<= Arthur de Boislisle, 1879, I.GŽnŽalogie de la maison de Rouvroy Ñ II. Notes sur Claude de Rouvroy, premier Duc   pdf   epub


MŽmoires de Saint-Simon, T. 1, Appendice, pp. 384-491, In: MŽmoires de Saint-Simon, Žd. de M. Arthur de Boislisle puis LŽon Lecestre et J. de Boislisle, Paris, librairie Hachette, impr. Lahure puis Durand, 1879-1930, 45 vol. in-8¡ (aucune rŽŽdition [1]).


Les renvois (pages et numŽros de note) se rŽfrent au volume imprimŽ.

Sous-titres ajoutŽs.


 


 

On n'est ami de la vŽritŽ qu'autant qu'elle favorise (Saint-Simon)


I. GƒNƒALOGIE DE LA MAISON DE ROUVROY SAINT-SIMON.


Saint-Simon n'a fait que des allusions trs-discrtes aux origines de sa famille, et c'est par hasard qu'on rencontre tout ˆ coup dans les MŽmoires cette phrase : Ç Mon pre acquit, de l'a”nŽ de la maison, la terre de Saint-Simon, qui n'en Žtoit jamais sortie depuis l'hŽritire de Vermandois qui nous l'avoit apportŽe en mariage ; È ou cette autre phrase : Ç Saint-Maigrin portoit ˆ mon pre le b‰ton de marŽchal de France, ˆ son choix, ou le rang de prince Žtranger, sous le prŽtexte de la maison de Vermandois, du sang de Charlemagne, dont nous sortons au moins par une femme, sans contestation quelconque [2]. È

Quoi ? s'est ŽcriŽ un critique ; est-ce lˆ le fait de celui qui a dŽchirŽ tant de blasons pice par pice, et entre les mains de qui fondent, pour ainsi dire, les noblesses les mieux Žtablies ? Ç On doute de lui comme des autres, puisque, aprs Charlemagne, le premier de ses a•eux, il se garde d'en plus nommer aucun [3]

Le devoir du commentateur des MŽmoires est donc, sinon de discuter ˆ fond la filiation rŽsumŽe en des termes tout ˆ la fois si affirmatifs et si vagues, ce qui nous entra”nerait sur un terrain peu familier ˆ la plupart de nos lecteurs et fort aride, du moins de traiter sommairement ces trois points :

La filiation des Rouvroy Saint-Simon est authentiquement Žtablie depuis le commencement du quatorzime sicle ; en joignant les renseignements que fournissent les dossiers du Cabinet des titres ˆ la gŽnŽalogie dressŽe par le P. Anselme ou par les savants continuateurs de son Histoire de la maison royale de France et des grands officiers de la couronne [4], nous avons pu sans peine dresser les tableaux qui terminent cet appendice. On y verra que les premiers Rouvroy connus Žtaient deÇ sages et vaillants chevaliers È du pays de Vermandois, qu'ils prirent part ˆ toutes les grandes batailles de la guerre de Cent ans, et que les chroniques contemporaines les citent souvent avec Žloges. La terre de Saint-Simon, situŽe, comme celle de Rouvroy, en Vermandois, leur vint en 1337, par suite d'une alliance avec l'hŽritire de cette seigneurie, trs-peu considŽrable d'ailleurs, et, ds lors, ils en accolrent le nom, ou parfois mme le substiturent ˆ leur nom originaire et patronymique de Rouvroy. Puis, ils formrent un certain nombre de branches, qui se dispersrent dans la Picardie, le Beauvaisis et le Valois. Les uns et les autres continurent de servir le Roi, soit dans ses armŽes, soit ˆ la cour mme, comme chambellans, Žcuyers, gentilshommes ordinaires, ou bien comme gouverneurs de places fortes, capitaines de compagnies d'ordonnances, chevaliers de lÕordre de Saint-Michel, etc. Mais, par eux-mmes, par leurs seigneuries ou par leurs alliances, ils comptaient ˆ peine dans la noblesse de second ordre, et personne n'avait songŽ ˆ rechercher par delˆ le moyen ‰ge les origines de leur maison, encore moins ˆ leur trouver une attache avec les descendants de Charlemagne qui avaient portŽ le titre de comtes de Vermandois et possŽdŽ un immense apanage [5], lorsque, vers 1560, l'un des rŽnovateurs de la science historique, Jean du Tillet, greffier civil du Parlement, tira de certain cartulaire de Philippe-Auguste, conservŽ au TrŽsor des chartes [6], une notice, une espce de gŽnŽalogie informe des derniers reprŽsentants de ce rameau de la dynastie carolingienne, qui semblait avoir ŽtŽ placŽe au revers de la premire feuille du cartulaire pour justifier l'annexion de l'apanage des Vermandois au domaine de Philippe-Auguste. Du Tillet traduisit en ces termes le texte latin [7] : Ç Monsieur Hugues de France, ˆ la requte des barons de Vermandois, Žpousa Adle (ou Alix), fille du dernier [8] Herbert comte de Vermandois et de la fille du comte de Vaden, et hŽrita ˆ son beau-pre, combien qu'il ežt Eudes, son fils, qui fut dŽshŽritŽ du comtŽ par le conseil desdits barons, pour ce qu'il Žtoit de petit entendement et sans gouvernement ; toutefois, il fut mariŽ avec la fille d'un chevalier de Vermandois qui n'est nommŽ, et en eut un fils appelŽ Farie [9], pre de Jean de Saint-Simon, dont est descendue la maison de Saint-Simon. È C'est sur ce document que tous les historiens ou les chronologistes venus aprs Jean du Tillet, depuis Franois de Belleforest [10] jusqu'aux frres Sainte-Marthe et jusqu'aux auteurs de l'Art de vŽrifier les dates, ont fondŽ la gŽnŽalogie des comtes de Vermandois ; c'est la dernire phrase (on doit faire observer qu'elle n'existe pas dans le texte original [11]) qui a ŽtŽ le point de dŽpart de la lŽgende rŽsumŽe par notre auteur, comme on l'a vu, en une ou deux courtes lignes. Voici comment se dressait le plus communŽment cette filiation :

I. Charlemagne, empereur. II. PŽpin, roi d'Italie,   810. III. Bernard, roi d'Italie,   818.

IV. PŽpin II, seigneur de PŽronne et Saint-Quentin.
V. Herbert Ier, seigneur de PŽronne et Saint-Quentin,   902.PŽpin, comte de Vermandois et de Senlis. Dont: BŽatrix de Vermandois ; Žp. Robert, roi de France
VI. Herbert II, comte de Vermandois   943.
VII. Albert Ier, comte de Vermandois,   988.
VIII. Herbert III, comte de Vermandois,   1015.
IX. AlbertII, comte de Vermandois,   sans postŽritŽ
Othon, comte de Vermandois,   25 mai 1045

Du 2 :

X. Herbert IV, comte de Vermandois ; Žp. Adle ou Hildebrante de Valois, comtesse de CrŽpy, sÏur du bienheureux Simon, comte de CrŽpy.

XI. Eudes de Vermandois, dit l'InsensŽ ; Žp. Avide, fille du seigneur de Saint-Simon.XI'. Adle, comtesse de Vermandois et de CrŽpy, Žp. : 1¡ en 1077, Hugues de France, dit le Grand, comte de Vermandois (  1102)  ; 2¡ Renaud, comte de Clermont. De Hugues, elle eut : Raoul le Vaillant, comte de Vermandois, sŽnŽchal et rŽgent de France,   1152. Dont : ƒlŽonore, comtesse de Vermandois, de Valois et de CrŽpy, mariŽe quatre fois.

Descendance de Eudes l'InsensŽ :

XII. Eudes II Farin, seigneur de Saint-Simon ; Žp. : 1¡ Otgine de Saint-Paul ; 2¡ Emmeline de Roye.

XIII. Jean Ier de Saint-Simon cŽda ses droits sur le Vermandois au roi Philippe-Auguste et le suivit en Terre-Sainte ; Žpousa Mahaud de Thourotte.
XIV. Jean II de Saint-Simon combattit ˆ Bouvines (1214) ; Žp. Marguerite de Beauvoir, ou ClŽmence de Fayel.
XV. Simon, alias Ferry, de Saint-Simon (1260) ; Žp. BŽatrix, dame de Coudun, ou Auberte de Hangest.
XVI. Mathieu de St-Simon ; Žp. GŽrardine de Roye.
XVII. Jacques Ier, seigneur de Saint-Simon, Beauvoir, Coudun, etc. ; Žp. en 1325, Agns de Campremy, dame d'Estouilly.

Ensevelir son nom sous un meilleur

Selon toute vraisemblance, les Saint-Simon qui existaient au temps de Jean du Tillet ne furent pour rien dans sa dŽcouverte et n'en tirrent aucun profit ; ils ne songeaient alors ˆ relever ni le nom de Vermandois, ni les armes que du Tillet [ 1570] ou ses Žditeurs [1607] attriburent aux descendants de Charlemagne, d'Herbert IV et de Hugues le Grand : ŽchiquetŽ d'or et d'azur, au chef du second chargŽ de cinq fleurs de lis du premier [12]. Mais ˆ peine Claude de Saint-Simon eut-il remplacŽ Baradat dans les bonnes gr‰ces du roi Louis XIII, que les gŽnŽalogistes s'empressrent d'offrir leurs services au puissant du jour. Pierre d'Hozier dŽbutait alors et avait pour protecteur le comte de CrŽquy-Bernieulles, proche parent des Saint-Simon Sandricourt ; il dressa, ds 1626, une filiation des anctres de l'ancien page, peut-tre pour l'instruction du Roi, qui, avant de combler de bienfaits un nouveau favori, se faisait Ç sourdement extrmement informer de son personnel et de sa naissance [13]. È Nous n'avons pas cette gŽnŽalogie, qui, selon toutes probabilitŽs, ne fut jamais imprimŽe [14], et nous ne pouvons savoir si elle rattachait les descendants de Mathieu de Rouvroy ˆ la royale lignŽe de Vermandois ; mais c'est chose peu vraisemblable, car on ne trouve aucune allusion ˆ cette filiation, ˆ cette attache Ç par une femme, È dans deux Ç tables gŽnŽalogiques È que le cŽlbre juge d'armes dŽdia ˆ Monsieur le Premier, en 1630 et 1631, et qui avaient pour but de prouver la parentŽ des Rouvroy avec les Budos, les Montmorency, les Bourbon-CondŽ [15], et mme avec la maison de France [16].

A dŽfaut de d'Hozier, le chanoine picard Adrien de la Morlire, dans son Recueil de plusieurs nobles et illustres maisons vivantes et Žteintes en l'Žtendue du diocse d'Amiens, qui parut vers le mme temps, en 1630, se chargea d'Žtablir une gŽnŽalogie complte des Rouvroy Saint-Simon. Il y joignit toute la lignŽe des Vermandois avant et aprs Eudes l'InsensŽ, plusieurs gŽnŽrations de Rouvroy antŽrieures ˆ Mathieu le Borgne et remontant jusqu'au temps de Philippe-Auguste, et la suite des diverses branches qu'avaient formŽes les descendants de Mathieu et de Marguerite de Saint-Simon. La Morlire, que MŽnage a trop complaisamment qualifiŽ de Ç gŽnŽalogiste sžr [17] È, n'Žtait pas moins inexact qu'incorrect, et il ne produisait point de nouveaux titres : Jean du Tillet et Belleforest lui avaient seuls fourni la filiation des Vermandois. Cependant ces autoritŽs semblrent suffisantes pour que la branche a”nŽe de la famille prit officiellement le nom de Saint-Simon de Vermandois [18], et mme pour qu'on fit reconna”tre par le Roi, dans les lettres d'Žrection du duchŽ-pairie de Saint-Simon (janvier 1635 [19]), que les Ç sieurs de Saint-Simon Žtoient issus en ligne directe des comtes de Vermandois [20]. È En outre, le texte de ces lettres patentes nous rŽvle qu'il ne suffisait dŽjˆ plus au nouveau duc et pair de se rattacher Ç par une femme au sang de Charlemagne, È et qu'il travaillait ˆ intervertir l'ordre des noms qu'avaient portŽs ses anctres, ˆ faire de Rouvroy ou Rouvray un surnom seigneurial, de Saint-Simon le nom patronymique, et ˆ supprimer ainsi toute interruption de la ligne masculine entre lui et Eudes l'InsensŽ [21].

Claude et son frre a”nŽ mirent une foule de gŽnŽalogistes en mouvement pour appuyer leurs prŽtentions. Les uns, tels que Franois du Chesne [22], Jean du Bouchet [23], David Blondel [24] ou le magistrat bordelais Gabriel de Loberan de Montigny [25], se bornrent ˆ reconna”tre Marguerite de Saint-Simon comme hŽritire des comtes de Vermandois, et les seigneurs de Rouvroy comme Ç baronnets primitifs du Royaume, d'ancienne et illustre maison, et de la plus haute noblesse de nom et d'armes [26]. È

D'autres, au contraire, soutinrent, proclamrent hautement que Ç la maison de Saint-Simon n'Žtoit pas tombŽe en Rouvroy, mais celle de Rouvroy en Saint-Simon, par le mariage contractŽ, environ l'an 1200, par HŽriberte, hŽritire de Rouvroy, avec Mathieu de Saint-Simon, fils d'Oger, fils de Jean, seigneur de Saint-Simon, lequel Mathieu, selon la coutume du temps, prit nom et armes de Rouvroy, qui Žtoit la plus illustre race du Vermandois.... È Ainsi s'exprimait, vers 1655, un historien du Vermandois assez estimŽ, Claude HemmerŽ, bibliothŽcaire de la Sorbonne, qui avait dŽjˆ publiŽ l'Augusta Viromanduorum vindicata et illustrata, et qui, voulant faire une histoire complte des comtes de Vermandois et des Saint-Simon, composa d'abord pour le duc Claude une biographie curieuse de son a•eul le grand bailli de Senlis, ce Gilles de Saint-Simon Rasse que ses descendants comparaient volontiers aux du Guesclin, aux Richemont, aux Bayart, aux Toiras, aux GuŽbriant [27].

 La thse de Claude HemmerŽ fut, vers le mme temps, et sur l'ordre de Claude de Saint-Simon, dŽveloppŽe fort longuement par un feudiste Žrudit qui Žtait bailli gŽnŽral du duchŽ de Saint-Simon, et qui s'appelait Henri de Maubreuil [28]. Son travail a ŽtŽ conservŽ, comme celui de Loberan de Montigny, dans les papiers de Franois du Chesne [29] ; les dimensions et le caractre de cette dissertation ne nous permettent pas de la reproduire textuellement, si curieux que puisse tre l'exposŽ officiel de la lŽgende remaniŽe et transformŽe par un subtil hŽraldiste ; mais nous en donnerons les principales conclusions, qui devinrent autant d'articles de foi pour les diverses branches de la maison de Rouvroy Saint Simon, et auxquelles le duc Claude s'empressa de faire droit aussi compltement qu'il fut en son pouvoir.

 Ç Le premier et plus vŽritable nom de [votre famille], disait Maubreuil, doit tre celui de Vermandois,... qui a ŽtŽ depuis changŽ en celui de Saint-Simon, et ensuite en celui de Saint-Simon Rouvroy.... Vos a•eux vous ont dŽlaissŽ cette assurance de pre en fils, que votre maison, qui est de la vŽritable famille de Saint-Simon, est issue de nos comtes de Vermandois. Vos anciens titres en font mention, la gŽnŽalogie qui en a ŽtŽ faite du temps de Philippe-Auguste et le transport qui lui a ŽtŽ fait ensuite par Jean de Saint-Simon, qui sont dans le TrŽsor des chartes du Roi, en font preuve. Mre Jean du Tillet, qui avoit une connoissance trs-particulire des titres de la couronne et de la descente des grandes maisons, par la communication qu'il avoit eue des registres et anciens arrts du Parlement, l'a tŽmoignŽ dans un temps auquel il n'y avoit pas de favoris de votre famille. M. HemmerŽ, trs-savant docteur de Sorbonne, qui avoit fait une Žtude toute particulire de notre Vermandois, qu'il a donnŽe au public ; MM. de Sainte-Marthe [30], le R. P. Labbe, jŽsuite [31], les sieurs du Bouchet, Blondel, et gŽnŽralement tous les bons et curieux historiographes le confirment... De manire que vous pourriez, sans aucune difficultŽ, reprendre le nom et les armes de Vermandois, si vous le trouviez bon, nonobstant ce que les envieux de la gloire de votre illustre extraction en pourroient dire ; car, aprs tous ces raisonnements et les autoritŽs et preuves que vous avez pour vous, ce seroit ˆ eux ˆ prouver le contraire....

Ç Quant aux armes, elles ont ŽtŽ premirement de Vermandois, c'est-ˆ-dire ŽchiquetŽes d'or et d'azur de plusieurs pices, au chef de France, qui est d'azur chargŽ de trois fleurs de lis d'or ; mais Mathieu de Saint Simon, dit de Rouvroy, fils d'Ogier de Saint-Simon et d'HŽriberte de Rouvroy, dŽsirant tŽmoigner son zle au recouvrement de la Terre Sainte dans les croisades, fit peindre sur sa bannire, graver sur son Žcu et broder sur sa cotte d'armes les armes de ceux de Rouvroy, ses alliŽs, qui Žtoient, comme elles sont encore aujourd'hui, de sable ˆ la croix d'argent chargŽe de cinq coquilles de gueules. Ce qui n'a pas empchŽ que ses descendants n'aient retenu quelque chose des armes de Vermandois, savoir : les a”nŽs, le plus souvent par leurs doubles bannires, et les pu”nŽs en quartiers ; et mme aucuns d'eux les ont aussi retenues dans une double bannire, Žtant ˆ remarquer que toute votre famille a eu pour support de ses armes deux sauvages, homme et femme ; que l'homme, posŽ ˆ main droite, a toujours portŽ la bannire de Vermandois, et la femme, posŽe ˆ gauche, la bannire de Haverskerque-Rasse, qui est d'or ˆ la fasce de gueules, ˆ cause de Mme de Haverskerque-Rasse, femme de Mre Mathieu, sire de Saint-Simon, mre du grand Gilles de Saint-Simon, qui a commencŽ la branche des seigneurs de Rasse, et laquelle Žtoit trisa•eule de dŽfunt M. de Rasse, votre pre : au lieu que la branche des a”nŽs, qu'a commencŽe Mre Gaucher, sire de Saint-Simon, frre a”nŽ de Gilles, a toujours portŽ la croix de Saint-Simon Rouvroy en sa seconde bannire.

Ç Ces vŽritŽs Žtant ainsi Žtablies, vous pouvez, Monseigneur, ˆ mon avis, transfŽrer le quartier de Vermandois que vous portez ˆ la droite de vos armes, comme Žtant le lieu que vous estimez le plus Žminent, au tout, c'est-ˆ-dire les placer sur le tout, ou en faire le tout de vos armes ; elles seront mieux ˆ mon sens de cette sorte, qu'elles ne sont en la forme que vous les portez ˆ prŽsent, en composant, comme vous faites, votre premier quartier de Vermandois et de Saint-Simon Rouvroy.

Ç Vous pourriez mme les porter tout pleines de Vermandois seulement, et ajouter ˆ l'avenir ˆ votre nom de Saint-Simon celui de Vermandois, en signant : Claude, duc de Saint-Simon de Vermandois, puisque personne ne peut douter que vous ne soyez issu des comtes de Vermandois.... È

Enfin, Maubreuil terminait en ces termes :

Ç Je n'estime pas, Monseigneur, qu'aprs toutes ces raisons que j'ai extraites du dessein que j'ai de faire paro”tre le plus t™t qu'il me sera possible (si vous me tŽmoignez le souhaiter) l'histoire de la mme maison de Saint-Simon, o, Dieu aidant, j'en rapporterai les preuves plus au long, personne vous puisse contester le nom et les armes de Vermandois, soit sŽparŽment, ou par adjonction au nom et aux armes de Saint-Simon, afin d'empcher ceux qui en parleront ˆ l'avenir de les nommer de Saint-Simon Rouvroy, en les obligeant de les qualifier Saint-Simon Vermandois.

