des alliances, reconstruit une immense flotte, rassemblé des soldats. Le succès ne fait plus aucun doute et les Byzantins paniquent...lorsque les Siciliens se révoltent (vêpres siciliennes) et Pierre d'Aragon qui disputait le royaume à Charles est proclamé roi. Les Byzantins ne manquent pas rendre grâce à la Vierge Marie !

Passons sur les vains efforts de l' "empereur" Philippe (1243-1283) pour trouver hommes et argent qui le fuient : la réaliste Venise, constatant son incapacité à lever des fonds, l'abandonne et s'allie aux Grecs. Le pape ne lance pas d'appel à la croisade (aurait-il servi à quelque chose ?) car les Grecs engagent, encore une fois, des négociations religieuses qui font espérer la fin du schisme. 

Philippe échoue même à faire un fils ! Malédiction ancestrale ? il n'a encore une fois qu'une seule fille. Cette Catherine devient en 1301 la seconde épouse de Charles, comte de Valois, à la fois frère du roi régnant, Philippe le bel, et père du futur Valois royal (Philippe VI). Catherine lui donne à vie la seigneurie de Courtenay. Encore une quasi stérilité (encore une fille, une Catherine II du nom) ! Encore un perdant magnifique ! Ce Charles visa toutes les couronnes et n'en obtint aucune. S'il réussit plusieurs campagnes militaires, notamment au début de sa vie (Flandres) et à la fin (Guyenne), s'il joue un rôle actif sous Louis X et Charles IV, il connaît beaucoup d'échecs, notamment Aragon 1285, Sicile 1302 ; en 1308, il rate simultanément l'expédition à Constantinople qu'il préparait depuis trois ans au nom de sa femme, son élection comme empereur germanique et la récupération du comté de Namur ; à la mort de Louis X (1316), la couronne de France lui passe sous le nez et, en 1324, la reconstitution du royaume d'Arles et de Vienne à son profit se révèle illusoire. 

Lorsque Catherine décède (1307)  [17b], Charles se remarie une troisième fois (1308) [18]. Las du fantôme d'empire, il cherche à s'en débarrasser en mettant Catherine (II du nom), la fille qu'il a eue de l'empérière, en position d'y prétendre par elle-même [18a]. Mais, quoiqu'elle n'ait que cinq ans, des conventions ont déjà été négociées et signées pour la marier avec le petit   Hugues de Bourgogne, depuis 1306 duc et roi titulaire de Thessalonique [18b]. Il faut dénouer ce mariage pour en faire un nouveau, ciblé sur la reconquête. La cour de Bourgogne est réticente. Pour obtenir son désistement, Charles rebat les cartes et permute fille et garçon : au lieu de marier sa fille à Hugues, il marie son fils à sa sœur et, en dédommagement, donne à cette dernière l'héritage de Catherine (dont Courtenay). La petite Catherine est libre mais, à part sa prétention impériale, elle est nue [19].

La très jeune empérière épouse gaillardement en 1313 Philippe d'Anjou, héritier des Anjou-Sicile [19a]: Prince de Tarente, largement possessionné en Grèce propre, Philippe semblait un bon tremplin pour sauter sur Constantinople et la petite impératrice en jugea ainsi. Dès sa majorité de douze ans, en 1315, elle s'empresse de ratifier l'abandon de son héritage et fait cosigner sa sœur Jeanne de Valois, pourtant encore mineure. Courtenay contre une armée. Espoir vain ! aucune tentative ne se fera. Tout ce qu'aura Catherine, c'est la régence de l'Achaïe pour le compte de son fils Robert [19b]. Les descendants se pareront d'un titre impérial de plus en plus irréel, tout en s'agitant dans leurs possessions en Grèce propre (Morée) qu'ils finiront par se faire prendre. Lamentable histoire.

Les Courtenay perdent jusqu'à leur nom. La terre de Courtenay, baillée en apanage ou en cadeau à différents princes, qui la donnent ou la vendent à leur tour, finit, vers 1450, par être volée par Antoine de Chabannes dans le partage des dépouilles de Jacques Cœur. Par Chabannes, elle arrive aux Boulainvilliers au profit desquels, en 1563, Charles IX érige la seigneurie de Courtenay en "comté" [20]. Les nouveaux Courtenay voisinent avec les nôtres qui portent désormais les noms d'autres terres, Bléneau, Chevillon, Bontin...Lorsque, après de nombreuses péripéties, vers 1655, Louis de Chevillon (1610-1672) se fera prince de Courtenay son titre sera deux fois fictif puisque Courtenay n'est pas à lui.