Ç Si pourtant, Monseigneur, je ne satisfais pas ˆ ce que Votre Grandeur peut dŽsirer de moi dans ce rencontre, et si vous me faites la gr‰ce de me faire savoir en quoi, je m'efforcerai de vous donner au surplus toutes les satisfactions possibles, pour vous faire paroitre que la plus grande de mes passions est de vous tŽmoigner que je suis, avec tous les respects imaginables,

Ç Monseigneur,

Ç Votre trs-humble et trs-obŽissant serviteur, Henri de Maubreuil, Bailli gŽnŽral de votre duchŽ et pairie de Saint-Simon.

Nous ne savons si Maubreuil fit imprimer la gŽnŽalogie de la maison de Saint-Simon Žtablie sur les donnŽes de son mŽmoire [32] ; mais, ds l'annŽe 1664, un nouvel historien, Jean le Carpentier [33], vint produire au grand jour, dans son Histoire gŽnŽalogique de la noblesse des Pays-Bas [34], un certain nombre de Ç rares chartes, È dont il ressortait, entre autres faits nouveaux, que le frre dŽshŽritŽ d'Adle de Vermandois n'avait pas ŽtŽ un Ç homme de petit entendement, È mais un mauvais fils, rebelle contre son pre (Herbert IV), et que, par consŽquent, son exhŽrŽdation Žtait injuste, sans valeur, aussi bien que la spoliation de ses descendants, rŽduits au pauvre village de Saint-Simon, alors que, Ç selon le droit de sang et de succession, ils devoient possŽder des provinces entires [35]. È

Tel Žtait l'Žtat des choses, lorsque Louis de Saint-Simon vint au monde. Quoique la Bruyre, dans un passage des Caractres qui s'applique singulirement bien aux Saint-Simon Vermandois [36], ait reprŽsentŽ le public de la cour comme fort crŽdule, nous ne croyons pas que personne prit au sŽrieux la filiation des descendants d'Eudes l'InsensŽ ; mais on comprend quelle influence ces lŽgendes purent avoir sur l'esprit d'un jeune homme, entra”nŽ par son gŽnie naturel, autant que par le fait de l'Žducation et des gožts du temps, vers les Žtudes d'histoire gŽnŽalogique ; on sent que, l'orgueil aidant, il en arrivera ˆ ne voir Ç dans la nation que la noblesse, dans la noblesse que les ducs et pairs, et parmi les ducs et pairs que lui [37] È, et l'on est presque tentŽ de se demander si, en son for intŽrieur, il ne pourrait pas aller quelque jour jusqu'ˆ concevoir des Ç prŽtentions chimŽriques ˆ la couronne de France È, comme, sous Henri III, l'archidiacre Franois des Rosires [38] en inspira aux Guises [39]. A qui douterait de l'Žtrange pouvoir que peuvent exercer ces croyances sur les esprits les mieux douŽs, on rappellera qu'aprs avoir exaltŽ jusqu'au paroxysme les passions aristocratiques du duc et pair, elles devaient, un demi-sicle plus tard, entra”ner dans une voie toute diffŽrente le fondateur du Saint-Simonisme [40].

GŽnŽalogie fautive

Nous devons maintenant montrer par o pŽchait la gŽnŽalogie si laborieusement Žtablie en l'honneur du favori de Louis XIII, et ce qu'il faut admettre ou rejeter des prŽtendues preuves fournies ˆ l'appui.

Quant ˆ l'origine des Vermandois et ˆ leur attache avec Charlemagne, plusieurs points sont trs-douteux. Selon les historiens du temps, Bernard, roi d'Italie, n'Žtait qu'un enfant illŽgitime de PŽpin, second fils du grand empereur. En outre, on ne conna”t pas le nom de la femme de qui il eut le fils qui ne conserva que les seigneuries de PŽronne et de Saint-Quentin, aprs la dŽfaite de Bernard par Louis le DŽbonnaire, et qui passe pour avoir ŽtŽ l'auteur des comtes de Vermandois et de Senlis.

De l'exhŽrŽdation d'Eudes l'InsensŽ, il n'y a pas d'autre preuve que la notice du cartulaire de Philippe-Auguste ; on ne saurait admettre un instant les chartes produites ˆ ce sujet par Jean le Carpentier : leur faussetŽ a ŽtŽ reconnue malgrŽ la prŽcaution qu'il avait prise de les faire contr™ler par la cour de Hollande ; elles ont dž tre fabriquŽes pour le service d'une autre prŽtendue branche de Vermandois, la Ç trs-illustre maison de Sohier [41]. È En soi, l'exhŽrŽdation n'est pas absolument invraisemblable, car nous croyons qu'on cite un cas de spoliation pareille, ˆ la mme Žpoque, pour Guillaume de Sully, fils d'un des comtes de Champagne de la maison de Blois ; mais ici la tradition repose uniquement sur une notice retrouvŽe par Jean du Tillet : or le contexte de cette notice, sa forme insolite, son intercalation dans un recueil d'actes de tout autre nature, et jusqu'ˆ l'incertitude des connaissances historiques et gŽnŽalogiques de la chancellerie de Philippe-Auguste, tout engage ˆ n'accepter qu'avec rŽserve ce document, sans lequel rien ne subsiste plus de l'Žchafaudage ŽlevŽ par les du Tillet, les HemmerŽ, les Carpentier, les Maubreuil.

Rien ne justifie non plus les degrŽs qui sŽparent Jean de Saint Simon, contemporain de Philippe-Auguste, du dix-septime degrŽ (Jacques Ier de Saint-Simon [42]), le premier sur lequel nous ayons quelque document prŽcis [43]. Carlier a produit au dix-huitime sicle, comme nous le dirons plus loin, des extraits du cartulaire de Longpont o figurent ces gŽnŽrations intermŽdiaires ; mais le fait seul que ce cartulaire avait ŽtŽ indiquŽ par Jean le Carpentier, et que Carlier en place les extraits au milieu des chartes notoirement fabriquŽes par son prŽdŽcesseur, suffirait pour les faire rejeter, si d'ailleurs ils ne prŽsentaient avec la notice du cartulaire de Philippe-Auguste des contradictions flagrantes, que Carpentier et Carlier eux-mmes ont ŽtŽ forcŽs de reconna”tre. En somme, rien de sžr, rien d'authentique avant les deux actes suivants, dont Clairambault nous a conservŽ copie [44].

Par le premier, datŽ du 29 mai 1334, Agns de Campremy, dame de Saint-Simon, partage la terre de Coudun, prs Compigne, avec ses deux filles, qui sont : haute dame et noble Madame Marguerite de Saint Simon, femme de Mathieu de Rouvroy, et Madame BŽatrix de Saint Simon, dame de FrŽmicourt. Le second acte, du 5 septembre 1337, est un partage de la succession de Monsieur Jacques de Saint-Simon, chevalier, entre Mathieu, dit le Borgne de Rouvroy, chevalier, seigneur du Plessier-sur-Saint-Just, et Marguerite de Saint-Simon, sa femme, fille a”nŽe de Jacques Ier et hŽritire de Jacques II, Žcuyer, son frre, d'une part, et noble homme Monsieur Guillaume, seigneur de PrŽcy, chevalier, et BŽatrix de Saint-Simon, sa femme. Aux premiers sont dŽvolus le ch‰teau et la terre entire de Saint-Simon, ˆ charge de payer les douaires dus aux veuves de Jacques Ier et de Jacques II, plus une moitiŽ de la terre de Gaure en CambrŽsis et de celle de Coudun [45].

C'est donc en 1337 que le nom et l'hŽritage des premiers seigneurs de Saint-Simon passrent, faute d'hoirs m‰les, ˆ Mathieu de Rouvroy, dit le Borgne ; les deux pices que nous venons d'indiquer ne laissent point de place aux suppositions spŽcieuses de Maubreuil et des autres gŽnŽalogistes qui s'Žtaient chargŽs de rattacher directement ce Rouvroy ˆ Eudes l'InsensŽ [46]. Quant ˆ la question d'armoiries, elle peut se rŽsoudre d'une faon pŽremptoire, gr‰ce aux monuments sigillographiques qui sont parvenus jusqu'ˆ nous. Les derniers seigneurs de Saint-Simon, issus ou non d'Eudes l'InsensŽ, portaient : d'argent au chef denchŽ ou emmanchŽ de sable [47]. Leurs contemporains Mathieu de Rouvroy, dit le Borgne, et son frre cadet Alphonse de Rouvroy, gouverneur et rŽformateur de la Navarre pour le roi Charles IV, portaient : de sable ˆ la croix d'argent et chargŽe de cinq coquilles de gueules [48]. Rien de commun entre ces deux blasons, et, quand le bailli Maubreuil suppose que des raisons politiques ou de famille amenrent un Saint-Simon ˆ prendre les armes de Rouvroy aprs que dŽjˆ les descendants d'Eudes l'InsensŽ avaient dž remplacer par un Žcusson d'argent au chef de sable les armoiries originelles des Vermandois, il n'y a qu'une objection ˆ faire : c'est que les armoiries n'Žtaient point connues au temps d'Herbert IV et d'Eudes l'InsensŽ ; par consŽquent, les Vermandois carolingiens n'avaient pu porter ni un ŽchiquetŽ ni des fleurs de lis, et tout au moins ces dernires eussent-elles dž tre rŽservŽes ˆ la dynastie capŽtienne [49]. C'est dans le recueil de Jean du Tillet [1607] qu'on trouve, croyons-nous, pour la premire fois ces prŽtendues armoiries des comtes Herbert : Ç Monsieur Hugues de France, frre du roi Philippe Ier, Žpousant l'hŽritire du comte Herbert de Vermandois, accorda prendre les armes de sa femme, laquelle portoit : d'or ŽchiquetŽ d'azur ; et pour montrer qu'il Žtoit issu de la maison de France, ajouta cinq fleurs de lis au-dessus de son Žcu [50] È. Sainte-Marthe, le P. Labbe, Jean le Carpentier, le prieur Antoine Thuret, suivirent docilement du Tillet [51]. Or, ˆ l'Žpoque o celui-ci restituait aux Saint-Simon, avec une illustre origine, le droit d'en porter les emblmes dans leurs armoiries, la branche des seigneurs de Rasse (branche formŽe par le bailli Gilles, et qui devint ducale en 1635) avait effectivement dans ses armes un ŽchiquetŽ semblable ˆ celui dont l'Žrudit greffier dotait gratuitement les comtes de Vermandois, et ce fait est trs-facile ˆ expliquer. L'usage de distinguer les diffŽrentes branches d'une mme famille par des Ç Žcartelures È Žtant devenu fort commun, Gilles avait joint aux armoiries de Rouvroy celles de sa mre, Jeanne de Haverskerque, dame de Rasse, dont le nom devait rester ˆ sa descendance pendant trois sicles. Les armes de Haverskerque Žtaient : d'or ˆ la fasce de gueules [52] ; on les trouve accolŽes ˆ la croix de Rouvroy dans divers monuments du quinzime sicle [53].

Mais une nouvelle addition aux armoiries patrimoniales fut encore imposŽe ˆ Gilles par son cousin Louis, seigneur de PrŽcy-sur-Oise, comme clause de la donation de la terre de PrŽcy (1451) [54]. Sur l'Žcusson dŽjˆ parti de Rouvroy aux premier et quatrime quartiers, de Rasse aux deuxime et troisime, on plaa en cÏur les armes de PrŽcy : losangŽ d'argent et de gueules, au chef d'or, armes fort semblables d'apparence au prŽtendu Žcusson de Vermandois, comme chacun pourra s'en rendre compte en suivant ces variations sur les gravures de l'Histoire gŽnŽalogique du P. Anselme. Et si nous ajoutons qu'ˆ la gŽnŽration suivante, Guillaume, fils de Gilles, Žpousa l'hŽritire du premier prŽsident de la Vacquerie, dont les armes Žtaient un ŽchiquetŽ d'argent et d'azur, au chef de gueules [55], et que, par suite de cette alliance, les Saint-Simon Rasse eurent encore le droit d'ajouter ou de substituer au losangŽ des PrŽcy l'ŽchiquetŽ des la Vacquerie, le lecteur comprendra comment des gŽnŽalogistes complaisants, plus inventifs que savants ou consciencieux, s'empressrent de reconna”tre le soi-disant emblme des Vermandois carolingiens dans des partitions d'origine beaucoup plus modeste. Moyennant l'adjonction de cinq fleurs de lis en chef, l'ŽchiquetŽ de la Vacquerie prit des apparences tout ˆ fait royales et conformes ˆ la description de Jean du Tillet, sans qu'on s'aperžt que c'Žtait donner aux descendants d'Eudes l'InsensŽ les armoiries attribuŽes prŽcisŽment par le Recueil des Rois de France ˆ l'usurpateur de leur apanage, au fondateur d'une seconde lignŽe de comtes de Vermandois. Cette transformation d'armoiries parait avoir co•ncidŽ avec l'ŽlŽvation de Claude de Saint-Simon ˆ la qualitŽ de favori du roi Louis XIII. Louis Ier et Franois de Saint-Simon Rasse, trisa•eul et bisa•eul de l'auteur des MŽmoires, n'avaient portŽ que les partitions rŽgulires de Rouvroy, de Rasse, et de PrŽcy sur le tout [56]. A partir de 1626, le premier et le quatrime quartier prŽsentent les armes de Vermandois accolŽes ˆ celles de Rouvroy : parti ŽchiquetŽ d'or et d'azur, au chef de France, et de sable ˆ la croix d'argent chargŽe de cinq coquilles de gueules [57]. C'est ainsi que le duc Claude Saint-Simon et son frre le marquis les portaient [58]. Les gŽnŽalogistes donnrent en outre pour supports ˆ l'Žcusson ainsi composŽ : Ç Un homme et une femme sauvages au naturel, de sinople, tenant chacun un guidon, l'un des armes de Vermandois, et l'autre de celles de Haverskerque de Rasse ; pour cimier, un sauvage de mme, tenant du bras droit une masse levŽe, et de l'autre un bouclier [59]. È

Mais, vers 1663, quand le bailli Maubreuil eut engagŽ son ma”tre ˆ affirmer plus hautement des droits Ç incontestables, È Claude de Saint-Simon et sa fille, devenue tout rŽcemment la duchesse de Brissac, remplacrent, sur le tout de leurs armes, l'Žcusson de PrŽcy par celui de Vermandois, rŽpŽtŽ ainsi trois fois [60]. C'est seulement dans les monuments hŽraldiques qui nous restent de Louis de Saint-Simon, auteur des MŽmoires, que nous voyons enfin les armes de Vermandois occuper seules le premier et le quatrime quartier, en regard de la croix des Rouvroy, relŽguŽe aux second et quatrime quartiers [61]. Il ne reste plus trace ni de la fasce des Haverskerque, ni du losangŽ des PrŽcy, ni de l'ŽchiquetŽ de la Vacquerie. C'est ˆ peu prs ce qu'avait demandŽ Maubreuil [62]. Ç Vous pouvez, disait-il, porter le seul nom et les armes pleines de Vermandois, puisque ce sont vos vŽritables nom et armes, comme Žtant les premiers que vos anctres ont portŽs. Si toutefois il m'Žtoit permis de vous en dire ma pensŽe, elle ne seroit pas que vous deviez quitter entirement le nom et les armes que vos a•euls ont portŽs jusques ˆ prŽsent, et qui se trouvent dans les histoires, dans les titres de votre maison.... Autrement, on auroit peut-tre peine ˆ vous croire ci-aprs de leur mme famille [63]. È Selon toute apparence, cette modification dŽfinitive des armoiries de la branche ducale de Saint-Simon est du fait de Louis de Saint-Simon. Dans la seule occasion o ses MŽmoires parlent de la croix des Rouvroy, pour renier une famille de ce nom qui la portait aussi, et qui, trs-probablement, appartenait ˆ la mme souche que les Saint-Simon, on voit qu'il avait fait une Žtude particulire Ç de son nom et de ses armes [64] È, et qu'il l'a rejetŽe dans les Pices justificatives des MŽmoires. Comment Saint-Simon a-t-il traitŽ dans cette Žtude les questions qui viennent d'tre exposŽes sommairement ? Pour peu que l'amour-propre ne l'aveugl‰t point, il devait voir du premier coup d'Ïil, en gŽnŽalogiste expŽrimentŽ, les points dŽfectueux, les contradictions, les invraisemblances, de ces diffŽrentes filiations, qui toutes n'avaient eu pour but que de flatter et de servir un favori, un duc et pair de fra”che date.

Ce qui devait lui tre encore plus sensible, c'est que les meilleurs auteurs du dix-septime sicle avaient protestŽ, tout au moins par le silence, contre les thses des Maubreuil, des HemmerŽ, des Carpentier. Au premier rang, le P. Anselme, dans l'Ždition originale de son Histoire de la maison royale de France et des grands officiers de la couronne [65], n'avait voulu reconna”tre ˆ Herbert IV, comte de Vermandois, d'autre enfant que sa fille Alix, femme de Hugues de France. Plus tard, il est vrai, dans la seconde et la troisime Ždition [66], ses continuateurs donnrent place ˆ la lignŽe d'Eudes l'InsensŽ et des anciens seigneurs de Saint-Simon, mais en dŽclarant qu'elle avait ŽtŽ Žtablie par Vyon d'HŽrouval, non par le P. Anselme lui-mme, et sans rien affirmer, sur la question d'armoiries, qui pžt les compromettre. Quant aux Rouvroy, ni le P. Anselme ni ses continuateurs ne voulurent les faire remonter plus haut que Mathieu le Borgne, mariŽ ˆ Marguerite de Saint-Simon [67]. Or il faut se souvenir que l' Histoire des grands officiers avait presque la valeur d'un recueil officiel, que Saint-Simon l'estimait par-dessus tout, qu'il s'en servait chaque jour, et qu'il offrit mme ses services ou ses conseils pour en complŽter certaines parties [68].

Un autre gŽnŽalogiste cŽlbre, qu'il cite volontiers, tout en le traitant fort mal ˆ l'occasion (peut-tre par rancune [69]), Jacques-Guillaume de Imhof (1651-1728), consentit, dans la seconde partie de ses Excellentium familiarum in Gallia genealogi¾ [70], ˆ faire remonter la filiation des Saint-Simon, Ç par femme, È jusqu'ˆ Bernard, fils naturel de PŽpin, roi d'Italie ; mais, du c™tŽ des Rouvroy, il ne dŽpassa pas Mathieu le Borgne, et qualifia comme il convenait l'addition du prŽtendu quartier de Vermandois aux armes de nos deux ducs [71].

Non moins catŽgorique que le P. Anselme, Gilles-AndrŽ de la Roque, qui, selon ses biographes, Ç connoissoit tous les dŽfauts des familles et sembloit prendre plaisir ˆ les publier, È s'exprima ainsi dans son TraitŽ de l'origine des noms [72] : Ç En Picardie, dans le bailliage de Vermandois, les seigneurs de Rouvroy ont portŽ conjointement les deux noms de Rouvroy et de Saint-Simon. Cela Žtoit fondŽ sur ce que Marguerite de Saint-Simon, qui descendoit des comtes de Vermandois, branche de la maison royale, Žtoit femme de Mathieu de Rouvroy, dit le Borgne, seigneur du Plessis-sur-le-Gast. È

Un autre gŽnŽalogiste encore, le Dauphinois Guy Allard, ne reconnaissait Žgalement dans les Saint-Simon que de simples Rouvroy, de la mme origine que ceux qu'ils ne voulaient prŽcisŽment pas avouer pour leurs parents [73]. Haudicquer de Blancourt lui-mme, si facile et si complaisant, n'accepta point la filiation inventŽe par HemmerŽ, et s'en tint ˆ la gŽnŽalogie de Rouvroy dressŽe par le chanoine la Morlire [74].

Si Louis de Saint-Simon ne provoqua point quelque auteur de son temps ˆ soutenir la mme thse que les gŽnŽalogistes gagŽs par son pre, c'est, ˆ notre avis, que ses connaissances rŽelles dans cette science et ses relations avec de vrais Žrudits, tels que Gaignires et Clairambault, lui inspiraient une juste mŽfiance, lui faisaient sentir le danger de livrer ˆ un examen sŽrieux l'Žchafaudage sur lequel reposaient toutes ses prŽtentions nobiliaires [75]. D'ailleurs, s'il n'ežt pas eu conscience de ce danger, le public railleur se serait chargŽ de le rappeler ˆ la prudence. Ds que l'avnement du RŽgent aux affaires permit ˆ Saint-Simon d'aborder la politique et de sortir de l'abstention o il avait vŽcu jusque-lˆ, ce fut aux dŽpens de sa noblesse, tout autant que de sa petite taille et de sa pitre apparence, que les faiseurs de couplets et d'Žpigrammes s'escrimrent ˆ l'envi. On sait le mot de Madame, bonne connaisseuse en gŽnŽalogies, sur Saint-Simon serrant de trop prs le prince des Deux-Ponts. Nous ne pourrions dire combien de couplets vinrent Žgalement rappeler la vŽritable extraction du Ç mirmidon furibond È qui se posait en chef-nŽ de l'aristocratie ducale [76].

Au Parlement, il n'y avait qu'une clameur contre ce Ç M. de Saint-Simon, qui auroit pu dŽsirer tout au plus d'tre rŽputŽ ancien gentilhomme [77] È, et qui affectait plus de mŽpris qu'aucun grand seigneur pour les lŽgistes roturiers, jadis simples souffleurs des pairs [78]. Quand la lutte s'envenima entre les magistrats et les ducs-pairs, le nom de Rouvroy ne fut pas des moins maltraitŽs dans le fameux libelle de mars 1716, prŽsentŽ au RŽgent par le prŽsident de Novion, et dont les ŽlŽments paraissent avoir ŽtŽ empruntŽs en partie aux gŽnŽalogies satiriques du pamphlŽtaire Guillard [79]. Ç La fortune de ce duc, y disait-on, est si rŽcente, que tout le monde en est instruit : jamais il ne fut si mince noblesse. Un de ses cousins, qui Žtoit l'a”nŽ de sa maison, Žtoit, presque de nos jours, Žcuyer de M. le marŽchal de SchŸlemberg [80]. La ressemblance des armes de la Vacquerie, qu'il Žcartle, avec celles de Vermandois, leur a fait dire qu'ils venoient d'une princesse de cette maison [81]. Enfin la vanitŽ de ce petit duc est si folle, que, dans sa gŽnŽalogie [82], il fait venir de la maison de Bossu, illustre en Flandre, d'o sont sortis les princes de Chimay, un bourgeois, juge de Mayenne, qui a ŽpousŽ l'hŽritire de la branche a”nŽe de sa maison [83]. È Les ducs et pairs, nous dit Saint-Simon, ne voulurent rŽpondre que par le dŽdain ˆ Ç un tissu de mensonges et d'injures impudentes et un parallle extravagant de la naissance des ducs, des prŽsidents ˆ mortier et de quelques autres magistrats.... Ils laissrent tomber cet Žcrit dans le nŽant, et tromprent une attente si bien concertŽe [84]. È C'est cependant en rŽponse ˆ ce libelle que fut imprimŽ un mŽmoire justificatif sur l'antiquitŽ des maisons ducales, dont chaque duc fournit sans doute sa partie, et o l'article de Saint-Simon commenait en ces termes : Ç Nous avons ˆ la cour peu de maisons aussi anciennes que celle de Saint-Simon, qui tire son origine d'Olivier de Rouvroy, chevalier et vivant en 1060... [85]. È Suivait une citation empruntŽe ˆ la Morlire ou ˆ Haudicquer de Blancourt [86] ; mais il ežt fallu fournir de meilleures autoritŽs, et, mme dans le camp des ducs et pairs, on ne se dissimula point que le libelle avait touchŽ Saint-Simon aux endroits vulnŽrables [87]. Mieux que personne, il connaissait Ç les chimres et les rŽalitŽs È de ces gŽnŽalogies Ç qui n'ont d'autre fruit que de dŽsoler ceux qui ne peuvent montrer de vŽritŽ [88] È ; et cependant son orgueil d'une part, d'autre part les traditions de famille, l'obligeaient ˆ soutenir une lŽgende qui manquait manifestement de bases solides, qui n'avait jamais trouvŽ pour dŽfenseurs que des gens sans crŽdit, et ˆ laquelle personne ne voulait ajouter foi. Comment s'acquittait-il de cette t‰che difficile ? Quels arguments pouvait-il invoquer ˆ l'appui des prŽtentions que lui avait lŽguŽes son pre? C'est ce que ne sauraient nous apprendre les quelques lignes des MŽmoires rappelŽes en tte de cette notice ; ce que son Žtude sur le nom et les armes de Rouvroy, cette Ç pice È dont il a ŽtŽ parlŽ plus haut [89], pourrait seule rŽvŽler.

Quoi qu'il en fžt de sa valeur, la lŽgende continua ˆ se transmettre de gŽnŽration en gŽnŽration ; elle prit mme de nouveaux dŽveloppements peu aprs la mort de Louis de Saint-Simon, gr‰ce ˆ deux ouvrages considŽrables qui parurent alors sur le Valois et le Vermandois. En 1764, Claude Carlier, prieur d'Andresy, consacra aux Vermandois dŽshŽritŽs et ˆ leurs reprŽsentants un long article de son supplŽment de l'Histoire du Valois [90]. Comme HemmerŽ, il faisait sortir de la mme souche royale, en ligne directe et masculine, les Rouvroy aussi bien que les Saint-Simon ; ˆ l'aide des documents produits par Jean le Carpentier (nous avons dit leur faussetŽ Žvidente), il Žclairait de Ç l'Žclat de la plus vive lumire È les points obscurs de la filiation ou de l'exhŽrŽdation d'Eudes l'InsensŽ. Nous croirions volontiers que cet article, rectification tardive d'un passage du premier volume de l'Histoire du Valois [91], fut inspirŽ, ou tout au moins demandŽ par un parent de notre duc, digne hŽritier de ses gožts pour les Žtudes gŽnŽalogiques et de ses prŽtentions ˆ une origine royale, cet Žvoque d'Agde, Charles-Franois-SimŽon de Saint-Simon Sandricourt [92], qui Žtait un admirateur passionnŽ de l'auteur des MŽmoires, et qui s'effora, sous le rgne de Louis XVI, de reprendre au DŽp™t des affaires Žtrangres ses manuscrits et ses papiers sŽquestrŽs depuis 1760 [93]. Bibliophile et antiquaire Žrudit [94], liŽ avec beaucoup de gens de lettres, et surtout fanatique du nom de Vermandois, Monsieur d'Agde dut agir, en 1764, sur le prieur d'Andresy et lui fournir des matŽriaux. Il n'est pas douteux du moins que ce fut lui qui engagea encore, en 1771, le doyen Jean-Paul Colliette ˆ reprendre, dans le premier volume de ses MŽmoires pour servir ˆ l'histoire du Vermandois [95], les mmes arguments et la mme thse [96], et la pŽroraison de Colliette fait penser que le docte prŽlat se rŽservait pour lui-mme de traiter le sujet plus compltement, plus dŽfinitivement [97]. Si ce projet n'eut pas de suite, si Monsieur d'Agde ne mit pas en Ïuvre ses documents, il n'en crut pas moins leur valeur assez bien Žtablie pour prendre le nom de Vermandois, et il le porta mme dans les actes publics.

Nous ne devons point passer sous silence, en arrivant ˆ la fin du sicle, une dernire gŽnŽalogie que quelque autre membre de la famille [98] fit inscrire tout ˆ la fin du supplŽment du Dictionnaire de la noblesse de la Chenaye des Bois [99], et qui est le travail le plus complet que nous connaissions, le seul mme qui donne des renseignements prŽcis sur les Saint-Simon du dix-huitime sicle, contemporains ou hŽritiers de notre auteur. Les premires lignes de cette gŽnŽalogie rŽsument bien l'Žtat de la question au point de vue des intŽressŽs : Ç Rouvroy Saint Simon, dit la Chenaye, maison originaire du Vermandois, qui a toutes les marques d'anciennetŽ et d'illustration. Son origine a ŽtŽ reconnue en Allemagne et en France pour descendre en ligne directe de Charlemagne : car, dans les lettres patentes d'Žrection de la terre de Saint Simon en duchŽ et pairie, Louis XIII la reconnut descendre en ligne directe des comtes de Vermandois, lesquels Žtoient descendus de Charlemagne.... È

Lorsque survint la RŽvolution, le chef de la branche de Saint-Simon MonblŽru, qui Žtait devenue branche a”nŽe, chercha asile en Espagne [100] et y obtint une haute position, comme hŽritier de la grandesse crŽŽe au profit de notre auteur. Au milieu des troubles qui agitaient la pŽninsule, ˆ la veille mme d'un triomphe des armŽes impŽriales qui faillit lui cožter la vie, le marquis de Saint-Simon fit dresser ˆ Madrid, par un prtre du nom de D. Juan Verdier de Portdeguy, une Genealogia de la antigua familia y casa de San-Simon qui cl™t dignement la sŽrie de gŽnŽalogies de parade que nous venons de passer en revue. Ce monument de famille, que nous serons les premiers ˆ faire conna”tre en France [101], rappelle, en plus d'un point, le Ç concile È admirŽ par notre auteur chez M. de Clermont-Tonnerre [102], si mme il ne le dŽpasse, car on y trouve tout ˆ la fois une liste des familles souveraines auxquelles la maison de Saint-Simon se rattachait par les Vermandois, les dix ou douze saints dont elle pouvait se rŽclamer du mme c™tŽ, et enfin, complŽment naturel des gŽnŽalogies carolingiennes, une filiation remontant de gŽnŽration en gŽnŽration jusqu'aux temps les plus reculŽs, de Charlemagne ˆ PŽpin le Bref, puis ˆ Carloman, duc des Franais ; ˆ Charles-Martel, maire du palais et prince des Franais ; ˆ PŽpin Ier ; ˆ Anchise (Ansegise), familier de Sigebert II ; ˆ saint Arnoul, familier de ThŽodebert II et Žvque de Metz ; et enfin ˆ Marcus M¾cilius Avitus, Ç qui occupa le sige impŽrial de Rome È en 455. ƒtant admises l'attache des Rouvroy Saint-Simon avec les Vermandois et celle des Vermandois avec Charlemagne, l'auteur des MŽmoires se trouverait ainsi descendre, au trente-troisime degrŽ environ, non point d'un de ces cŽsars d'aventure comme il en fut tant proclamŽ dans les camps romains, mais d'un patricien de vieille famille d'Auvergne, qui comptait lui-mme parmi ses a•eux des personnages trs-considŽrables, et qui avait jouŽ personnellement un grand r™le comme sŽnateur et comme prŽfet du prŽtoire des Gaules, avant d'tre ŽlevŽ ˆ la pourpre par la noblesse narbonnaise [103].

Poursuivie ainsi jusqu'aux confins les plus reculŽs de notre histoire, la filiation dont Jean du Tillet posait les prŽmisses en 1560, arrive ˆ donner aux descendants de Mathieu le Borgne et de Marguerite de Saint-Simon plus d'antiquitŽ et d'illustration que n'en saurait prouver aucune race souveraine de l'Europe [104].

Sans contester, de parti pris, ces rŽsultats merveilleux, encore convient-il d'tre aussi prudent que les auteurs de l'Histoire gŽnŽalogique. Ç Faute d'avoir pu rassembler les premiers titres, È ils se sont bornŽs ˆ rapporter en tte de leur gŽnŽalogie de Rouvroy Saint-Simon, par ordre chronologique, les noms des personnages du douzime ou du treizime sicle dont l'attache ne leur semblait pas suffisamment prouvŽe. De mme aussi notre tableau gŽnŽalogique, pour prŽsenter toutes les garanties voulues d'authenticitŽ, ne commencera qu'ˆ Mathieu de Rouvroy et Marguerite de Saint-Simon, laissant de c™tŽ non-seulement les Vermandois carolingiens et les descendants d'Eudes l'InsensŽ, mais aussi tous ces Ç anctres de parure [105] È que les Rouvroy proprement dits allaient chercher jusque dans le dixime sicle [106], et dont Maubreuil, Carlier, etc., ont si singulirement faussŽ et embrouillŽ la filiation [107].

Nous n'ajouterons plus que quelques mots sur l'origine du nom de Saint-Simon. La localitŽ de ce nom, situŽe au cÏur du Vermandois, sur la rive gauche de la Somme, ˆ quarante-cinq kilomtres N. O. de Laon et seize de Saint-Quentin, est un bourg de mŽdiocre importance [108], qui n'a jamais ŽtŽ plus considŽrable, mme comme sige de duchŽ-pairie. On a racontŽ que ce lieu Žtait dŽsert et couvert de broussailles lorsque, en 1030, Eudes de Vermandois, dŽpouillŽ de l'immense apanage de ses pres, vint y fixer sa demeure. Autour du ch‰teau, un groupe d'habitations se forma bient™t : il prit nom du bienheureux Simon, comte de CrŽpy, oncle maternel d'Eudes, dont la conversion et la vie monastique forment une des belles pages du pontificat de saint GrŽgoire VII [109], et qui mourut en 1082 [110]. Ñ A part les invraisemblances que prŽsente cette origine du nom, il est prouvŽ que le bourg de Saint-Simon Žtait en roture lorsqu'il passa aux mains des Rouvroy (ceux-ci venaient probablement du village de Rouvroy situŽ de mme proche de la Somme, ˆ quatre kilomtres de Saint-Quentin), et qu'il ne fut ŽrigŽ en fief noble, par l'abbŽ de Saint-Bertin, dont il dŽpendait, qu'en 1371, ˆ la prire de Jean de Rouvroy, dit de Saint-Simon, seigneur de Coivrel et du Plessier-en-Beauvaisis. On peut admettre l'exhŽrŽdation d'Eudes de Vermandois, mais non sa dŽchŽance au rang des plus minces censitaires roturiers, et Carlier ou Colliette n'ont fait que des rŽponses na•ves ˆ cette objection capitale.

Tableau gŽnŽalogique simplifiŽ

II. NOTES SUR CLAUDE DE ROUVROY, PREMIER DUC DE SAINT-SIMON

Claude de Saint-Simon occupe une telle place dans les premires pages des MŽmoires de son fils, que notre dessein Žtait tout d'abord de prŽsenter ici une Žtude complte qui f”t conna”tre, sous tous les aspects, et dans les phases diverses de sa longue existence, ce personnage nŽgligŽ jusqu'ici par la plupart des biographes, sinon par tous. Il s'est trouvŽ que cette Žtude dŽpasserait de beaucoup les proportions d'un Appendice dŽjˆ fort chargŽ ; on la trouvera donc ailleurs, dans un volume supplŽmentaire de l'Ždition du texte des MŽmoires commencŽe en 1873 par MM. ChŽruel et Adolphe RŽgnier fils [111]. Ici nous nous bornerons ˆ extraire ou ˆ rŽsumer, de la Notice biographique sur Claude de Saint-Simon, les Žclaircissements annoncŽs dans nos notes sur divers points de la vie ou du caractre de ce duc, que, selon nous, la vŽnŽration filiale a prŽsentŽs inexactement en maint endroit des MŽmoires.

Ç La naissance et les biens ne vont pas toujours ensemble. Diverses aventures de guerres et de famille avoient ruinŽ notre branche, et laissŽ mes derniers pres avec peu de fortune et d'Žclat pour leurs services militaires : mon grand-pre, qui avoit suivi toutes les guerres de son temps, et toujours passionnŽ royaliste, s'Žtoit retirŽ dans ses terres, o son peu d'aisance l'engagea de suivre la mode du temps et de mettre ses deux a”nŽs pages de Louis XIII, o les gens des plus grands noms se mettoient alors. È

Ainsi s'exprime Saint-Simon [112], avant de raconter l'Ç origine premire de la fortune de son pre. È

On ne voit pas, dans les gŽnŽalogies que rŽsume le prŽcŽdent appendice, ˆ quelles Ç aventures de guerres et de famille È notre auteur entend faire allusion. Depuis Gilles de Saint-Simon, auteur de la branche de Rasse, chaque gŽnŽration successivement avait recueilli le profit de ses services sous forme de charges ˆ la cour ou de commandements militaires, tandis que des alliances contractŽes, soit dans la mme classe de noblesse ˆ laquelle appartenaient les Rouvroy, soit dans des familles parlementaires riches, influentes et bien accrŽditŽes [113], entretenaient le patrimoine hŽrŽditaire en rapport avec ce que Saint-Simon appelle la Ç naissance È. Les MŽmoires n'ont pas dit, et mme ils ont habilement dissimulŽ la vŽritable raison qui fora l'a•eul et le bisa•eul de Louis de Saint-Simon ˆ se retirer dans leurs terres, loin de la cour, o les gŽnŽrations prŽcŽdentes avaient constamment figurŽ dans un rang honorable, sinon supŽrieur.

La raison du retrait : la Ligue

Louis de Saint-Simon, premier du nom, petit-fils de Gilles, avait dž ˆ de longs et brillants services militaires la charge de bailli de Senlis, jadis possŽdŽe par son a•eul. En 1570, il la rŽsigna au profit de son fils a”nŽ Franois. Celui-ci, aprs avoir fait son Žducation et ses dŽbuts comme page de leur puissant voisin de Chantilly, le connŽtable de Montmorency, s'Žtait dŽjˆ distinguŽ aux batailles de Saint-Denis, de Jarnac, de Moncontour. Mais, la Ligue Žtant venue, le nouveau bailli se jeta avec ardeur dans le parti catholique-lorrain, contre le grŽ des habitants de Senlis, qui, heureux d'avoir ŽvitŽ les massacres de la Saint-BarthŽlemy, avaient refusŽ au marŽchal de Montmorency de signer l'acte d'Union, contraire, selon eux, ˆ Ç la libertŽ des Franais. È Ils appelrent alors, pour prendre le gouvernement de la ville, un royaliste dŽvouŽ, le seigneur de Humerolles, et ce nouveau bailli, s'Žtant comportŽ Ç au grŽ et contentement du peuple, fut depuis, ˆ leur requte, confirmŽ par lettres patentes du Roi [114] È. Mais, ˆ la suite de la journŽe des Barricades, Franois de Saint-Simon, Ç M. de Rasse È comme on l'appelait alors, s'unit avec l'Žvque de Senlis, Guillaume Rose, l'un des plus forcenŽs ligueurs, pour enlever la ville ˆ son souverain lŽgitime. Le complot rŽussit : le 13 fŽvrier 1589, M. de Rasse et son fils a”nŽ Saint- Simon, munis d'un ordre du duc d'Aumale, s'emparrent par surprise de Senlis, firent main basse sur le bailli Humerolles et sur les autres personnages hostiles ˆ la Ligue, et forcrent par leurs menaces l'assemblŽe gŽnŽrale des habitants de donner son adhŽsion aux articles de l'Union. M. de Rasse s'installa tout aussit™t, avec une commission en rgle de gouverneur de Senlis dŽlivrŽe par le conseil parisien ; mais, quoiqu'il eut conservŽ jusque-lˆ du crŽdit dans la ville [115], son triomphe fut de courte durŽe. PressŽs de se soustraire au rŽgime oppressif de leur gouverneur en mme temps qu'au fanatisme des prŽdicateurs les habitants appelrent ˆ leur secours M. de Montmorency-ThorŽ, qui pŽnŽtra dans la ville le 26 avril 1589, y rŽtablit l'autoritŽ lŽgitime et se mit en mesure de rŽsister ˆ un retour offensif. M. de Rasse fut fait prisonnier et vit son ch‰teau du Plessis dŽtruit par les vainqueurs. Rendu peu de temps aprs ˆ la libertŽ, il continua, ainsi que son fils et que plusieurs de ses cousins, ˆ compter parmi les plus fidles adhŽrents de la Ligue, et prit part ˆ toutes les tentatives dirigŽes contre Senlis. On voit donc que la vŽritŽ historique a ŽtŽ dŽnaturŽe sur ce premier point par les MŽmoires, et que l'a•eul et le bisa•eul de notre auteur, loin d'tre Ç toujours passionnŽs royalistes, È se compromirent trs-gravement dans la lutte qui retarda de cinq ans l'avnement d'Henri IV au tr™ne. Sur ce point, les documents contemporains et les histoires locales sont aussi prŽcis qu'irrŽfutables [116]. Si la gŽnŽalogie de Saint-Simon publiŽe en 1712 et 1729 par les continuateurs du P. Anselme contient des affirmations contraires [117], c'est, comme nous l'avons dŽjˆ dit dans le premier appendice, que cette gŽnŽalogie a dž tre prŽparŽe, fournie, par notre auteur lui-mme, et ne fait qu'un, pour ainsi dire, avec ses MŽmoires [118].