Le jugement de Gibbon (les nouveaux Courtenai méritaient peut-être de perdre les honneurs de leur naissance, auxquels, un motif d’intérêt les avait fait renoncer) n'aborde qu'un aspect de la question. L'autre échappait à ses yeux : un mystérieux hasard fait que ce lignage, fondé sur les femmes, échoue à devenir une dynastie parce que tant de mariages n'engendrent qu'une fille unique et font quenouille, comme en vertu de l'arrêt d'une justice immanente ! La généalogie des Courtenay aurait été bien plus brillante s'ils avaient donné leur place aux filles. Ils ne le pouvaient pas et n'en eurent pas l'idée.


Références particulières


[1] Deux générations plus tôt, Geoffroi de Donzy III du nom avait abandonné Gien, partie par force, partie par calcul. Les circonstances font l'objet de différentes versions. La plus spectaculaire est la suivante : la fille de Geoffroi, Hermesende, fut enlevée le jour de son mariage par Etienne, Comte de Sancerre, soit qu'il fût amoureux, soit plutôt qu'il courût l'héritière ; n'ayant pu obtenir justice, Geoffroi se résigna à ce mariage imposé auquel il apporta la terre de Gien, au détriment de son fils Hervé III dont c'était l'héritage. Il pensait sans doute pousser Sancerre à le soutenir contre Nevers. Mais cette astuce, au lieu de favoriser Donzy, compliqua encore les choses : Hermesende étant morte sans enfant, Sancerre refusa de rendre Gien que Hervé III (fils de Geoffroi III) réclamait de droit héréditaire. Hervé saisit le Roi Louis VII et en 1153 obtint le concours de ses armes pour récupérer son bien (L'art de vérifier les dates).

[2] Hervé promet : je ferai faire, par tous mes hommes, l'assurement au roi que je le servirai envers et contre tous ceux qui peuvent vivre et mourir, comme mon suzerain lige, et que je ne manquerai jamais, pour qui que ce soit, de rester à sa cour pendant le temps requis (Quantin, Cartulaire de l'Yonne, t. II, p. 501).

[3] Le comte de Namur (Pierre)...différa aussi longtems que l'armée impériale fut à portée du comté de Namur. Mais aussi-tôt qu'il eut appris qu'elle était entrée dans le Hainaut, il se rendit à l'armée Françoise pour y servir Philippe Auguste tandis que par une politique que la situation du comté rendit nécessaire son fils alla combattre sous les étendarts des confédérés (De Marne, 1753,  p 237).

[4] Si elle ne fut pas sans effets immédiats en Angleterre (révolte des barons et conquête française), elle ne devint décisive en France que bien plus tard, lorsque Bouvines aura reçu le statut d'un combat national fondateur, vengeant par avance les défaites de la guerre de cent ans et la perte de l'Alsace-Lorraine !

[5] ..quod Agnetem, filiam nostram, nulli trademus in uxorem sine assensu et licencia domini regi, nec maxime alicui filiorum Johannis, régis condam Anglie, nec Theobaldo de Campania, nec filio ducis Burgundie, nec Engerreno de Cociaco et de hoc constituimus plegios erga dominum regem ... (in: Quantin, p 72).

[6] Il aurait trahi son roi en levant le siège de Lincoln à l'approche de Jean. Matthew Paris (Historia Major) dit de lui qu'il était de la race de Ganelon (un traître) 1216:  une partie des barons (de Louis) qui demeuraient à Londres firent des courses de cavalerie, ravagèrenl toute la province de Cambridge .. De là, s'avançant, ils parcoururent les provinces de Norfolk et de Suffolt, les pillant, ainsi que toules les églises... Fiers de ce succès, les barons rassemblèrent une nombreuse armée et vinrent camper devant le chateau de Windsor, qu'ils assiégèrent. Celui qui commandait cette chevalerie était le comte de Nevers, de la race du traître Guenelon. Et la Chronique de Dunstable : Hervé tyrannisa les comtés de Hampshire et Sussex qui lui avaient été commis, sans respecter ni les veuves ni les églises au point de faire haïr son seigneur Louis.

[7] Malgré la perte de Mahaut, Pierre garde les comtés de Tonnerre et d'Auxerre à titre viager. Il poursuit la lutte contre l'évêque qu'il avait commencée en octroyant des chartes (en 1188 et 1194) aux "bourgeois du comte" pour les soustraire à l'évêque, Hugues de Noyers. Par contagion, les "bourgeois de l'évêque" arracheront des droits à celui-ci et, dès 1204, apparaissent à Auxerre des "bourgeois du chapître" qui prétendent ne relever que de ce dernier. Citons un épisode des démêlés de Pierre avec l'évêque Hugues de Noyers. Ce dernier l'ayant puni en plaçant la ville d'Auxerre sous interdit, les habitants se plaignirent que, en les privant de sacrements, on les punissait injustement pour les turpitudes du comte. Aussi l'interdit fut-il aménagé : il ne prendrait effet que les jours où Pierre serait dans la ville ! A une de ces occasions, fin 1203, un habitant qui, de ce fait, ne pouvait enterrer son enfant en terre chrétienne, exaspéra tant le comte qu'il fit inhumer le cadavre dans la chambre de l'évêque et au pied de son lit... L'Evêque voulut avoir raison de cette insulte, il renouvella l'excommunication du Comte et le condanma à déterrer lui meme le corps mort, & à le porter en public jusqu'au Cimetière.. Le Comte, touché de Dieu, se soumit à cette sentence. Le jour venu qui étoit celui du dimanche des Rameaux de l'année 1204, on vit à Auxerre plusieurs Prélats que l'Evêque avoit mandés, ou qui y avoient été attirés par la nouveauté du spectacle. .. Tous étant assemblés dans la chambre de l'Evêque, Pierre de Courtenai déterra de ses propres mains le cadavre qui étoit là depuis quelques mois ; puis revêtu d'une simple chemise & les pieds nuds, il le porta sur ses épaules jusqu'au Grand Cimetiére où il fut inhumé (Abbé Lebeuf, T2, p130). Le contentieux chauffait plus ou moins selon les circonstances mais toujours les évêques défendirent énergiquement leurs prétentions temporelles et symboliques. Lors de leur entrée à Auxerre, ils se faisaient porter par tous leurs vassaux (qui, bien sûr, commettaient leurs hommes à leur place). C'était une reconnaissance publique dont l'oubli provoquait des actions en justice ou des persécutions. L'évêque alla jusqu'à l'exiger du Roi lorsque celui-ci eut récupéré Gien ! et plus tard, lorsqu'il racheta le comté au dernier descendant d'Hervé !

[8] Les arrière grand-mères d'Hervé et Mathilde étaient soeurs (resp. Mahaud et Ide de Carinthie).

[9] Au sein de ces comtés, certaines terres étaient des possessions personnelles qui, appartenant au patrimoine propre de Pierre, se transmettaient à ses fils flamands.

[10] Les comtes du Forez (de gueules au dauphin d'or) issus des comtes-dauphins du Viennois, ont renoncé au profit de l'archevêque à être comtes de Lyon en 1173 (de La Mure, Jean Marie, 1674,  Histoire des ducs de Bourbon et des comtes de Forez, Volume 1, Potier, 1809).

[11] La "comtesse Mahaut", à laquelle une exposition permanente est consacrée au château de Druye, base principale des comtes d'Auxerre, offre à la littérature féminine un thème aussi rose qu'est noir celui de "Jezabel" d'Angoulême, prey to strong passions and ambitions (Bard) ! La bonne comtesse vs la reine sans conscience ! Un conte pour enfants : Héritière de l'une des plus grandes familles de France, mariée à 12 ans à Hervé de Donzy, l'ennemi de son père, Mahaut de Courtenay devient néanmoins une femme épanouie et amoureuse (???), soucieuse du bien-être des plus humbles (???). Améliorer la condition des femmes serves de ses comtés fut, pour elle, un souci constant (???) écrit son admirateur moderne, Hubert Verneret (2002, Mahaut de Courtenay).