La coupable conduite de MM. de Saint-Simon Rasse dans cette guerre civile est donc, ˆ ce qu'il semble, la seule Ç aventure È qui les fora de Ç se retirer dans leurs terres [119]. È Le gouvernement de Senlis leur Žchappa ainsi : M. de ThorŽ, qui avait proclamŽ Henri IV roi ds le 4 aožt 1589, eut pour remplaant, quelques mois plus tard, son cousin et compagnon de guerre Louis de Montmorency-Bouteville. Celui-ci fut rŽgulirement confirmŽ dans la charge de grand bailli et gouverneur ; lorsqu'il mourut, en 1615, elle passa d'abord ˆ son fils a”nŽ, puis, en 1646, ˆ un cadet, Franois de Montmorency-Bouteville, le duelliste dont Saint-Simon aura l'occasion de parler ˆ propos de son fils le marŽchal de Luxembourg [120], et ce fut seulement en 1627 que la retraite de Bouteville hors du Royaume et la faveur naissante de Claude de Saint-Simon firent revenir le gouvernement de Senlis aux descendants du grand bailli Gilles.

Louis de Saint-Simon, second du nom, Žtait fort jeune au temps o son pre l'avait entra”nŽ dans le parti de la Ligue [121] ; il se maria tout aussit™t aprs l'entrŽe d'Henri IV dans Paris, avec une proche voisine et alliŽe de ses cousins MM. de Sandricourt, et il en eut six enfants au moins, dont trois fils [122] : Charles, nŽ le 15 avril 1601, qui prit plus tard le titre de marquis de Saint-Simon ; Claude, nŽ, ou du moins baptisŽ le 16 aožt 1607 [123], qui devint duc de Saint-Simon ; Louis, qui entra dans l'ordre de Malte, devint commandeur et joua un certain r™le dans les troubles de la Fronde, mais dont les MŽmoires de son neveu ne disent mot [124].

Les deux premiers allrent faire leur Žducation, comme pages, ˆ la cour du jeune roi Louis XIII, non point pages de la grande ou de la petite Žcurie, mais pages de la chambre, Ç pages d'honneur. È Ces places Žtaient rŽservŽes pour les bonnes et anciennes familles [125] : aux ƒtats de 1614, l'ordre de la noblesse supplia Louis XIII Ç de tenir le plus grand nombre de pages qu'il pourrait, et d'ordonner qu'ils fussent tous de la qualitŽ requise. È On remarquera cependant que notre auteur croit devoir expliquer comment les hŽritiers des comtes de Vermandois, les reprŽsentants directs de la descendance de Charlemagne, pouvaient avoir ŽtŽ mlŽs, confondus avec la jeune domesticitŽ du Roi : Ç Son peu d'aisance (de Louis II de Saint-Simon) l'engagea de suivre la mode du temps et de mettre ses deux a”nŽs pages de Louis XIII, o les gens des plus grands noms se mettoient alors. È C'est que, plus tard, les usages changeant, la troupe des pages fut moins soigneusement composŽe [126], et un jour Madame lana cette Žpigramme ˆ la l'ace de Saint-Simon : Ç D'o vient que M. le duc de Saint-Simon presse tant le prince des Deux-Ponts ? a-t-il envie de le prier de prendre un de ses fils pour page [127] ? È

Faveur et aviditŽ de Claude

Claude de Saint-Simon Žtait encore page en 1625, mais dŽjˆ fort bien vu du Roi, car les MŽmoires de Pontis racontent ˆ cette Žpoque comment il fut gratifiŽ, conjointement avec Pontis lui-mme, d'une taxe ˆ lever sur un traitant, et comment sa seule part fut de vingt mille Žcus [128]. D'o lui Žtait venue cette faveur ? D'une certaine habiletŽ ˆ prŽsenter les chevaux de relais, nous dit son fils [129] ; et Tallemant des RŽaux donne cette curieuse variante : Ç Le Roi.... prit amitiŽ pour Saint-Simon ˆ cause que ce garon lui rapportoit toujours des nouvelles certaines de la chasse, qu'il ne tourmentoit point trop ses chevaux, et que, quand il portoit son cor, il ne bavoit point dedans. Voilˆ d'o vint sa fortune [130]. È Un pamphlet de 1716, contre les ducs et pairs, dit qu'il excellait, tout comme M. de Luynes, ˆ Žlever des oiseaux pour le divertissement de Louis XIII [131]. Quoi qu'il en soit, le mŽrite n'Žtait pas grand ; mais on sait que Louis XIII cherchait volontiers des amis et des confidents parmi ses serviteurs familiers, et demandait seulement que Ç le cardinal ne s'en ml‰t pas [132]. È

Le jeune Saint-Simon se trouva donc tout portŽ pour recueillir la succession de Baradat, lorsque Richelieu, qui, selon Tallemant, Ç ne vouloit pas que ces petits favoris s'ancrassent trop, È renversa celui-ci [133]. Le pouvoir ežt pu tomber aux mains d'un homme habile et dangereux, comme Toiras, le nouveau lieutenant gŽnŽral du pays d'Aunis [134] : on se h‰ta de substituer ˆ ce prŽtendant un page de vingt ans ˆ peine, Ç jeune garon d'assez pitre mine et pire esprit [135], È qui Ç n'avoit rien de recommandable, et qui Žtoit mal fait [136], È et pour qui l'on pensait que Ç la mauvaise conduite de l'autre serait une leon, et sa chute un exemple de faire mieux [137]. È

Ce fut le 2 dŽcembre 1626 que la disgr‰ce frappa Baradat ; mais il fallut quelque temps pour obtenir la transmission de ses charges ˆ son successeur. Celle de premier Žcuyer de la petite Žcurie ne valait pas moins de cent mille Žcus [138], et le cardinal de Richelieu, visant ˆ l'Žconomie, ežt voulu Ç faire que cette somme n'all‰t ˆ rien avec le temps. È L'Žvque de Mende, chargŽ par Baradat de discuter ses intŽrts avec Bassompierre et M. de Bellegarde, tint bon, et le Roi, qui Ç avoit impatience È de voir Saint-Simon pourvu [139], put enfin signer, le 5 mars 1627, ses provisions de premier Žcuyer et de capitaine du Petit-Bourbon [140].

A partir de 1627, les faveurs du Roi et ses libŽralitŽs furent tout acquises ˆ quiconque portait le nom de Saint-Simon. En premier lieu, le ch‰telain du Plessis-de-Rasse, l'ancien ligueur de 1589, Louis de Saint- Simon, pre du nouveau favori, fut pourvu de la charge de bailli et gouverneur de Senlis [141], ˆ laquelle fut jointe, en 1629, une pension de quinze cents livres. Son fils a”nŽ devint successivement gouverneur de Pont-Sainte-Maxence (dont il possŽdait dŽjˆ la ch‰tellenie) et capitaine de l'ancien ch‰teau royal de FŽcamp, gouverneur des Salins de Peccais, capitaine des chasses de la fort d'Halatte, mestre de camp du rŽgiment de Navarre, capitaine du ch‰teau et des chasses de Chantilly, etc., etc., sans parler des dons et des pensions de tout genre [142]. Quant au frre cadet, entrŽ en 1626 dans l'ordre de Malte, il eut l'honneur, comme les deux autres, d'accompagner le Roi pendant ses campagnes et de remplir plusieurs missions de confiance, qui l'aidrent ˆ obtenir promptement une commanderie.

Mais c'est surtout ˆ la personne mme du favori que s'adressaient le plus constamment les marques de l'affection et de la gŽnŽrositŽ de Louis XIII. Dans l'espace de trois ans environ, Saint-Simon joignit ˆ ses deux premires charges celles de capitaine des ch‰teaux royaux de Saint-Germain et de Versailles [143], de grand louvetier, de premier gentilhomme de la chambre, de conseiller du Roi en ses conseils d'ƒtat et privŽ, et enfin de gouverneur de Meulan et de Blaye [144]. En outre, il reut chaque annŽe des dons ou des gratifications considŽrables. Une recherche trs-sommaire dans les seuls registres de la Chambre des comptes fait conna”tre les chiffres suivants : en mai 1628, don de vingt-quatre mille livres, ˆ prendre sur le produit des forts du Valois ; en 1629, vingt mille livres d'une part et quinze mille livres d'autre part, sur les mmes forts ; en 1630, pension de six mille livres et don de trente et une mille livres sur l'ƒpargne ; en novembre 1631, autre don de quatre-vingt-dix mille livres sur l'ƒpargne ; la mme annŽe, don d'une partie des terres confisquŽes sur l'ancien surintendant la Vieuville ; en juin 1632, don des produits de la comtau de Blaye et du domaine de Vitrezay ; en avril 1634, nouvelle pension de six mille livres, comme premier Žcuyer et grand louvetier ; en juin 1635, don de quarante-huit mille livres sur l'ƒpargne ; en aožt 1636, pension de huit mille livres pour ses Ç entretŽnement et appointements È de premier Žcuyer.... Et tout n'Žtait pas enregistrŽ ˆ la Chambre.

A c™tŽ de ces pensions ou de ces dons en beaux deniers, on trouve encore des libŽralitŽs d'un autre genre, comme la concession de l'enceinte fortifiŽe de la Rochelle, dont nous allons parler un peu plus longuement, car c'est lˆ l'origine du comtŽ de Rasse sur lequel l'auteur des MŽmoires fit asseoir plus tard la grandesse de son second fils.

Claude de Saint-Simon, dŽsormais insŽparable de son ma”tre, le suivit dans ses deux voyages de 1627 et 1628 au camp devant la Rochelle, et y fut accompagnŽ de ses frres, qui prirent une part active aux travaux du sige ou aux combats de l'”le de RŽ : il fit choisir l'a”nŽ pour conduire ˆ Paris les drapeaux et les canons pris aux Anglais dans l'affaire du 8 novembre 1627 [145], et le cadet (qui commandait un vaisseau en sa qualitŽ de chevalier de Malte) pour aller annoncer la nouvelle de la reddition aux deux reines et ˆ la ville de Paris [146]. Quant ˆ lui-mme, qui ne quittait jamais les c™tŽs du Roi [147], il eut sa part de la dŽpouille des rebelles qui avaient tenu si longtemps en Žchec Louis XIII et Richelieu.

Ds le lendemain de l'entrŽe des troupes royales dans la Rochelle, le premier Žcuyer reut en don tous les terrains et tous les matŽriaux des fortifications, dont une dŽclaration royale venait d'ordonner la dŽmolition immŽdiate. C'Žtait, en superficie, environ cent cinquante mille toises, reprŽsentant une valeur estimative de plus de quatre-vingt mille livres. Avant mme que ce don fžt rŽgularisŽ [148], Saint-Simon vendit terrains et matŽriaux pour la modique somme de vingt et une mille livres, ne se rŽservant que six arpents, o il comptait faire Žlever un couvent de capucins [149], et ce fut l'acquŽreur qui, quelques mois plus tard [150], obtint l'Žrection des terrains en un fief dit de Saint-Louis, relevant du ch‰teau de la Rochelle ; mais, heureusement pour le premier Žcuyer, diverses difficultŽs suscitŽes par le domaine royal amenrent, en 1635, la rescision du contrat de vente, et Saint-Simon se fit remettre solennellement en possession par la Chambre des comptes [151].

Trs-rapidement transformŽs en rues, en quais, en cales, les terrains se couvrirent de maisons et de boutiques, qui payrent un cens annuel au seigneur du fief, c'est-ˆ-dire ˆ Saint-Simon, outre les droits ordinaires de lods et ventes dus pour chaque mutation. Ces produits Žtaient peu considŽrables par eux-mmes ; mais, Žtendus ˆ un tiers, ou ˆ un quart pour le moins, de la ville, ils formrent un revenu annuel de cinq ˆ sept mille livres [152]. En outre, le seigneur, Žtant chargŽ d'entretenir les quais et cales, fut autorisŽ ˆ lever sur les navires des droits assez forts d'amarrage et de sŽjour : presque nul en temps de guerre, ce produit augmentait rapidement ds le retour de la paix et le rŽtablissement du commerce maritime [153].

Le fief de Saint-Louis, avons-nous dit, fut ŽrigŽ plus tard en comtŽ, et reut alors le nom de Rasse portŽ si longtemps par les Saint-Simon, en souvenir de l'hŽritage de la maison de Haverskerque, et donnŽ mme ˆ leur ch‰teau du Plessis-Choisel. C'est en 1724 que Louis de Saint-Simon, n'ayant point en Espagne une terre sur laquelle il pžt asseoir la grandesse dont Philippe V venait de le gratifier [154], obtint de la placer sur son fief de la Rochelle, ŽrigŽ en comtŽ de Rasse par lettres du roi Louis XV, afin de Ç perpŽtuer la jouissance du fief Saint-Louis dans la maison de Saint-Simon, comme un prŽcieux monument et un tŽmoignage public que reut autrefois le duc Claude de Saint-Simon de l'affection et de l'estime du roi Louis XIII [155]. È Le nouveau comtŽ fut transfŽrŽ alors, par don entre vifs, au second fils de notre duc, avec substitution aux reprŽsentants du nom de Saint-Simon ; substitution et grandesse devaient tre par la suite l'objet d'un grand procs (1776-1777), et donner naissance ˆ des difficultŽs, des confusions singulires, qui subsistent encore de nos jours [156].

Si, en terminant cette ŽnumŽration sommaire des libŽralitŽs de Louis XIII, nous indiquons encore les dons de jouissances domaniales qui accroissaient considŽrablement le produit des gouvernements de Blaye, de Saint-Germain et autres [157], ou bien certaines concessions, moitiŽ industrielles et moitiŽ financires, dont les courtisans savaient tirer profit [158], on devra convenir que notre Saint-Simon a quelque peu exagŽrŽ, entre autres Ç vertus È, le dŽsintŽressement de son pre [159].

Aux charges et aux richesses vinrent bient™t s'ajouter les honneurs les plus enviŽs entre ceux dont pouvait disposer le monarque. Lors de la promotion de 1633, non-seulement Claude de Saint-Simon obtint le collier de l'Ordre pour lui-mme, mais, ˆ dŽfaut de son pre, trop vieux et Žtranger ˆ la cour, il fit aussi porter son frre a”nŽ sur la liste de la dernire heure [160], et cette distinction ne fut sans doute pas Žtrangre au brillant mariage conclu, l'annŽe suivante, entre Charles de Saint-Simon et la tante de la princesse de CondŽ et du duc de Montmorency [161].

Enfin, le nom de Saint-Simon fut dŽcorŽ du titre ducal. En qualitŽ de cadet, le premier Žcuyer ne devait avoir qu'une part de la terre de Vaux-sur-Meulan, appartenant ˆ Denise de la Fontaine, sa mre [162] ; cette part, avec une soulte de cent cinquante mille livres, en partie payŽe du prix de sa charge de premier gentilhomme de la chambre, lui servirent ˆ racheter d'Isaac de Saint-Simon et de Marie d'Amerval [163] les terres et seigneuries de Saint-Simon, Avesne, Pont-Artemps, et la baronnie de Benay, qui Žtaient le patrimoine hŽrŽditaire de la branche a”nŽe. Par le mme acte, Louis de Rouvroy Saint-Simon, seigneur de Cambronne et frre pu”nŽ d'Isaac, cŽdait aussi, contre une pension viagre de six cents livres, le vicomtŽ de Clastres [164]. Ces terres Žtaient toutes de la mouvance du Roi, comme comte de Vermandois, sauf Benay, qui relevait du duchŽ de Guise ; Claude acheta en outre, le 25 janvier 1635, au prix de dix mille livres, plusieurs petites seigneuries sises prs de Ham, afin de parfaire les conditions requises pour qu'une terre pžt tre ŽlevŽe au titre de duchŽ-pairie, et, quoique le cardinal de Richelieu fžt peu disposŽ ˆ sanctionner de si hautes faveurs, Louis XIII signa, dans les derniers jours du mme mois, les lettres d'Žrection [165].

Ce texte a dŽjˆ ŽtŽ publiŽ plusieurs fois, notamment dans l' Histoire gŽnŽalogique des grands officiers de la couronne [166] et dans la gŽnŽalogie espagnole de la maison de Saint-Simon, imprimŽe en 1808 ; nous n'en donnerons donc ici que la partie essentielle, en y faisant quelques cor- rections d'aprs les copies manuscrites, qui sont nombreuses [167], et en rap- pelant que ces lettres patentes, prŽparŽes par l'impŽtrant ou par ses amis, sont loin d'avoir l'importance et de mŽriter la confiance qu'on serait naturellement tentŽ d'accorder aux Ç considŽrants È d'un acte solennel de chancellerie [168].

Ç Louis, par la gr‰ce de Dieu roi de France et de Navarre, ˆ tous prŽsents et ˆ venir, Salut. Les rois nos prŽdŽcesseurs n'ont point donnŽ de plus assurŽes marques de leur bienveillance envers ceux qui, par leurs agrŽables, assidus et signalŽs services, se sont acquis leurs bonnes gr‰ces, qu'en les honorant de titres et qualitŽs, non-seulement attachŽs ˆ leur personne, mais qui, par une perpŽtuelle mŽmoire, s'Žtendissent ˆ leur postŽritŽ, rendant leur nom mŽmorable et leurs maisons ornŽes de prŽrogatives et prŽŽminences spŽciales : ce qu'ils ont fait d'autant plus volontiers que telles marques d'honneur Žtoient les plus grandes et convenables rŽcompenses par lesquelles les ‰mes gŽnŽreuses peuvent tre excitŽes aux actions de vertu et de courage. Et pour ce que nous ne desirons pas moins qu'aucuns autres princes et monarques qui aient ŽtŽ, dŽpartir ces mmes honneurs et dignitŽs ˆ ceux de qui la naissance, les vertus et bonnes actions ont su bien mŽriter de nous et de la chose publique ; considŽrant l'antiquitŽ et la noblesse des sieurs de Saint-Simon, issus en ligne directe des comtes de Vermandois, et ayant Žgard aux grands et recommandables services que plusieurs de cette maison ont faits pour la dŽfense et conservation des droits de notre couronne et de notre ƒtat, entre autres : Jean de Saint-Simon, seigneur de Rouvray [169], qui, ds l'an 1214, servant le roi Philippe en la bataille de Bouvines, signala son courage et son adresse par la prise du comte de Boulogne, et Alphonse de Saint-Simon, aussi seigneur de Rouvray, de qui l'emploi important marque la fidŽlitŽ et le mŽrite, par le gouvernement du royaume de Navarre qui lui fut commis, en qualitŽ de vice-roi, ds l'an 1340 : auquel temps, et en la mme annŽe, Mathieu de Saint-Simon de Rouvray, son frre, fut fait prisonnier de guerre au voyage qui se fit en Hainaut par le roi Jean, lors duc de Normandie ; et duquel Mathieu de Saint-Simon deux de ses fils ayant, par la perte de leur sang et de leur vie en la bataille d'Azincourt, contre les Anglois, en l'annŽe 1415, laissŽ Gilles de Saint-Simon, leur frre, seul hŽritier de leurs vertus comme de leurs biens, il auroit, en l'annŽe 1419, si dignement servi l'ƒtat contre l'invasion des Anglois, lesquels il contraignit de lever le sige de devant la ville de Gisors, que, pour mŽmoire et marque de sa valeur, il y fut, par le feu roi Charles VII, crŽŽ chevalier de son ordre, et depuis employŽ en toutes les expŽditions de son temps, o, en plusieurs batailles et siges des villes, il perpŽtua son nom, sa prudence et sa valeur, pour la gloire de ses descendants, qui depuis ont toujours continuŽ leurs soins, fidŽlitŽ et affection envers les rois nos prŽdŽcesseurs et nous. Tous lesquels avantages de naissance et de services Žtant, par une succession lŽgitime, heureusement transmis en la personne de notre amŽ et fŽal chevalier de nos ordres, conseiller en nos conseils d'ƒtat et privŽ, capitaine de cent hommes d'armes de nos ordonnances, notre premier Žcuyer, grand louvetier de France, gouverneur et notre lieutenant gŽnŽral en nos ville et citadelle de Blaye, Mre Claude de Saint-Simon, seigneur dudit Saint-Simon, baron de Benay, vicomte de Clastres, seigneur des ch‰tellenies, terres et seigneuries de Pont-Artemps, Avesne, Gauchy, Ugny-l'ƒquipŽe, Pontruet et autres lieux, nous aurions, ds ses jeunes ans, qu'il a eu l'honneur d'tre nourri prs de notre personne, remarquŽ en lui tant de gŽnŽreuses actions et inclinations ˆ la vertu, tant de sagesse en sa conduite, et tant d'ardeur et de zle pour notre service, que, le jugeant digne de notre affection, nous l'aurions ŽlevŽ consŽcutivement et par degrŽs aux plus grandes charges, dignitŽs et offices de notre maison, en toutes lesquelles charges chacun a pu voir avec combien d'honneur, de prudence et de fidŽlitŽ il s'est conduit et s'en est acquittŽ dignement. A ces causes, dŽsirant tŽmoigner le grand contentement et satisfaction que nous en avons, et, par une marque qui demeure ˆ ceux de sa maison, donner des preuves de la volontŽ en laquelle nous sommes de le bien et favorablement traiter ˆ l'avenir, savoir faisons que, de l'avis d'aucuns princes de notre sang et autres grands et notables personnages de notre Conseil, et de notre propre mouvement, certaine science, pleine puissance et autoritŽ royale, avons ˆ ladite terre et seigneurie de Saint- Simon, situŽe en notre pays et comtŽ de Vermandois, uni et incorporŽ, et, par ces prŽsentes, signŽes de notre main, unissons et incorporons les baronnie, vicomte, terres et seigneuries, justices, ch‰teaux, bourgs et villages de Benay, Clastres, Pont-Artemps, Avesne, Gauchy, Ugny-l'ƒquipŽe et Thorigny, Pontruet, Savy, Rumigny, Pithon, Aubigny, Iverny, Corbeny, Dury, et fiefs des Halles de Saint-Quentin et de Saint-Prix, leurs appartenances et dŽpendances, et autres y jointes, et qu'il pourra y joindre ci-aprs, qui relvent ˆ prŽsent en plein fief de nous, ˆ cause de notredite comtŽ de Vermandois ; et le tout avons crŽŽ et ŽrigŽ, ordonnŽ et Žtabli, et, par ces prŽsentes, signŽes de notre main, crŽons et Žrigeons, ordonnons et Žtablissons en nom, titre et dignitŽ de duchŽ et pairie ; voulons et nous pla”t lesdites terres, baronnie et seigneuries tre dites et appelŽes, ds maintenant et ci-aprs, le duchŽ de Saint-Simon, pour en jouir et user du jour de la prŽsente Žrection, perpŽtuellement et ˆ toujours, et le relever ˆ une seule foi et hommage, tant de nous que de notre couronne, par ledit sieur de Saint-Simon, et, aprs son dŽcs, par ses hoirs m‰les, avec les honneurs, autoritŽs, prŽrogatives, sŽances, profits et privilges qui appartiennent ˆ ladite dignitŽ, ainsi que les autres ducs et pairs en usent et jouissent ; et ce sous le ressort de notre cour de parlement de Paris... DonnŽ ˆ Paris, au mois de janvier, l'an de gr‰ce 1635, et de notre rgne le vingt-cinquime. LOUIS. Ç Par le Roi : Bouthillier. È