[12] Robert (de Béthune) &. lolende avoient d'abord prétendu que Nevers, Auxerre, &. Tonnerre ne formaient qu'un même Comté. Mais la Cour décida sur ce partage, après qu'il eut été prouvé par une enquête, que ce sont trois Comtés différens. En conséquence, on donna à l'aînée à choisir celui des trois qu'elle voudroit (Nevers). La Cour assigna ensuite à la seconde, qui étoit la Reine de Sicile, le Comté de Tonnerre, qu'elle jugea meilleur que celui d'Auxerre; de sorte que Jean de Challon devint de cette maniere Comte d'Auxerre, du chef de sa femme Alix (Lebeuf, p 179).

[13] Un célébrateur tardif des Bourbon (Achaintre, 1825) écrit qu'Archambaud IX baron de Bourbon épouse Yolande qui est "de Chatillon" par son père. Ce dernier semble en avoir accouché puisqu'aucune mère n'est mentionnée ! Achaintre ne mentionne Courtenay que pour illustrer la déchéance de ceux qui ont changé ou dénaturé leurs armes.

[14] Yolande, mariée au roi de Hongrie André ; Marie, à Théodore Lascaris, légitime empereur replié à Nicée ; une autre au Prince d'Achaie et de Morée.

[15] Cf. Grousset, Histoire des Croisades, T3 ; Heers, Chute et mort de Constantinople ; Norwich, Histoire de Byzance.

[16] Ce n'est qu'en 1222 que Philippe parvient à s'accorder avec Luxembourg. Il se joint alors à la croisade albigeoise où, en 1226, il décéde de la maladie qui régnait parmi les assiégeants d'Avignon. Son frère Henri lui succéde et meurt rapidement. Alors, vers 1228, sa sœur, la plus jeune fille de Pierre, Marguerite, comtesse de Vianden par son mari, se porte héritière du comté de Namur. Ses frères, Robert, trop occupé à Constantinople, et Baudoin, trop petit, laissent faire ainsi que ses sœurs, déjà bien pourvues ou trop lointaines. Ainsi la Comtesse de Vianden, qui à beaucoup d'ambition joignoit les qualités les plus propres à seconder cette passion, eut bientôt disposé toutes choses pour arriver à son but (de Marne, 1754). Mais le comte de Flandre, Ferrand, enfin sorti de sa prison d'après Bouvines, réclame ce comté et force Marguerite à lui en abandonner une partie (1232). Les mésaventures de Namur ne s'arrêteront pas là.

[17] (Ceux) qui étaient avec lui (Strategopoulos).. se répandent incontinent sans ordre dans toutes les rues, et courent au pillage avec tant de confusion, que si les Français se fussent ralliés, et n'eussent pas pris l'épouvante, ils les eussent tous taillés en pièces....Stratégopule qui se tenait toujours en bataille, ne voulant avancer que bien à propos,..rallia ses gens qui étaient entrés, et obligea les Grecs de la ville à se joindre avec lui bon-gré mal-gré, puis fit mettre le feu en divers endroits de la ville, afin que les Français, étant occupés à sauver leurs femmes et leurs enfants, et ce qu'ils avaient de plus précieux dans leurs maisons, ne songeassent point à prendre les armes pour se défendre; ou du moins fussent obligés de partager leurs soins, les uns travaillant à se sauver du feu, les autres de leurs ennemis. Quant à Baudoin, ayant appris que les Grecs étaient dans la ville, (il) prit la résolution, comme les autres, de se sauver....

[17b] Chronique de Guillaume de Nangis, ed. Guizot, 1825, p 266: Catherine, héritière de l'empire de Constantinople, seconde femme de Charles frère du roi, qui était morte le lundi précédent, dans le village de Saint-Ouen, reçut la sépulture ecclésiastique chez les frères Prêcheurs de Paris en présence du roi, des grands, des prélats de France, et du grand-maître du Temple, venu d'outre-mer, qui porta son corps avec d'autres vers le lieu de la sépulture. Les honneurs qui sont rendus à sa dépuille s'adressent à son mari et à son (vain) titre d'empérière, non à son ascendance royale.

[18] à Mahaut fille de Guy IV de Châtillon, comte de Saint-Pol. C'est l'arrière arrière petite-fille du Guy (II) de Chatillon-Saint Pol qui avait épousé Agnès de Nevers-Donzy, fille de la comtesse Mahaut.

[18a]  L'opération a aussi des déterminants stratégiques. La perte du duché d'Athènes conquis par les Catalans de la Grande Compagnie (1311) rend nécessaire une nouvelle base. Aussi le roi et son pape font-ils le nécessaire pour surmonter les obstacles au mariage des droits de Catherine et du contrôle des Angevins. Pour boucler l'opération, quatre autres mariages et arrangements sont faits. Topping, 1975 : King Philip IV of France and pope Clement V were forced to reconsider plans for the recovery of Constantinople and the revival of the crusade against the Moslems, now that they were deprived of the French duchy of Athens as a base…With the death of Catherine of Courtenay early in 1308…Charles favored a match between his daughter and Philip of Taranto in order to combine the prince of Taranto's real authority in the Balkan peninsula with Catherine's claims to the empire p 108…Philip of Taranto married Catherine of Valois at Fontainebleau on July 29, 1313, p 109... In 1313 Philip the Fair had promised to provide the Angevin with five hundred men, to be maintained for a year, to help him recapture Constantinople, whose repossession was regarded as a step "preparatory and very necessary" for the passage d'outremer to recover. the Holy Land. Philip V had renewed this agreement in 1319 p 116. Cependant, la Morée restera incontrôlable. D'une part, les baillis envoyés par le suzerain seront rejetés par les nobles locaux. D'autre part, les prétendants se bousculeront.
Outre ces difficultés, la Morée ne servira à rien car, si elle est bien perçue comme une base stratégique, elle est traitée comme un actif patrimonial. Dès les arrangements de 1318, la Morée est rendue à la dernière Villehardouin, Mathilde de Hainault, pour qu'elle l'apporte à son mari, Louis de Bourgogne, frère de l'ex fiancé de Catherine. On ne sait pas si l' "empereur" consort voulait vraiment faire quelque chose mais, vue de Naple, la Morée est accordée, reprise, redonnée, sans se préoccuper de sa dimension stratégique. En 1332, Catherine, agissant pour son fils Robert, devra la racheter la Morée à Jean de Gravina, moyennant le duché de Durazzo, le royaume d'Albanie et 5000 oz d'or. Gravina l'avait reçue de son frère le roi de Sicile qui avait forcé la veuve de Louis de Bourgogne à l'épouser en 1318. Catherine tentera de 1338 à 1341 de reprendre le contrôle et retournera à Naples. She and Nicholas/Acciajuoli/ spent two and a half years in the Morea in a concerted effort, in which money was not spared, to exact obedience from feudatories and to restore the defenses of the principality against the Turks, Catalans, and Greeks p 126…The empress Catherine and her party returned to Naples in June 1341 p 128.

[18b] Lorsque Charles de Valois eut épousé, en 1301, Catherine de Courtenai, sa première pensée fut de se chercher des alliés puissans. Il lui sembla que Robert II, successeur d'Hugues IV au duché de Bourgogne et au royaume de Salonique, et de plus, son petit-neveu, lui offrait toutes les garanties possibles. Il résolut donc, dès la naissance de sa fille Catherine de Valois l'année suivante, de la fiancer avec Hugues, fils de Robert, qui n'avait que quelques années de plus. Mais la mort de Robert en 1305 détruisit tout l'espoir que cette alliance avait fait concevoir sur l'activité de sa coopération, car Hugues, qui succédait et devait épouser sa fille, était encore enfant Buchon…mais pour cela, il fallait décider Hugues V à solliciter lui-même du pape l'annulation de l'engagement pris par lui aussitôt après sa majorité, et attendre que la jeune Catherine entrât elle-même dans sa douzième année…Pour décider le jeune duc Hugues à renoncer à la main de l'impératrice Catherine de Valois, des avantages de famille lui furent accordés par les négociateurs, le roi de France, son frère Charles de Valois, le pape, le roi Robert de Naples et son frère le prince de Tarente, qui prirent grand soin de ne faire de leur côté que des concessions nominales et d'imposer les sacrifices réels à trois jeunes filles (Jeanne de Bourgogne, Mathilde de Hainaut, Catherine de Valois)
Buchon, 1840, p52-53

[19] Selon le traité passé en 1312 (1313) Jeanne aurait en mariage et en héritage Courtenay, Chantecoc, et les autres terres que l'impératrice Catherine de Courtenay, seconde femme du comte, avait eues en ces quartiers-là, avec les terres de Brulet et de Blacon , et toutes les autres terres qu'elle avait aux comtés de Flandre et de Haynaut, et aux Quatre-Métiers; lesquelles terres tiendraient nature d'héritage à Jeanne, et aux enfants qui naîtraient d'elle et de Philippe (Du Cange, II, 164).