Ces lettres furent enregistrŽes au parlement de Paris ds le 1er fŽvrier, devant une nombreuse assemblŽe, o l'on remarquait le prince de CondŽ, les ducs d'Uzs, de Montbazon, de CrŽquy, de Chaulnes, de la Valette, de Retz et de Puylaurens, le marŽchal de Vitry, le surintendant Bouthillier, et Ç force chevaliers de l'Ordre et autres seigneurs et noblesse sans nombre, qui tŽmoignrent toute la satisfaction qu'ils en recevoient. È Saint-Simon avait dŽfendu ˆ son avocat de Ç s'Žtendre sur ses louanges ; È mais l'avocat gŽnŽral Bignon rappela longuement l'anciennetŽ d'une maison qui tirait son origine des comtes de Vermandois, les mŽrites des anctres du nouveau duc, et sa propre modestie. Ç Aussi, dit la Gazette en rendant compte de cette sŽance, la mŽmoire des plus vieux ne leur fournit-elle point d'exemple d'aucun qui ait mieux usŽ que lui de la faveur d'un si puissant monarque, ni qui s'en rendit plus digne, s'il se pouvoit ajouter quelque recommandation au choix que Dieu fait au ciel par l'organe des rois, ses miroirs en terre [170]. È

Faits ainsi sans perdre un seul jour, cet enregistrement, Ç dont dŽ- pendait la rŽalitŽ de la dignitŽ È du nouveau duc, et sa rŽception, Ç qui fixait son rang, et des siens, pour toujours [171], È eurent l'avantage de lui donner place immŽdiatement aprs Pierre de Gondy, duc de Retz [172], et avant le duc de la Rochefoucauld [173], dont les lettres, quoique plus anciennes de treize ans et prŽsentŽes au Parlement depuis le 2 septembre 1631, n'avaient pu encore tre vŽrifiŽes. On verra comment cette singulire situation donna lieu ˆ une action judiciaire, qui se termina d'abord, en 1647, par un compromis, puis, en 1714, par le triomphe de Louis de Saint-Simon [174].

Nous n'avons gure de renseignements sur le duchŽ de Saint-Simon [175] ; ni Claude ni son fils ne paraissent y avoir jamais habitŽ ou s'en tre occupŽs autrement que par l'intermŽdiaire de leur receveur et des officiers du bailliage ducal [176]. Les MŽmoires n'en disent qu'un mot [177], quoique notre auteur m”t au-dessus de tous les biens ce titre de duc et pair qui le plaait immŽdiatement aprs le Roi [178]. Lui mort, toutes les terres et le ch‰teau Ç trs-vieux et caduc È de Saint-Simon furent vendus par son hŽritire, la comtesse de Valentinois, aussit™t qu'on y eut fait l'inventaire du mobilier, et passrent, le 14 dŽcembre 1756, aux mains d'un conseiller au parlement de Metz, Nicolas-Franois le Scellier de Chezelles [179], pour revenir peu aprs, ˆ ce qu'il para”t, aux Saint-Simon Sandricourt.

Les MŽmoires, au contraire, parlent souvent d'une autre terre acquise par Claude de Saint-Simon quelques mois aprs l'Žrection de son duchŽ- pairie. Ce fut le 1er aožt 1635 qu'un arrt dŽfinitif du Parlement mit le duc en possession de la ch‰tellenie de Beaussart, de la ch‰tellenie de la FertŽ-Arnault ou la FertŽ-au-Vidame, et du vidamŽ de Chartres, saisis depuis vingt-deux ans ˆ la requte des crŽanciers de PrŽjan de la Fin de Maligny [180].

Quoique faite dans des conditions favorables, sans concurrence d'autres enchŽrisseurs sŽrieux, cette acquisition ne cožta pas moins de quatre cent mille livres ; mais, soit comme seigneurie territoriale, soit comme habitation d'automne, le favori de Louis XIII trouvait lˆ, ˆ une petite distance de Paris, de Versailles et de Saint-Germain, tout ce qui lui manquait dans ses domaines de Valois ou de Vermandois, tout ce que son ma”tre souhaitait pour lui [181].

Ç Ces deux terres (de Beaussart et de la FertŽ-Vidame), dit un document officiel du dix-huitime sicle [182], sont les plus considŽrables de la province, tant par le revenu, qui monte ˆ plus de quarante-cinq mille livres, que par la fŽodalitŽ sur plus de cent fiefs et seigneuries qui en relvent immŽdiatement, un gros ch‰teau, un parc de dix-huit cents arpents, haute, moyenne et basse justice dans l'Žtendue de vingt-trois paroisses, six mille arpents de bois, la plus grande partie en futaie, une ma”trise particulire des eaux et forts [183] ; et les deux ch‰tellenies sont dŽcorŽes de tous les droits attachŽs aux plus grandes terres du Royaume. È

Un rapport de l'annŽe 1617 [184] dŽcrit assez sommairement le ch‰teau principal : Ç La maison de la FertŽ-au-Vidame, dit-il, est antique, bonne, de grand revenu, seigneuriale, situŽe en pays de bois, environnŽe d'eaux, la basse-cour ˆ l'entrŽe, fossoyŽe de grands et larges fossŽs pleins d'eaux, bon rempart autour. La figure de la maison est presque ovale. Aux deux portes, deux antiques donjons, vožtŽs ˆ chaux et ˆ sable, et quantitŽ de tours qui flanquent le circuit de ladite maison. È Cette description se complte en certaines parties par le procs-verbal de l'adjudication de 1635, qui Žnumre : Ç Un corps d'h™tel, deux grands pavillons sous lesquels y a porte et pont-levis, l'un ˆ sortir du ch‰teau pour aller dans la basse-cour, et l'autre pour sortir par derrire dedans le parc et bois dudit lieu, avec six tours ˆ l'entour, l'une couverte d'ardoises, et les autres, avec ledit corps d'h™tel et autres Ždifices, couverts de tuiles ; cour pavŽe au milieu ; clos de murailles ; fossŽs ˆ eau vive ; la basse-cour, o y a un pavillon joignant la porte et pont-levis de ladite basse-cour, sortant dedans le bourg de la FertŽ-Arnault, composŽe de plusieurs logis, comme une grande maison manable, granges, Žcuries ˆ cheval, couvert tant de tuiles que de bardeaux ; une grande cour au milieu ; un grand jardin joignant le tout, aussi clos de fossŽs ˆ eau vive, avec l'Žtang dudit lieu, joignant tant ledit ch‰teau que basse-cour et jardin ; et ˆ l'autre c™tŽ, vers le parc et bois, sont plusieurs autres grands jardins enclos de grands canaux et fossŽs ˆ eau vive, et plusieurs viviers et rŽservoirs ˆ poisson, et plusieurs prŽs es environs desdits canaux ; le plant de plusieurs arbres fruitiers joignant lesdits prŽs ; un grand parc de haut bois, entre ledit ch‰teau et les taillis de ladite FertŽ ; la garenne dudit lieu Žtant de l'autre c™tŽ dudit ch‰teau.... È

A dŽfaut de perspectives gravŽes qui compltent ces descriptions, le Cabinet des estampes de la Bibliothque nationale possde une vue coloriŽe du ch‰teau de la FertŽ-Vidame, faite entre le dix-septime et le dix-huitime sicle, c'est-ˆ-dire au temps o il passa aux mains de notre auteur et devint sa rŽsidence favorite. Il est intŽressant de la comparer avec l'eau-forte de M. Mollard qui figure en tte du livre de M. Armand Baschet sur les Manuscrits de Saint-Simon, et qui, dit-on, est la reproduction d'un dessin du dix-huitime sicle.

Le titre de vidame de Chartres Žtait attachŽ ˆ la terre de la FertŽ- Arnault, et l'on a vu, dans les notes de ce premier volume [185], la signification originelle de cette qualification nobiliaire. Le fief du VidamŽ avait son sige ˆ Chartres mme, dans la grande rue, entre la porte Guillaume et celle des Essarts, sur les paroisses Saint-AndrŽ et Sainte-Foi mais, comme ce sige se trouvait enclos depuis un certain temps dans le jardin Žpiscopal, Claude de Saint-Simon s'engagea, pour lui et ses deux premiers successeurs, ˆ ne pas en rŽclamer la possession [186], tout en continuant de percevoir les cens, rentes et redevances fŽodales qui en dŽpendaient dans la ville. Le plus beau de tous les droits attachŽs au vidamŽ Žtait d'ailleurs ce titre sonore de vidame de Chartres, qui rappelait si bien les temps fŽodaux, et que rŽcemment encore des personnages cŽlbres avaient illustrŽ [187] : il fut dŽsormais rŽservŽ ˆ l'hŽritier prŽsomptif du duchŽ de Saint-Simon [188]. L'auteur des MŽmoires devait plus tard y faire ajouter un titre de comte de la FertŽ-Vidame [189].

On sait quelle a ŽtŽ la destinŽe de ce magnifique domaine aprs la mort de Louis de Saint-Simon. Le parc, avec ses Žtangs et ses avenues majestueuses, et la fort, de prs de quatre mille hectares, portent encore le tŽmoignage des splendeurs passŽes dont notre duc faisait montre si volontiers [190] ; mais c'est ˆ peine s'il reste quelques pierres du manoir o furent Žcrits les MŽmoires, aussi bien que de l'opulent ch‰teau b‰ti sous Louis XV par le financier Jean-Joseph de Laborde.

Disgr‰ce

Claude de Saint-Simon Žtait au comble de la faveur et de la fortune. Tout-puissant sur l'esprit de son ma”tre, acceptŽ et mme flattŽ par le premier ministre [191], courtisŽ par tout ce qui approchait le Roi, bien vu des femmes les plus ŽlŽgantes, qui apprŽciaient en lui, sinon la beautŽ des traits, du moins la jeunesse et la galanterie [192], il n'Žtait point de fte, de chasse ou de ballet, aussi bien que d' Ç expŽdition de guerre È et de dŽlibŽration importante, ou la premire place ne fžt pour lui et les siens [193]. En un mot, aprs avoir rŽsistŽ, pendant prs de dix ans, aux compŽtitions, aux rancunes, aux jalousies, la faveur du premier Žcuyer Žtait comme affermie ˆ jamais. Richelieu lui-mme semblait n'en prendre aucun ombrage et n'Žprouver que de la gratitude pour les services qu'il avait reus du favori, ou plut™t pour la rŽserve inoffensive dans laquelle celui-ci paraissait se complaire. Quoique le caractre du premier Žcuyer, et surtout son aviditŽ, dussent lui tre particulirement dŽsagrŽables [194], il se montrait en toute occasion prŽvenant, serviable mme, comme par le passŽ, prodigue de fŽlicitations, quand la Gazette annonait quelque haut fait nouveau, et prodigue aussi d'assurances d'un bon vouloir inŽbranlable [195]. Telle Žtait mme sa confiance qu'il recourut ˆ lui, ainsi qu'au duc d'Halluyn, pour faire aimer Mlle de la Fayette, puis pour pousser cette nouvelle favorite ˆ entrer en religion, lorsqu'elle menaa de devenir redoutable [196].

Ainsi, en 1636, le crŽdit de Saint-Simon Žtait intact. Au commencement de juillet, nous le trouvons ˆ Fontainebleau, o le Roi venait de rentrer ; il assista, avec la Reine et les dames, ˆ la prise de deux cerfs destinŽs au roi d'Angleterre. Mais ces divertissements furent bient™t interrompus par l'invasion de la Picardie.

On a vu, soit dans les MŽmoires, soit dans notre commentaire [197], quel r™le important le premier Žcuyer tint ˆ ce moment dans les conseils, et comment Richelieu le proposa pour aller inspecter la ligne de l'Oise et les passages dŽjˆ mis en Žtat de dŽfense par son frre le marquis. C'est lˆ que se place un Žpisode racontŽ par Tallemant des RŽaux [198], dans l'historiette du cardinal de Richelieu, et cet Žpisode est peu ˆ l'honneur du nom de Saint-Simon. Le Roi se trouvait ˆ Senlis ou ˆ Chantilly : on avait rompu tous les ponts de l'Oise, et les seigneurs qui possŽdaient des terres sur l'autre rive, tels que MM. de Montataire, de Liancourt, d'Humires, s'Žtaient fait donner par Piccolomini, avec l'assentiment du marŽchal de la Force, commandant d'une des armŽes royales, des sauvegardes gr‰ce auxquelles leurs ch‰teaux ne souffraient point du fait de l'ennemi ou des maraudeurs. Saint-Simon l'a”nŽ, Ç pour faire le bon valet, È dŽnona Montataire, et fit croire au Roi que la prŽsence de sauvegardes ennemies sur l'autre bord de la rivire compromettait la sžretŽ de sa personne [199]. Si l'on s'en rapporte ˆ Tallemant, Louis XIII n'Žtait pas aussi rassurŽ que le dŽpeignent les MŽmoires, et il avait dŽjˆ fait dŽmeubler Chantilly. Les insinuations de Charles de Saint-Simon eurent donc une prise facile, et ce ne fut qu'ˆ force de dŽtours habiles et en faisant manger au prince de bonnes poires du verger de Montataire, que les amis de celui-ci purent lui Žviter une disgr‰ce, peut-tre mme pis. De pareils procŽdŽs n'Žtaient point faits pour gagner l'indulgence des courtisans.

Ce fut sur ces entrefaites que l'affaire du C‰telet et l'intervention dŽplacŽe de Saint-Simon en faveur de son oncle fournirent au Cardinal l'occasion attendue depuis plus d'un an. Un mŽmoire de Richelieu [200] fait conna”tre les deux griefs qu'il mit en avant : le souvenir des relations du duc avec le rebelle Montmorency, et surtout ses manÏuvres pour faire Žchapper le baron de Saint-LŽger au ch‰timent que mŽritait la reddition Ç inf‰me È du C‰telet. Ç Au commencement du sige, Monsieur le Premier disoit ouvertement qu'il Žtoit assurŽ que son oncle ne feroit point de capitulation, et que, s'il en faisoit, il seroit le premier ˆ le condamner. Aussit™t que cette place fut rendue misŽrablement, il changea de langage et entreprit de dire que son oncle avoit fait le devoir d'un homme de bien. Cela f‰cha le Roi. Depuis, S. M. ayant tenu conseil ˆ Chaillot, auquel il prit la rŽsolution de faire arrter le sieur de Saint-LŽger, Monsieur le Premier, qui Žtoit ˆ Chaillot, l'ayant dŽcouvert [201], Žcrivit de Chaillot mme et dŽpcha un courrier ˆ son frre, pour avertir son oncle de se sauver, qui rŽussit si bien, qu'il reut l'avis deux heures devant celui qui Žtoit allŽ pour le prendre, arrivant ˆ Ham. Cet article Žtant vŽrifiŽ par information des ma”tres de poste et postillons qui menrent ledit courrier de M. de Saint-Simon, et des h™teliers qui le logrent, S. M. vouloit juger cet incident avec le procs du sieur de Saint-LŽger, qui fut condamnŽ ˆ tre tirŽ ˆ quatre chevaux. Le cardinal de Richelieu reprŽsenta ˆ S. M. qu'il valoit mieux ne le faire pas, parce que la peine qui tomberoit sur Monsieur le Premier seroit trop rude. Depuis, ledit sieur le Premier tŽmoignant toujours un grand mŽcontentement et dŽgožt de cette action, le Roi, par bontŽ, lui conseilla de s'en aller ˆ l'armŽe. Aprs y avoir ŽtŽ huit jours, Žtant revenu trouver le Roi ˆ Senlis [202], il lui demanda congŽ, sur les bruits qui couroient que les Espagnols vouloient entrer en la frontire de Guyenne, d'aller ˆ Blaye. Y Žtant allŽ, S. M., considŽrant son mŽcontentement et le peu d'affection qu'il avoit au bien de ses affaires, auxquelles il avoit prŽfŽrŽ l'intŽrt d'un homme qui avoit fait une action inexcusable, lui a mandŽ qu'il demeur‰t lˆ, et a fait conno”tre ˆ ses parents [203] qu'il desiroit qu'ils demeurassent chez eux, sans venir ˆ la cour [204] È.