[19a] Chron. G. de Nangis, p 295: Vers la fête de la Madeleine, le prince de Tarente prit en mariage la fille du comte de Valois et de Catherinesa femme, héritière de l'empire de Constantinople, et emmena avec lui la soeur de cette princesse, quoique jeune, pour la marier à son fils. De là, le titre impérial passera à leur fils, Robert de Tarente (1326-1364), puis à son frère Philippe II de Tarente (1329-1374), puis à sa sœur, Marguerite de Tarente qui, étant mariée à François des Baux, duc d'Andria, le transmet à leur fils Jacques des Baux (†1383) qui est le dernier de la liste.

[19b] Buchon, 1840, p59 : afin de mieux surveiller ses droits et ceux de son fils, elle quitta sur-le-champ Naples pour se rendre en Morée et fit sa résidence à Patras…Catherine déploya beaucoup d'activité pour ressaisir quelque autorité …mais ses efforts paraissent ne pas avoir été fructueux, et elle finit par se retirer à Naples, où elle mourut au commencement d'octobre 1346, laissant le titre d'empereur de Constantinople à son fils Robert…il ne paraît pas que, depuis son retour à Naples avec sa mère, Robert soit jamais retourné en Grèce et ait jamais tourné vivement son attention de ce côté. Cependant, Catherine est active à Naples dont Jeanne a reçu la couronne (r 1343-82). L'empérière ne serait pas sans responsabilité dans le meurtre du premier mari de la reine Jeanne, André de Hongrie (1345), auquel succède l'année suivante le propre fils de Catherine, Louis de Tarente (†1362) qui a fort à faire avec l'invasion des Anjou hongrois: le couronnement d’André [de Hongrie] n’eut pas lieu, parce que le jeune prince, qui avait dix-huit ans, fut étranglé le 18 septembre 1345 à Aversa. Le meurtre avait été préparé par les favoris de la reine Jeanne, laquelle [...] était au courant de ce qui se tramait. Derrière l’attentat on peut voir la main d’une autre [demi] sœur de Philippe VI, Catherine, ancienne princesse de Morée, impératrice titulaire de Constantinople. Catherine avait épousé le frère du roi Robert de Naples, Philippe duc de Tarente, et aurait voulu voir ses propres fils (Robert, Louis et Philippe) sur le trône de Naples. (ENGEL Pál, KRISTÓ Gyula, KUBINYI András, 2008,  Histoire de la Hongrie médiévale. Tome II : Des Angevins aux Habsbourgs, CH2. PU Rennes). Pour le contexte angevin, voir Budak Neven, Jurković Miljenko, 2003, "La politique adriatique des Angevins", In: TONNERRE Noël-Yves, VERRY Élisabeth, (eds), Les princes angevins du XIIIe au XVe siècle : Un destin européen, PU Rennes.

[20] Les Boulainvilliers transmettent la terre et le nom à leurs héritiers, les Rambures-Courtenay que des lettres de Chancellerie, du 11 Juillet 1687 priveront du titre de comte  pour ce qu'il avait été accordé à titre personnel et viager à Boulainvilliers. Pendant tout ce temps, les "gens du Roy" plaident, contre les propriétaires, que la châtellenie est du domaine royal (voir le Traitez touchant les droits du Roy, 1670, pp 791 & sq.) : par arrêt du 23 Décembre 1611, elle fut déclarée ne l'être pas, jugement confirmé en 1721 (Conférence de la Coutume de Sens,  Sens, 1787 ; du Fresne Jean [et alii], 1754, Journal des principales audiences du Parlement, Livre3, CH XXVII Affaire de la Terre de Courtenay prétendue Domaniale & jugée ne l'être pas, p 444 sq.).