Les MŽmoires accusent Chavigny, qui Žtait alors secrŽtaire d'ƒtat au dŽpartement des affaires Žtrangres, et non ˆ la guerre, d'avoir ŽtŽ la cause de la capitulation du baron de Saint-LŽger, et, par consŽquent, des disgr‰ces qui s'ensuivirent. Outre l'erreur de dŽpartement, qui ne permet pas de mettre au compte de Chavigny l'approvisionnement dŽfectueux du C‰telet, il est difficile de concilier les assertions de notre auteur, assertions absolument dŽnuŽes de preuves et mme de vraisemblance, avec deux lettres de ce mme Chavigny, que le Vassor a reproduites in extenso [205], lettres confidentielles, Ç moitiŽ en chiffres, moitiŽ en jargon È, et adressŽes au cardinal de la Valette, ami dŽvouŽ du premier ministre. Il en ressort simplement que Saint-Simon avait manÏuvrŽ contre Chavigny, pour Ç l'exclure et s'introduire lui-mme È ; que le secrŽtaire d'ƒtat Ç s'Žtait bien gardŽ de le dŽfendre È, et que Richelieu comptait ne plus laisser prendre ˆ personne la place laissŽe vacante par l'exilŽ. Ç Mgr le Cardinal, disait Chavigny, m'ordonne de ne m'Žloigner gure de Sa MajestŽ. La bonne humeur o nous le voyons maintenant prouve que M. de Saint-Simon n'agissoit plus bien. Il a reu ordre de demeurer dans son gouvernement. Quand je vous conterai le dŽtail de tout ceci, vous en serez surpris. Le Roi ne jette les yeux sur personne ; apparemment il ne prendra plus de favori. Il aime toujours Mlle de la Fayette, qui ne fait ni bien ni mal ; cependant il parle souvent ˆ Mlle d'Hautefort. È

Ces deux lettres prouvent sans doute que Chavigny seconda le Cardinal dans une entreprise bien facile en vŽritŽ ; mais de lˆ ˆ accuser le secrŽtaire d'ƒtat et le Cardinal d'avoir sciemment dŽlaissŽ le C‰telet et livrŽ son gouverneur ˆ l'ennemi, il y a fort loin, et, quoique le Vassor abonde dans le mme sens que les MŽmoires, en s'apitoyant sur le baron de Saint-LŽger Ç sacrifiŽ ˆ la rŽputation du Cardinal È, et sur son neveu exilŽ parce qu'il insinuait ˆ Louis XIII Ç que la nonchalance de Richelieu et de ses confidents Žtoit la cause principale du progrs des Espagnols dans la Picardie È, nous ne considŽrons la disgr‰ce de 1636 que comme un de ces jeux de bascule si ordinaires dans l'histoire des favoris : Saint-Simon, quoique peu redoutable pour le prŽsent, Žtait guettŽ depuis longtemps par le Cardinal ; tout confiant dans ce crŽdit qui lui avait si souvent permis d'intervenir en faveur des ennemis du premier ministre, il se hasarda ˆ soutenir un oncle dont la conduite Žtait authentiquement condamnable ; c'en fut assez pour que la coupe dŽbord‰t.

Le premier Žcuyer crut Žviter, ou du moins dissimuler la disgr‰ce devenue inŽvitable, en prenant les devants et s'Žloignant pour un temps ; mais la cour ne s'y trompa point, et, pour tout le monde, ce fut un exil [206]. Seuls, les MŽmoires persistent ˆ parler d'une retraite volontaire [207].

Au bout de quelques semaines, Saint-Simon, feignant de tout ignorer, Žcrivit au Cardinal pour lui demander pardon de Ç certains dŽfauts de colre et de dŽpit È, disant que les Bautru l'avaient peut-tre Ç ruinŽ È dans l'esprit du Roi, mais qu'il se sentait la conscience Ç trs-nette È, et se montrerait dŽsormais un Ç autre homme È. Le Cardinal ne se laissa prendre ni ˆ ces protestations, ni aux offres de communications qui y Žtaient jointes ; il rŽpondit (23 octobre) que le Roi avait ŽtŽ obligŽ de le sacrifier pour sa conduite dans l'affaire du baron de Saint-LŽger, Ç affectionnant son ƒtat plus qu'autre chose È ; que cette conduite Žtait due sans doute ˆ de mauvais conseils, mais qu'il fallait se rŽsigner ˆ en porter la peine, et veiller surtout ˆ ce que Ç ses dŽportements n'empirassent point ses affaires [208] È.

La Ç cabale È du premier Žcuyer, ses parents et amis, ayant en tte Mlle d'Esches, alors fille d'honneur de la Reine, plus tard Mme de Villarceaux, essayrent d'agir, ou de faire agir Mlle de la Fayette en faveur de l'exilŽ [209] ; mais c'Žtait, ˆ ce qu'il semble, un parti pris, chez Richelieu et dans son entourage, de perdre ˆ jamais l'ancien favori, Stercoral, comme l'appelait dŽdaigneusement ce Chavigny en qui il mettait alors tout son espoir, et qui n'avait dŽjˆ d'autre souci que de l'envoyer bien loin de la cour. On ežt mme voulu, pour plus de sžretŽ, le dŽpouiller de sa charge de premier Žcuyer, et elle fut, dit-on, offerte ˆ Cinq-Mars, comme Žtant d'ordinaire le premier lot des favoris du Roi ; mais il rŽpondit que c'Žtait lˆ une charge bonne pour d'anciens pages tels que Baradat et Saint-Simon, trop heureux de quitter les couleurs [210], et non pour un fils de marŽchal de France [211].

L'exil dura longtemps, et Saint-Simon l'observa si scrupuleusement qu'il fallut que le Cardinal lui-mme, par compassion, de son propre mouvement, lui envoy‰t, le 1er janvier 1637, une autorisation de franchir quelquefois l'enceinte de Blaye pour se divertir ˆ la chasse. Sentant donc que son temps de faveur Žtait bien fini, Claude affecta de se tourner vers les choses de la guerre. Sans avoir des talents de grand capitaine, il s'Žtait toujours montrŽ brave, actif, entreprenant, quand il avait accompagnŽ son ma”tre sous les murs de la Rochelle, au Pas-de-Suse, ˆ ChambŽry, ou commandŽ la cavalerie dans les campagnes de Lorraine. Titulaire d'une compagnie de cent hommes d'armes des ordonnances, il avait aussi possŽdŽ pendant un an, de 1635 ˆ 1636, un rŽgiment de cavalerie ; lorsqu'on rŽorganisa l'armŽe, au commencement de 1638, pour opŽrer en Catalogne sous les ordres de son cousin le prince de CondŽ, il obtint ˆ la fois une nouvelle charge de mestre de camp [212] et le commandement de la cavalerie lŽgre de l'armŽe de Guyenne [213].

Dans la premire campagne du prince de CondŽ, Claude de Saint- Simon prit une part brillante au combat du Pas-de-BŽhobie, fit sur le territoire espagnol une incursion hardie, dont la Gazette, toujours louangeuse pour l'ancien favori, donna un rŽcit dŽtaillŽ, et enfin, plus favorisŽ que le chef de l'armŽe, il se trouva au nombre des gŽnŽraux qui purent Žchapper ˆ la triste dŽroute de Fontarabie et rentrer ˆ Bayonne en rompant derrire eux le pont de la Bidassoa [214].

AppelŽ encore l'annŽe suivante au mme commandement, puis retenu ˆ Blaye par un contre-ordre subit, il vola cependant au secours de son cousin lorsque celui-ci, surpris sous les murs de Salces par un retour offensif des Espagnols, appela ˆ lui la noblesse volontaire. Saint-Simon combattit vaillamment dans la dŽsastreuse journŽe du 2 novembre [215] ; mais il ne put empcher que l'armŽe ne fžt battue et dispersŽe comme l'annŽe prŽcŽdente.

Trois ans se passrent ensuite sans que Saint-Simon quitt‰t Blaye, dŽsolŽ, Žcrivait-il au Cardinal, d'tre enterrŽ tout vif dans ce tombeau et de ne plus faire service ˆ son ma”tre.

Ses lettres de cette Žpoque sont, comme toujours, pleines de protestations chaleureuses, soit qu'il s'agisse de la santŽ de Richelieu, des affaires politiques, des intrigues de la cour, ou des desseins inquiŽtants de l'Espagne contre Blaye et la Garonne ; et d'autre part, le Roi manifeste souvent sa gratitude pour les mesures de prŽcaution que le duc s'est empressŽ de prendre. Mais, si celui-ci demande une permission de venir ˆ Paris, serait-ce pour recevoir la bŽnŽdiction suprme de son pre, qui est malade, moribond, ou pour fŽliciter le Cardinal de son retour ˆ la santŽ, tout congŽ lui est impitoyablement refusŽ [216].

Richelieu mort, il semblait impossible que ces rigueurs continuassent, et Saint-Simon sollicita son rappel sans retard : peut-tre comptait-il sur la bonne volontŽ du ministre Chavigny, qu'il avait souvent employŽ comme intermŽdiaire, sans grand succs il est vrai, mais ˆ qui il Žcrivait que sa consolation Žtait grande de penser que la meilleure part du gouvernement allait passer aux mains de l'homme le mieux instruit de la pensŽe du feu cardinal. Cette nouvelle supplique eut le mme sort que les prŽcŽdentes. Une lettre royale du 29 dŽcembre fit entendre au duc que Ç certaines considŽrations È ne permettaient pas encore qu'il reparžt ˆ la cour avant quelque temps. Ç Cependant, disait Louis XIII, assurez-vous que je vous sais beaucoup de grŽ de la faon dont vous vous tes comportŽ dans les occasions qui ont regardŽ mon service, et que vous recevrez des marques de ma bonne volontŽ qui vous feront connoitre que je sais estimer la fidŽlitŽ et l'affection de ceux qui en ont pour ma personne et pour le bien de mon ƒtat [217] È. Ce ne fut donc pas, comme le disent les MŽmoires [218], Ç lors de la dernire extrŽmitŽ du cardinal de Richelieu È que l'ancien favori fut rappelŽ par un courrier de son ma”tre ; il ne revint ˆ Paris que dans le commencement du mois de fŽvrier, en mme temps que les autres exilŽs ou disgraciŽs, Baradat, Bassompierre, d'EstrŽes, la duchesse douairire de Guise [219], et mme l'accueil ne fut pas ce qu'il avait espŽrŽ, ce que disent encore les MŽmoires. Henri Arnauld Žcrit, le 18 fŽvrier 1643, au prŽsident Barrillon : Ç M. de Saint- Simon vit hier le Roi ˆ Versailles ; cela se passa assez froidement [220] È.

Un fait reste incertain pour nous dans les ŽvŽnements qui suivirent la mort de Louis XIII et achevrent de rompre les derniers liens de Saint- Simon avec la cour [221]. Se peut-il que Chavigny, qui venait de rendre de rŽels services au duc de Saint-Simon [222], ait trahi les dernires volontŽs du Roi jusqu'ˆ dŽtourner au profit du comte d'Harcourt cette charge de premier Žcuyer dont Louis XIII aurait entendu faire don ˆ son ancien page ? Ne doit-on pas croire plut™t que le royal moribond, trs-imparfaitement revenu aux affections du temps passŽ, hŽsita ˆ fixer l'attribution d'une charge importante, et finalement, dans cette distribution o les plus petits de ses serviteurs ne furent point nŽgligŽs [223], oublia le nom du favori qui avait ŽtŽ tout-puissant durant dix annŽes, et qui n'avait pas cessŽ, mme pendant la disgr‰ce et du fond de l'exil, d'entretenir des relations familires avec le ma”tre ? La froideur que les courtisans venaient de constater au retour de Saint-Simon, l'inconsistance mme des bruits qui coururent dans le courant du mois d'avril [224], nous feraient pencher volontiers vers cette seconde hypothse, c'est-ˆ-dire absoudre tout au moins Chavigny du fait matŽriel dont les MŽmoires l'accusent avec tant d'amertume et de violence. Si l'on admet, au contraire, que Claude de Saint-Simon ait eu rŽellement un pareil grief contre le ministre et l'ait trouvŽ Ç trop vil È, en 1643, pour l'appeler sur le terrain, comment concilier cette indignation, ce mŽpris, avec le ton des lettres qu'il Žcrira ˆ Chavigny trois ou quatre ans plus tard, et qui tŽmoignent d'une familiaritŽ, d'une confiance chaque jour croissante ? Ce que ne peut suspecter le critique le plus difficile, c'est la sincŽritŽ des sentiments de vŽnŽration que le pre et le fils professrent l'un aprs l'autre pour Louis XIII, et dont on aime ˆ trouver l'expression souvent rŽpŽtŽe dans les MŽmoires [225]. Cette pieuse exactitude ˆ assister chaque annŽe ˆ la messe anniversaire du 14 mai, quand, depuis longtemps, tout le reste de la cour en avait oubliŽ la date [226], passa aussi du pre au fils, et l'on nous permettra de placer ici, bien en dehors de l'ordre chronologique, une pice qui montre quel Žtait encore, quatre-vingt-dix ans aprs la mort de Louis XIII, le dŽsir de Louis de Saint-Simon de rehausser la pompe du service cŽlŽbrŽ par les religieux de Saint-Denis. C'est dans les dossiers d'un archiviste de la maison du roi Louis XV [227] que nous avons rencontrŽ une note ainsi conue :

Ç Au mois d'avril 1733, M. le duc de Saint-Simon ayant souhaitŽ que l'Žvque de Noyon [228] offici‰t au service qui doit tre fait le mois prochain pour l'anniversaire du roi Louis XIII, sans autre cŽrŽmonial que celui qui est ordinairement observŽ ˆ ce service depuis la mort de Louis XIV, c'est-ˆ-dire qu'il ne s'agiroit d'autre chose, de la part de l'Žvque de Noyon, que de dire ce jour-lˆ la grand'messe au lieu des religieux de semaine, les religieux de Saint-Denis, auxquels il en a Žcrit et fait parler, lui ont rŽpondu le 17 avril que, si l'Žvque de Noyon vouloit officier chez eux une des grandes ftes solennelles, il leur feroit un trs-grand plaisir ; mais qu'ˆ l'Žgard du service de Louis XIII, que l'on Žtoit obligŽ d'avancer de huit jours ˆ cause de l'Ascension et des Rogations, et de le faire le jeudi 7 de mai, qu'il n'est point d'usage ˆ Saint-Denis qu'un Žvque officie un jour ouvrier, ˆ moins que quelque cŽrŽmonie extraordinaire ne l'exige ; que, pour faire ˆ Saint-Denis un service solennel extraordinaire, il faut l'ordre, ou du moins la permission du Roi ; que, Mme la duchesse d'Aiguillon ayant souhaitŽ que l'on fit un service solennel pendant le dŽp™t de Louis XIII, on ne l'accorda qu'aprs que la Reine eut donnŽ son agrŽment ; et une personne Žtant venue, aprs la mort de M. le duc d'OrlŽans, rŽgent, parler d'une fondation que quelqu'un vouloit faire pour lui, il lui fut rŽpondu qu'on ne pouvoit y entendre sans ordre ou permission de Sa MajestŽ, ce que l'on a toujours observŽ ; que si M. l'Žvque de Noyon desiroit officier le jour de l'anniversaire de Louis XIV, ils sont persuadŽs que M. le cardinal de Rohan le nommeroit avec plaisir. È

Nous n'aurons garde, en revanche, d'oublier un Žpisode des premiers temps du nouveau rgne qui n'a pas trouvŽ place dans les MŽmoires, et qui y ežt fait un Žtrange contraste avec les traits de gŽnŽrositŽ et de dŽsintŽressement citŽs au compte du premier Žcuyer.

Parmi les anciens ministres que l'annŽe 1643 avait vus rentrer ˆ la cour, se trouvait le surintendant des finances la Vieuville, disgraciŽ en 1624, exilŽ mme plus tard, et privŽ de ses biens pendant douze ans comme criminel de lse-majestŽ. Saint-Simon, arrivŽ ˆ l'apogŽe de sa faveur lors du procs du surintendant, s'Žtait fait donner, ds le mois d'octobre 1631, la confiscation totale des terres de l'accusŽ, avant mme que celui-ci fžt condamnŽ par contumace (janvier 1632) ; puis, pour mieux assurer son droit, il avait pris de nouvelles lettres de don (juillet 1632), en les faisant prudemment restreindre ˆ trois terres principales, Arzillires, Verigny et Fresne-Verigny. Depuis lors, et malgrŽ les crŽanciers ou les ayants droit du surintendant, il s'Žtait maintenu en possession, et ses procŽdŽs avaient fait un fort mauvais contraste avec ceux du marŽchal d'EstrŽes, qui, lui, n'avait demandŽ la confiscation de trois autres terres que pour en envoyer le brevet ˆ M. de la Vieuville et les lui conserver intactes [229]. Richelieu mort, Mme de la Vieuville avait repris plus Žnergiquement ses revendications, notamment ˆ propos de bois coupŽs par le premier Žcuyer dans une des terres citŽes plus haut, et qu'elle prŽtendait tre son bien propre [230]. Quand la disparition de Louis XIII lui-mme eut permis ˆ M. de la Vieuville de revenir ˆ la cour et de poursuivre en personne sa rŽhabilitation, qui fut solennellement prononcŽe le 11 juillet 1643, l'ancien surintendant rŽclama non-seulement le fonds des biens attribuŽs en 1632 au premier Žcuyer, mais aussi les fruits perus depuis cette Žpoque et le montant des dŽgradations que Saint-Simon avait fait subir aux propriŽtŽs, en dŽtenteur pressŽ de jouir. L'affaire fut portŽe au conseil de direction et y fit grand bruit : Monsieur le Prince [231] soutint son ami Saint-Simon, et manÏuvra pour que les revendications de M. de la Vieuville ne fussent pas renvoyŽes au Parlement ; mais Monsieur n'Žtait pas moins ardent pour la cause de son ancien serviteur et complice, et les sŽances du Conseil consacrŽes ˆ ce dŽbat furent aussi orageuses que nombreuses. Ce fut seulement le 17 mars 1644 que Monsieur le Prince parvint, comme il le dŽsirait, ˆ faire retenir par cette juridiction supŽrieure la question de restitution ; on ne renvoya au Parlement que celle du remboursement des dŽgradations et de l'acquittement des dettes. Nous ne savons pas quel fut le rŽsultat dŽfinitif ; il y eut sans doute quelque transaction, car M. de la Vieuville avait dŽjˆ consenti ˆ renoncer aux terres d'Arzillires et de Verigny, pourvu que le duc de Saint-Simon dŽsintŽress‰t ses crŽanciers ; mais, quelle que fžt l'issue du procs, l'effet moral ne put tre que trs-dŽfavorable pour l'ancien favori de Louis XIII en Žtalant une fois de plus son aviditŽ au grand jour, et en prouvant aussi que son crŽdit Žtait ŽpuisŽ ˆ jamais [232]. De mme, son frre a”nŽ fut condamnŽ, le 17 fŽvrier 1644, Ç ˆ rapporter le don qu'il avoit eu de quelques imp™ts en Champagne, sur la confiscation de M. le Coigneux, avec les intŽrts [233] È.

Quoique la cour, dans ces conditions, džt tre odieuse ˆ notre duc, son service l'y retint jusqu'au mois d'aožt 1645 : mais il se dŽmit de la charge de grand louvetier ds la fin de 1643, puis cŽda ˆ M. de Maisons sa capitainerie de Saint-Germain et Versailles, et enfin vendit ˆ Beringhen la charge de premier Žcuyer [234], sans mme conserver la jouissance des grandes entrŽes, car Ç on ne les gardoit point alors en quittant la charge qui les donnoit [235] È. Ayant ainsi rompu avec le Palais-Royal, il se consacra tout entier aux CondŽs, vers qui des relations de parentŽ l'avaient entra”nŽ de tout temps, et dont il venait encore de se rapprocher en Žpousant la fille de sa propre belle-sÏur, Mlle de Portes, cousine germaine de la princesse douairire [236]. Quand Monsieur le Prince mourut, en 1646, sa veuve et ses enfants, le hŽros, le prince de Conti et Mme de Longueville, conservrent Ç les mmes liaisons È avec leur parent, et ce fut ainsi qu'il se trouva engagŽ dans leur parti lorsque vint la Fronde.

La Fronde : de CondŽ ˆ Mazarin 

De 1648 ˆ 1652, le r™le politique de Claude de Saint-Simon prit une vŽritable importance[236b] : comme Louis XIII l'avait prŽdit ˆ son favori, un jour vint o les ŽvŽnements de Guyenne firent du gouverneur de Blaye l'arbitre, en quelque faon, du sort de la royautŽ aux prises avec les princes et les parlements. Sa conduite fut douteuse, hŽsitante un instant. Tout dŽvouŽ au prince de CondŽ, il s'engagea d'abord dans la faction qui commenait la lutte contre Mazarin, et siŽgea parmi les opposants, ˆ cette fameuse sŽance du 15 janvier 1648 o le Parlement dŽlibŽra sur les Ždits bursaux enregistrŽs le13, en lit de justice [237]. Quelques jours plus tard, Olivier d'Ormesson le rencontrait chez Monsieur le Prince, louant fort la rŽsistance des ma”tres des requtes, qui Žtait le prŽlude de la Fronde [238]. Mais l'entente n'Žtait pas encore absolument rompue entre la cour et le gouverneur de Blaye : celui-ci, qui avait toujours ˆ rŽclamer quelque arriŽrŽ pour le service de sa place, consentit, moyennant de belles promesses du premier ministre, ˆ repartir pour la Guyenne, en se faisant, fort de Ç mettre le parlement et la ville de Bordeaux ˆ la raison, en cas qu'il ne se range‰t ˆ son devoir et abus‰t des bontŽs de Leurs MajestŽs [239] È. Il y passa l'ŽtŽ, renouvelant en toute occasion des demandes de crŽdit, entremlŽes de protestations de dŽvouement. Vers la fin de l'annŽe, revenu ˆ Paris, nous le voyons se mler de nouveau, sous la direction du prince de CondŽ et du duc d'OrlŽans, aux mouvements des cours souveraines. Le16 dŽcembre, il sige au Parlement, ˆ c™tŽ des ducs de Joyeuse, d'Elbeuf, de Montbazon et de Brissac [240] ; il prend part aux dŽlibŽrations orageuses qu'ont soulevŽes les prŽtendus manquements du gouvernement royal ˆ la dŽclaration pacifique du 12 octobre. Mais c'est surtout ˆ partir de l'annŽe 1649 que les correspondances font conna”tre d'une faon suivie quel fut son r™le, et sur quels points, dans quelle mesure, ses intentions ou ses actions peuvent avoir ŽtŽ diffŽrentes de ce que nous lisons dans les MŽmoires.

IndŽcis encore plus que prudent, le duc Žtait reparti pour Blaye, et, tout en entretenant avec Chavigny un commerce de lettres fort actif [241], il y demeura jusqu'ˆ ce que la pacification de Paris lui perm”t de revenir ˆ la cour, chercher soit une rŽcompense de sa sage conduite, soit une occasion de faire valoir l'importance de son poste. Quand il se rendit ˆ Compigne, dans le courant du mois d'aožt, la lutte s'animait entre Mazarin, la vieille Fronde, CondŽ et les petits-ma”tres. Ce fut naturellement du c™tŽ de son cousin que Saint-Simon crut trouver l'avantage, et il prit le r™le d'intermŽdiaire obligeant entre Monsieur le Prince et Chavigny, mŽnageant pour celui-ci les fonctions de guide et de mentor politique auprs du jeune vainqueur de Rocroy et de Lens. Mais, au moment o il croyait le succs de son plan assurŽ, le Cardinal saisit une occasion futile, la connivence de CondŽ dans l'affaire ridicule du petit-ma”tre JarzŽ, et obtint de la RŽgente l'arrestation des Princes, le coup d'ƒtat du 18 janvier 1650. Saint-Simon avait ŽtŽ convoquŽ, avec les autres ducs, pour venir entendre au Parlement le manifeste royal qui s'expliquait sur l'emprisonnement de CondŽ, du prince de Conti et du duc de Longueville : il se trouva seul avec le duc de Luynes au banc des pairs [242]. Sa douleur, ses larmes mme [243], n'Žchapprent ˆ personne, au milieu du silence qui accueillit la dŽclaration, et, quand on apprit ˆ la cour qu'il avait quittŽ immŽdiatement Paris, l'opinion commune fut qu'il allait, comme les autres partisans et serviteurs des princes prisonniers, comme Bouillon, Turenne, la Rochefoucauld, prŽparer une revanche. Depuis la rŽbellion du parlement et du peuple de Bordeaux, Blaye Žtait devenu l'un des principaux centres des opŽrations de l'armŽe et du gouvernement royal : le duc d'ƒpernon, puis le marŽchal du Plessis-Praslin et le comte du Dognon, y avaient Žtabli une sorte de quartier gŽnŽral ; et c'Žtait prŽcisŽment cette mme place que convoitaient les Princes, car l'occupation d'un poste si avantageusement situŽ leur ežt donnŽ, en mme temps que Bordeaux, toute la partie du Royaume situŽe au sud de la Loire [244]. Or on savait de bonne source que Saint-Simon, malgrŽ son Žloignement momentanŽ, manÏuvrait sous main contre le duc d'ƒpernon ; on l'accusait de dŽtourner le parlement rebelle de la paix que la cour lui offrait, et de travailler pour le compte de Monsieur le Prince divers membres influents de la faction [245]. Tous les rapports s'accordrent ˆ annoncer qu'il venait aider le duc de Bouillon, et enlever au gouvernement royaliste la citadelle qui avait arrtŽ jusque-lˆ les progrs des Frondeurs[246] .

L'esprit irrŽsolu de Saint-Simon ne s'Žtait encore arrtŽ ˆ aucune dŽcision, lorsque se produisit le coup d'ƒtat du 18 janvier. C'est un chagrin des plus sincres, mlŽ de quelque inquiŽtude pour sa sžretŽ personnelle, qui le poussa ˆ quitter Paris et ˆ se diriger, non pas directement sur Blaye, mais vers quelque autre asile, la FertŽ sans doute, o il passa plusieurs semaines ˆ attendre et ˆ rŽflŽchir. Au bout d'un mois, il Žcrivit au Cardinal une lettre d'explications, ou plut™t d'excuses, sur son Ç prompt dŽpart È, lettre ˆ laquelle Mazarin rŽpondit le 28 fŽvrier [247], sur un ton ironique, sans para”tre se douter des menŽes dont Blaye Žtait l'objet, ni savoir ce dont il Žtait džment averti par d'ƒpernon, par le garde des sceaux Ch‰teauneuf et par d'autres amis, que le Parlement et la noblesse Žtaient allŽs faire leur cour au gouverneur de Blaye ds son arrivŽe, qu'il faisait des travaux aux fortifications, et que, s'il Žtait Ç homme ˆ entreprendre È, il pourrait devenir aussi redoutable que M. de Bouillon lui-mme.

En effet, les Princes nŽgociaient de ce c™tŽ : Lenet, la Rochefoucauld, l'Žvque d'Angoulme et le chevalier de Taudias s'employaient ˆ la fois auprs de Saint-Simon. Celui-ci prit-il alors un engagement formel de se dŽclarer pour eux ? La Rochefoucauld l'affirme. Lenet ne le dit pas aussi positivement, et exprime le regret Ç de ce que la duchesse..., toute-puissante sur son mari et trs-passionnŽe pour la maison de Monsieur le Prince, n'Žtoit pas ˆ Blaye avec lui...[248] È. En fait, Saint-Simon, considŽrant Ç que M. de Turenne Žtoit foible, que Saumur Žtoit rendu, que le Cardinal s'autorisoit ˆ Paris, que les Frondeurs Žtoient sincrement unis avec lui, que Bellegarde traitoit È, n'avait pas mme voulu donner sa parole de se trouver ˆ l'assemblŽe de la noblesse rebelle.

Mais, son frre a”nŽ, qui Žtait ˆ la cour, l'ayant averti des bruits qu'on y rŽpandait contre lui, Claude Žcrivit de Blaye, le 7 avril, au garde des sceaux Ch‰teauneuf, une lettre o il protestait de ses intentions bonnes et pures. Ç Nous ne sommes pas des gens fort dissimulŽs, disait-il ; nous aimons ˆ vivre avec honneur, par le chemin du gentilhomme... [249] È. Mazarin saisit l'occasion, et lui fit dŽfendre, au nom du Roi, s'il craignait tant de lui Ç dŽplaire et dŽsobŽir È, de recevoir la femme et le fils de CondŽ, dans le cas o, malgrŽ les ordres du souverain, ils quitteraient le Berry [250].

Ds lors, rappelŽ au devoir par cette sommation du fils de son bienfaiteur, peut-tre aussi, disons-le par la considŽration des succs de l'autoritŽ royale en Normandie et en Bourgogne, Saint-Simon n'hŽsite plus un seul instant. Il rŽpond ˆ Leurs MajestŽs sur le ton le plus dŽvouŽ ; il Žcrit en mme temps au secrŽtaire d'ƒtat le Tellier une lettre justificative [251], et, vers le 28 avril, il dŽpche ˆ Madame la Princesse un gentilhomme chargŽ de la prŽvenir qu'elle ait ˆ ne pas bouger de Montrond, surtout ˆ ne pas songer ˆ Blaye. Soit qu'elle fžt dŽjˆ en route, soit qu'elle voulžt feindre, ce qui est plus probable, de n'avoir point reu l'avertissement, la princesse lui envoya de Turenne le vieux Filzjean, serviteur tout dŽvouŽ ˆ la maison de CondŽ [252], pour annoncer sa marche. Le duc s'affermit encore dans sa rŽsistance : n'ayant pris aucun engagement par lui-mme ni par son frre, il menaa de charger les ducs, s'ils se prŽsentaient aux portes, mme d'arrter la princesse, pour peu que le Roi l'ordonn‰t, et il renvoya Filzjean, avec une lettre o il adjurait sa cousine de renier des conseillers perfides [253]. Prire d'abord, ironie ensuite, la princesse usa de tout pour le ramener ˆ elle. Mais rien ne pouvait plus avoir de prise sur Saint-Simon, Ç ni l'honneur de l'alliance si proche, ni le dŽpit amer contre la Reine [254] È.

DŽsespŽrant de l'entra”ner, on tenta du moins de le compromettre de telle faon qu'il ne lui rest‰t plus de salut en dehors des Princes ; la correspondance de Saint-Simon avec la cour en tŽmoigne presque ˆ chaque ligne [255]. Quand, par exemple, le 27 avril, on eut vu para”tre au Parlement la princesse douairire de CondŽ, escortŽe de l'a”nŽ des Saint-Simon, cette dŽmarche gŽnŽreuse du marquis fut exploitŽe contre le duc [256], qui pourtant ne devait plus dŽvier de son devoir. Les MŽmoires [257] racontent que l'Espagne essaya de se faire ouvrir par lui l'entrŽe du fleuve, qu'elle lui offrit d'abord la grandesse et beaucoup d'Žtablissements, puis qu'elle envoya un second messager, avec Ç des propositions encore plus fortes. È Voici ce que raconte le duc lui-mme, dans une lettre adressŽe le 10 mai au cardinal Mazarin : Ç Monseigneur, une occasion fort extraordinaire et assez importante m'oblige d'envoyer ce gentilhomme, qui rendra compte ˆ V. ƒ. d'une effronterie espagnole en laquelle elle conno”tra de nouveau et ma fermetŽ dans mon devoir au service de Leurs MajestŽs, et l'‰pretŽ des ennemis pour aider ˆ brouiller et rŽvolter cette province. Vous conno”trez, Monseigneur, par son rapport, qu'ils ne veulent Žpargner ni soins ni argent pour corrompre le monde ; je suis enragŽ contre eux qu'ils aient pu avoir cette pensŽe de moi, et je n'aurai jamais de consolation de ne m'tre pas trouvŽ en Žtat de rendre ˆ Leurs MajestŽs un trs-signalŽ service : le mauvais temps nous empcha tout hier de pouvoir agir sur la rivire.... Je suis au dŽsespoir d'avoir vu une occasion pareille sans pouvoir servir selon ma passion. Si j'avois cent ans de vie, jamais chose semblable ne m'arrivera.... Je supplie trs-humblement V. ƒ. de me vouloir excuser si ma lettre est longue : la matire m'emporte un peu, par la passion que j'ai au service de Leurs MajestŽs et ˆ tŽmoigner ˆ V. ƒ. que je suis, etc. [258]. È

Ces protestations n'Žtaient point inutiles, car, de toutes parts, des dŽnonciations anonymes arrivaient en cour, donnant ˆ supposer que l'Espagne avait fait faire des offres d'argent, et qu'elles eussent pu trouver un bon accueil ˆ Blaye [259]. En rŽalitŽ, l'un des rapports que nous venons d'indiquer Žtablit qu'un vaisseau espagnol, escortŽ de quatre brigantins et de quatre pinasses, sous pavillon flamand, avait paru inopinŽment en vue de Blaye. Ç M. de Saint-Simon fut ou dut tre surpris, et fit mine de (sic) le vouloir conno”tre ; mais il en fut Žclairci sur le soir par le marquis de Lusignan [260], qui partit d'ici (Bordeaux), sur l'avis de l'arrivŽe de ce vaisseau, le dimanche ˆ midi, aprs en avoir sollicitŽ ceux de sa cabale. ƒtant ˆ Blaye, il ne trouva pas M. de Saint-Simon disposŽ ˆ lui donner ce qu'il souhaitoit, qu'on dit tre une permission de mettre dans sa place une somme notable d'argent È. Cette somme Žtait destinŽe, non pas au gouverneur de Blaye, mais ˆ M. de Bouillon et aux rebelles de Bordeaux ; on fit courir le bruit que les brigantins, Žchappant ˆ la surveillance de la garnison royaliste, avaient pu dŽcharger l'argent, de nuit, ˆ la Roque-de-Tau [261], tandis que, justement inquiet, M. de Saint-Simon prŽvenait le Parlement et faisait suivre le vaisseau jusqu'ˆ sa sortie de la rivire.

Cette dŽmonstration de fidŽlitŽ lui valut les fureurs de la Fronde bordelaise, qui Ç dit tout dans ses ressentiments, et le fit passer pour un ennemi de tous c™tŽs et mal assurŽ de ce qu'il devait faire [262] È. Le marquis de Lusignan porta les faits ˆ la connaissance de la princesse de CondŽ, et se plaignit que la rŽsistance du gouverneur de Blaye ežt forcŽ le commandant du vaisseau espagnol de remporter ˆ Saint-SŽbastien les sept cent mille livres qu'il avait charge de faire passer ˆ Bordeaux [263]. Ce fut alors que la princesse, brusquant les choses, fit savoir qu'elle se mettait en route pour Bordeaux. Saint-Simon lui rŽpondit, le jour mme, qu'elle n'avait ˆ attendre de lui rien de contraire ˆ l'obŽissance et ˆ la fidŽlitŽ qu'il devait ˆ Leurs MajestŽs, et, le lendemain, il fit tenir ˆ la Reine la lettre de la princesse, en mme temps qu'il envoyait au cardinal Mazarin [264] une gŽnŽreuse protestation en faveur de ces parents mmes, Monsieur le Prince et sa femme, qui ne cherchaient qu'ˆ le compromettre.

Ces dispositions loyales Žtaient toujours interprŽtŽes avec dŽfiance des deux c™tŽs : si, d'une part, le marquis de Lusignan reprochait ˆ Blaye d'tre Ç plus Mazarin que le bois de Vincennes È, d'autre part, Comminges accusait M. de Saint-Simon d'avoir Ç un commerce perpŽtuel avec tous les ennemis de Leurs MajestŽs È, et M. d'ƒpernon, dans un billet [265] Žcrit au Cardinal le 24 mai, lui prtait de trs-singuliers discours aux jurats et aux habitants de sa ville. Les lettres du duc, accompagnant celle de sa cousine, produisirent un heureux effet, comme son frre, qui Žtait prŽsent ˆ l'arrivŽe du courrier, se h‰ta de le lui Žcrire, le 25 mai : Ç .... Vous avez fait trs-bien votre devoir. Cela aura possible quelques suites.... Ils ont cru vous embarrasser, et que vous garderiez cette lettre, et qu'Žtant telle qu'elle est, que vous ne l'oseriez montrer ; et que, ne le montrant pas, vous Žtiez engagŽ : et en effet, vous auriez ŽtŽ en peine. Mais ces gens-lˆ ne savent quels sont les gens de bien et qui ont l'‰me noble [266]... È

Le marquis ne parle gure de lui-mme dans cette correspondance ; on continuait cependant ˆ lui attribuer une certaine part dans les intrigues dont Madame la Princesse, ˆ dŽfaut de son mari, Žtait le centre ; on disait mme qu'il y avait entra”nŽ sa belle-sÏur et belle-fille la duchesse de Saint-Simon, qui n'avait pas suivi le duc en Guyenne. Un des agents les plus actifs et les plus dŽvouŽs du duc, un certain Ç Saint-Paul Giscard È, que nous croyons tre des Guiscard la Bourlie [267], et qui se trouvait alors en cour, lui signala en termes alarmants les consŽquences que pouvait avoir cet attachement trop public pour la cause des Princes [268]. Mais on jugea prudent de ne pas trahir la moindre inquiŽtude ˆ cet endroit, et, tandis qu'une lettre signŽe du jeune roi allait rassurer et remercier le gouverneur de Blaye, le premier ministre ajoutait lui-mme ˆ ces tŽmoignages de confiance deux lettres chaleureuses, Žcrites coup sur coup, le 25 et le 26 mai.

En retour, Saint-Simon offrit de s'entremettre auprs de Madame la Princesse, qui venait de s'introduire, avec son fils, dans Bordeaux (31 mai), Ç afin, disait-il [269], de la tirer de cet embarquement o elle est engagŽe par un pernicieux conseil..., puisque Votre ƒminence m'assure que la Reine l'aura bien agrŽable. Il n'est pas encore temps, ajoutait-il, que je paroisse : j'attendrai le retour populaire, dont je ne dŽsespre pas. L'on est maintenant en joie, et tout de chagrin contre moi ; mais nous pourrons trouver un temps favorable È. En mme temps, il intercŽdait pour ceux de son nom qui s'Žtaient compromis ˆ Paris : Ç J'aurois, disait-il, un fort grand dŽplaisir si mon frre et Mme de Saint-Simon avoient dŽplu ˆ Leurs MajestŽs en quelque chose. Cela ne sauroit arriver que par un fort grand malheur, leurs intentions Žtant certainement bien sincres et toutes bonnes. Je demande ˆ Votre ƒminence d'avoir agrŽable de prendre en mon frre toute confiance pour ce qui me regarde, et de le considŽrer comme un gentilhomme incapable de jamais manquer ˆ son premier devoir È.

La sincŽritŽ de ces protestations se trouva enfin confirmŽe par tous les rapports de ceux mmes qui avaient montrŽ le plus de dŽfiance : MM. d'ƒpernon et de Comminges reconnurent les premiers qu'il n'y avait plus lieu de souponner Saint-Simon ; que, s'il s'Žtait dŽclarŽ hautement le Ç trs-humble serviteur de Monsieur le Prince et de Madame la Princesse È, c'Žtait par pure courtoisie, et qu'il ne Ç ferait rien contre le service du Roi È ; que, bien au contraire, ses amis et ses agents n'avaient cessŽ de reprŽsenter aux Bordelais l'arrivŽe de la princesse comme une ŽventualitŽ menaante, qu'il fallait Žviter ˆ tout prix [270]. Aussi une nouvelle lettre du Roi partit-elle pour Blaye [271], annonant la prochaine arrivŽe en Guyenne de S. M., qui comptait sur le concours et la fidŽlitŽ du duc Claude, et l'on joignit ˆ cette dŽpche une commission pour former un rŽgiment d'infanterie de vingt compagnies et pour ajouter cinq compagnies de cavalerie au rŽgiment de Saint-Simon, qui devait servir dans l'armŽe du marŽchal de la Meilleraye, contre Bordeaux [272]. Peu aprs, on lui accorda pour son frre, le commandeur de Malte, la petite abbaye de Saint-Sauveur de Blaye ; plus tard encore, dans le courant du mois d'octobre, on augmenta de deux cents hommes la garnison de sa place [273]. Le duc se h‰ta de profiter de ces apparences de bonne volontŽ pour renouveler toutes les rŽclamations dont il avait si longtemps et si vainement assailli les ministres ; il demanda des rŽparations pour l'enceinte de Blaye, de l'artillerie et des munitions pour son arsenal, qui n'avait rien reu depuis deux ans, et de l'argent surtout. Ç Mon crŽdit, disait-il, est tout ŽpuisŽ, en sorte que je ne puis plus trouver d'argent pour faire subsister la garnison. J'ai avancŽ aussi, pour les rŽparations, des sommes bien grandes pour un homme comme moi. Depuis la RŽgence, je n'ai pas touchŽ une annŽe de mes pensions, et j'ai beaucoup perdu d'ailleurs [274]... È

On continua ˆ le payer en belles paroles et en promesses vagues pour un temps meilleur. Il est vrai que l'auteur d'un ouvrage curieux, quoique apocryphe, les MŽmoires de M. de Bordeaux, affirme que la cour acheva de s'assurer la place de Blaye en donnant au gouverneur une Ç bonne somme d'argent [275] È, comme elle le fit plus tard ˆ l'Žgard du gouverneur de l'Aunis et de Brouage [276] ; mais pas une des pices que nous avons pu consulter, ne renferme trace de transaction de ce genre ; et, d'autre part, il est prouvŽ que les sommes avancŽes par Saint-Simon ne lui furent remboursŽes ni en 1650, ni ˆ aucune autre Žpoque de sa vie [277].

Quand le Roi arriva ˆ Libourne, le 1er aožt, le duc s'y rendit, suivit la cour pendant tout son sŽjour dans la province, la reut ˆ Blaye, aprs la reddition de Bordeaux, et l'y rŽgala splendidement, le 15 octobre [278]. Lˆ encore, on lui renouvela les promesses de secours et de renforts pour faire face aux ŽventualitŽs qui pouvaient se produire du c™tŽ de l'Espagne. En attendant que ces promesses se rŽalisassent, il fit exŽcuter, ˆ ses propres frais, des travaux de dŽfense qui ne tardrent pas ˆ donner de l'ombrage et ˆ susciter plus d'une dŽnonciation de la part des anciens frondeurs de Bordeaux. Au commencement du mois de novembre, ils se plaignirent au Roi qu'il avait bouchŽ une passe de la rivire, soit pour faire quelques nouvelles exactions sur les navires qui passaient Ç ˆ l'ombre de son bastion È, soit mme pour fortifier sa retraite et s'en assurer la possession contre tous [279].

Cette Ç affaire È, comme on l'appela alors, finit mme par prendre tant d'importance aux yeux des Bordelais, qu'ils envoyrent des dŽputŽs en cour. Mais le duc s'empressa de faire donner des explications par son ami Saint-Paul. Ç Blaye, lui Žcrivait-il le 29 dŽcembre 1650,est menacŽ d'attaque et de sige. Le dessein en est formŽ et au dehors et au dedans. Il y a plus de trente vaisseaux de guerre dans les ports de la Biscaye, que le roi d'Espagne fait mettre en Žtat de faire voile, avec tous les prŽparatifs nŽcessaires pour entreprendre et attaquer.... Vous pouvez juger si, parmi tous ces avis, on est alerte (sic) ici, o les Espagnols peuvent venir en vingt-quatre heures, et ceux du dedans y peuvent fondre en mme temps. Chacun sait le mauvais Žtat de la place : la foiblesse de la garnison, notre nŽcessitŽ d'argent et de toutes choses, sont ces connoissances qui font former les desseins et les entreprises sur les places. Ils savent qu'avec Blaye ils pourront tout : l'on fait entendre au roi d'Espagne que, s'il en Žtoit ma”tre, il auroit de l'argent, et par le moyen de l'eau et par le moyen de la terre, suffisamment pour pousser et entretenir la guerre contre nous. Si ce malheur Žtoit arrivŽ, l'on pourroit dire adieu ˆ la province de Guyenne.... Vous savez que l'on m'avoit accordŽ le payement de la garnison, pour l'annŽe 48, sur les tailles de cette Žlection, que M. Jeannin avoit donnŽ la parole du consentement ; mais Messieurs de l'ƒpargne se sont ravisŽs : ils me disputent cette affaire, la troublent et la veulent absolument renverser. Mais j'espre que S. ƒ. ne le souffrira pas, et qu'elle voudra qu'une chose qui m'a ŽtŽ si solennellement promise soit tenue. Souvenez-vous combien l'on nous a fait valoir cette justice comme une gr‰ce bien extraordinaire. Je vous avoue que je suis presque au dŽsespoir de me voir traiter de la sorte [280]... È. On voit que les MŽmoires n'ont exagŽrŽ, sur ce point particulier, ni le dŽvouement absolu de notre duc [281], ni l'importance rŽelle du service qu'il rendit au jeune roi.

D'ailleurs, comme si ce n'Žtait pas assez que Claude de Saint-Simon fžt en proie aux soucis de la chose publique, ses plus proches eux-mmes faillirent encore le compromettre. Ç .... Je suis f‰chŽ, Žcrit le marquis au duc, et avec apprŽhension pour M. le commandeur [282], que M. d'OrlŽans a menacŽ de la Bastille pour avoir semŽ et donnŽ des billets sŽditieux pour se trouver ˆ la Grve, pour avoir excitŽ le bruit du Palais. Ce sont ses ennemis qui lui rendent ces mauvais offices. On lui impute toute sorte de discours qui ont ŽtŽ faits, qui sont horribles, et dont il n'est pas capable. Il est vrai que sa conduite est toujours extraordinaire. Toutes ces choses vous sont mandŽes ˆ cette fin que vous les sachiez, pour n'en parler qu'en temps et lieu, qui n'est pas encore. Ne m'en Žcrivez rien. Gardez, si vous voulez, ma lettre, qui vous en fera souvenir. Si vous avez fait mŽmoire des choses qui se sont passŽes, en temps et lieu vous vous en servirez... [283] È.

Ce commandeur de Saint-Simon Žtait en effet fort Ç extraordinaire È et trs-compromettant pour ses proches. Plusieurs fois, son frre Claude avait eu ˆ implorer pour lui l'indulgence de la cour, et c'est au lendemain du jour o il venait d'obtenir pour lui l'abbaye de Blaye d'une part, et d'autre part la commanderie du PiŽton, qu'il attirait sur sa tte les sŽvŽritŽs du prince ˆ qui Paris avait ŽtŽ confiŽ pendant le voyage de Guyenne. Loret nous apprend [284] qu'il se dŽroba au ch‰timent par une prompte retraite. MŽprisable personnage d'ailleurs [285], le commandeur joua le plus triste r™le dans cette seconde partie de la Fronde, si l'on s'en rapporte au tŽmoignage du cardinal de Retz [286]. La duchesse de Saint-Simon Žtait restŽe ˆ Paris, et nous avons vu qu'elle y avait pris part aux intrigues du parti des princes prisonniers, comme tant d'autres beautŽs de ce cercle de Chantilly dont l'historien de Mme de SŽvignŽ a dŽcrit l'aspect sŽduisant [287] ; ce fut ˆ Paris encore qu'elle accoucha, le 18 septembre, d'un fils, qui reut le nom rŽvŽrŽ de Louis et le titre de marquis de Portes [288]. MalgrŽ l'Žloignement de son mari, elle prolongea un sŽjour qui pouvait avoir quelque utilitŽ, puisqu'elle Žtait rentrŽe en faveur. De son c™tŽ, Charles de Saint-Simon ne cessait de conseiller, de renseigner son frre Claude ; ses lettres de l'annŽe 1651 sont pleines de dŽtails intŽressants, et le style en est parfois des plus ŽlevŽs, l'accent des plus gŽnŽreux.

Il Žcrit, vers le mois de mars [289] : Ç Nous voyons aller la foiblesse de la cour, laquelle est gŽnŽrale, car tout est dans la peur et dans l'aveuglement ; nul ne voit clair, ce qui nous dŽnote une perdition gŽnŽrale, et l'ƒtat en un grand et pŽrilleux hasard. Toutes choses manquent ; l'on y voit bien des remdes, mais personne ne se met en devoir de le[s] mettre en usage : de sorte, mon cher frre, qu'en cet Žtat o je vois toutes choses, il m'est bien difficile de vous donner ni conseil ni mesures, sinon celui que vous avez toujours mis en pratique, qui est d'avoir pour objet Dieu et le Roi, nettetŽ de conscience, et faire et suivre votre devoir. Voilˆ en gŽnŽral les guides.... Pour le dŽtail, vous devez Žcrire ˆ Monsieur le Prince sur le changement ; si c'est agrŽable ˆ votre respect, vous le continuerez. Vous devez aussi Žcrire ˆ la Reine, et lui mander comme je vous ai fait savoir quelque chose des intentions de S. M., que vous ferez, mais que S. M. sait votre Žtat, auquel vous la suppliez de pourvoir et vous donner ses volontŽs par Žcrit, que le possible sera fait. Du surplus, si l'on s'adresse ˆ vous pour traiter de Blaye, vous devez dire que tout ce qui est ˆ vous est en la disposition de S. M. ; mais qu'Žtant un dŽp™t qui vous est confiŽ, que vous ne pouvez pas qu'aprs la volontŽ de S. M. ; que quand le Roi le trouvera bon, que vous ne resterez ˆ ce qui sera de vous, ayant toujours passion, etc.

Ç Quand vous Žcrirez ˆ la Reine, vous lui manderez, si vous pla”t, comme vous croyez que j'ai assurŽ S. M. de votre fidŽlitŽ au service, et que vous attendez que l'on vous en donne les moyens, ainsi que S. M. vous a fait dire et que M. Servien a assurŽ : "Ne me pouvant adresser qu'ˆ Votre MajestŽ, voulant garder le secret de Votre MajestŽ, et voulant toujours servir le Roi, mon bienfaiteur, en la manire qui vous plaira me faire savoir ou commander", ce qui dŽpendra de vous sera employŽ avec grande joie en toutes rencontres. Vous manderez quelque chose des frontires. Voilˆ, ˆ mon sens, ce qui se peut dire.... È

Deux autres lettres, du 8 et du 9 mai suivant, Žcrites coup sur coup, exposent clairement quels dangers le ressentiment du prince de CondŽ, ou plut™t de ses amis, fit courir au gouverneur de Blaye. On voulait tout ˆ la fois le perdre ˆ jamais dans l'esprit de la RŽgente et lui enlever sa citadelle, sans laquelle le prince ne serait jamais ma”tre qu'ˆ moitiŽ du gouvernement de Guyenne. Par bonheur pour Saint-Simon, son frre et la marquise purent parer habilement les coups. Le marquis lui Žcrivait, le 8 mai [290] :

Ç.... Hier, aprs diner, votre belle- sÏur fut au Palais-Royal, sur ce que la Reine avoit dit que Monsieur le Prince avoit dit ˆ S. M. que vous lui aviez promis et donnŽ parole. Nous cržmes qu'il ne falloit pas laisser tra”ner ce bon office, quoique ce soit chose qui se dŽtruise d'elle-mme ; et voyant comme la Reine a fort agrŽable votre belle-sÏur, elle y fut. Elle la mena dans son oratoire. Lˆ.... elle lui dit : "Mais, Madame, l'on dit que Monsieur le Prince a dit ˆ V. M. que mon beau-frre avoit promis et donnŽ parole. Ñ Il est vrai qu'il me l'a dit". Elle repartit qu'elle Žtoit assurŽe que cela n'Žtoit pas, et qu'elle savoit que cela ne se seroit pas fait sans son su, et que d'ailleurs cela ne se pouvoit faire sans avoir Žcrit ou quelque traitŽ, ou du moins quelque billet en crŽance, mais que cela ne se trouvoit pas ; il ne se trouvoit pas mme un seul homme qui dise : "Il me l'a promis et me l'a dit". Ñ "Enfin, Madame, ils sont enragŽs contre lui de ce qu'il a servi le Roi, et voudroient fort le dŽtruire, s'ils pouvoient. Mais il est trs-fidle et reconnoissant. Je supplie Votre MajestŽ de le croire". La Reine lui dit qu'elle en Žtoit trs-satisfaite. Elle lui dit : "Mais, Madame, que Votre MajestŽ soit ˆ l'Žpreuve, si lui pla”t, des mauvais offices qui n'ont pour fondements que la fidŽlitŽ des services". La Reine lui promit fort, et qu'elle s'en souviendroit toujours, et que le Roi en tŽmoignera toujours reconnoissance. La sŽparation en fut fort agrŽable pour vous, avec assurance que vous seriez assistŽ. Il vous est trs-dangereux de mettre votre place ˆ prix, ainsi que je vous l'ai mandŽ. La Reine ne consentira jamais que vous vendiez votre gouvernement, et cela vous feroit tort ; d'autant plus que ce seroient des avances inutiles et sans effet, qui feroient dŽplaisir au Roi et ˆ son service.... È

Le jour suivant, 9 mai, Charles de Saint-Simon reprenait la plume et Žcrivait ˆ la h‰te :

Ç C'est enfin M. d'Argicourt qui portera cette lettre, lequel s'en va en Catalogne, o votre rŽgiment a ordre d'aller. L'on me fait espŽrer que votre compagnie demeurera auprs de vous ; j'y tiendrai la main. L'affaire du gouvernement est indŽcise encore. Il n'y avoit hier rien de fait, quoique chacun, et particulirement [291] [....] assurent qu'il ne se fera pas, et en allguent force raisons ; les autres en donnent beaucoup pour le contraire, lorsqu'il en est parlŽ. La principale clause que la Reine propose, c'est ˆ condition que l'on ne pensera jamais ˆ Blaye [292]. Hier, Žtant au Palais-Royal, S. M. m'appelle et me dit de vous assurer que vous seriez aidŽ et secouru de toutes les choses, ˆ quoi l'on pourvoiroit aussit™t que l'affaire seroit [faite] .... chose trs-importante au service du Roi, et que (sic) vous prioit de n'entendre ˆ aucune proposition. Le marquis, que j'ai vu, m'a dit que vous en devriez user ainsi, et qu'il n'y avoit plus que quatre mois jusqu'ˆ la majoritŽ. M. de Brienne m'en a dit de mme. Il est vrai que tout le monde revient ˆ la royautŽ, et que tout le monde proteste tout haut de ne prendre jamais les armes contre le Roi ; en vous disant M. de Bouillon et M. de Turenne, c'est tout dire. L'on m'a dit et assurŽ qu'ils l'ont mme dit ˆ Monsieur le Prince... È.

Nous n'avons pas ici ˆ nous occuper de la nouvelle guerre civile qui Žclata deux mois plus tard, car Claude de Saint-Simon n'y prit aucune part, persistant dans cette attitude loyale et fidle qui lui avait valu tant d'animositŽ de la part des Frondeurs, si peu de gratitude effective de la cour [293]. Comme il ne pouvait quitter son gouvernement, la duchesse, rentrŽe dans les bonnes gr‰ces d'Anne d'Autriche, s'employa activement pour lui faire envoyer par les ministres quelques sommes d'argent, et, afin de mieux profiter des circonstances, elle suivit le jeune roi et sa mre dans le voyage qu'ils firent, aussit™t la majoritŽ dŽclarŽe, en Berry, puis ˆ Poitiers [294]. Mais, tandis qu'elle y prolongeait son sŽjour, un deuil cruel vint frapper les deux Žpoux. Leur fils unique, ‰gŽ d'un peu plus d'un an, mourut ˆ Paris dans les premiers jours du mois de dŽcembre [295]. Si profonde que fžt la douleur de la duchesse [296], elle dut rester ˆ son poste auprs de la RŽgente, et ne rejoignit que plus tard son mari ˆ Blaye [297]. La situation de cette place et de son gouverneur Žtait critique : CondŽ avait ŽtŽ accueilli ˆ bras ouverts dans Bordeaux ; les la TrŽmo•lle et les la Force, le duc de Richelieu, le comte du Dognon, le comte de Marsin venaient ˆ lui, avec le PŽrigord, l'Angoumois, la Saintonge, l'Aunis ; d'autre part, les vaisseaux espagnols avaient pŽnŽtrŽ dans la Gironde jusqu'ˆ Talmont et Bourg [298], et occupaient ces ports comme gages de leur alliance avec CondŽ. Mazarin, qui venait de rentrer en France, malgrŽ les arrts de proscription, et qui avait rejoint la cour en Poitou, ˆ la tte d'une armŽe auxiliaire ŽquipŽe ˆ ses couleurs, crut nŽcessaire de s'assurer la citadelle de Blaye comme un rempart contre la rŽbellion sans cesse grandissante. Non-seulement il fit parvenir au duc de Saint-Simon, par la duchesse et par l'abbŽ de Saint-Paul, des assurances de sa bonne volontŽ [299], mais il lui fit offrir le commandement d'un corps sŽparŽ. Bien que Claude dŽsir‰t depuis longtemps tre ˆ mme de participer activement aux opŽrations de l'armŽe royale, il rejeta cette proposition : car il ežt fallu servir en second sous un Lorrain, le comte d'Harcourt, et le duc et pair, incapable de s'y rŽsigner, adressa, le 26 mars, au tout dŽvouŽ Saint-Paul [300], une longue Žp”tre, o il se dŽgageait en ces termes :

Ç Il est vrai que je m'Žtois vaincu pour la dŽpendance du comte, par la pure considŽration du service, o je m'imaginois, en ce temps-lˆ, pouvoir tre utile, et aussi qu'on m'avoit fait entendre qu'il avoit la qualitŽ de gŽnŽralissime ; mais aujourd'hui que les affaires sont changŽes en bon Žtat, et que je sais qu'il n'est que gŽnŽral, le calice seroit trop amer. Je suis fort aise de l'Žviter. Ce n'est pas que je ne l'estime comme un grand, fort glorieux et heureux capitaine, et c'est en un point que, s'il n'Žtoit pas prince de Lorraine, je m'estimerois heureux d'tre sous lui simple soldat : mais les ducs et pairs en France ne peuvent pas se soumettre aux princes Žtrangers pour mendier l'agrŽment, le bon Dieu m'en garde ! È.

Quand Saint-Simon Žcrivait cette lettre, une commission de lieutenant gŽnŽral, pour servir dans l'armŽe du comte d'Harcourt, venait d'tre expŽdiŽe, le 25 mars, ˆ son nom et dans les termes les plus flatteurs [301]. Il rŽpondit ˆ cet envoi par un nouveau refus [302]. Selon la Chronologie militaire de Pinard [303], il aurait servi pourtant sous les ordres du comte d'Harcourt, au sige de Villeneuve-d'Agen ; mais il est plus vraisemblable que ses troupes seules y furent employŽes, sans qu'il y figur‰t en personne. Son poste Žtait d'ailleurs dans Blaye, devenu plus que jamais l'objet des visŽes de la fronde bordelaise et de ses alliŽs espagnols. Au mois de septembre 1652, le prince de CondŽ et son lieutenant Marsin, qui venait de trahir la cause royale, prŽparrent avec le baron de Watteville un plan de surprise ; les prŽtentions du reprŽsentant de l'Espagne le firent abandonner [304], mais le gouvernement royal n'en jugea pas moins prudent de renforcer la garnison de toutes les troupes qui se trouvaient disponibles dans les provinces. Le duc de Saint-Simon redoublait donc d'activitŽ et de vigilance : surveillŽ de prs par un dŽtachement des escadres espagnoles [305], il bloquait lui-mme les Bordelais et leur interdisait toute communication directe avec les provinces de Poitou et d'Angoumois, o ils eussent pu trouver des adhŽsions politiques, aussi bien que des dŽbouchŽs pour leur commerce. Dans ce r™le, Saint-Simon rendit encore de vŽritables services ˆ la cause royale, et se montra toujours insensible aux reproches comme aux avances de la jeune princesse de CondŽ [306].

La guerre d'escarmouches dura jusqu'au mois de juillet ; on en peut suivre le dŽtail dans les derniers volumes des Archives historiques de la Gironde, o M. Tamizey de Larroque a publiŽ les pices principales de la correspondance de Mazarin, et notamment les lettres du duc de Saint-Simon [307]. Celui-ci se trouvait relŽguŽ au second rang, dans la place mme dont il Žtait gouverneur, par la prŽsence du duc de Vend™me [308], qui avait pris position, avec sa flotte, sur la rivire. De lˆ un antagonisme constant, soit pour la direction des troupes de terre et de mer, soit pour la conduite des nŽgociations secrtes que l'on continuait ˆ entretenir au sein de la Ç rŽpublique È bordelaise. Voulant calmer Saint-Simon, M. de Vend™me lui fit donner un nouveau gouvernement sur la Gironde, celui de l'”le Casaus, peu importante comme fortifications, mais Ç utile pour Žtonner Bordeaux È.

La mŽsintelligence n'en fut pas moins violente, et elle ne prit fin que lorsque le traitŽ du 30 juillet permit ˆ l'amiral de transporter ailleurs son quartier gŽnŽral. Les princes et leurs partisans se dispersrent alors, les uns pour rentrer ˆ la cour et faire leur soumission, les autres pour chercher un abri ˆ l'Žtranger.... La Fronde Žtait terminŽe.

Aprs la Fronde

Les ministres et la reine mre oublirent tout aussit™t les promesses dont ils avaient si longtemps entretenu le zle de Claude de Saint-Simon. Quelles Žtaient ces promesses ? On n'a trouvŽ trace nulle part du Ç b‰ton de marŽchal È, ni du Ç rang de prince Žtranger, sous le prŽtexte de la maison de Vermandois È, que Saint-Maigrin vint, selon les MŽmoires [309], offrir au gouverneur de Blaye. Les lettres de la cour ne contiennent que des protestations vagues de gratitude pour celui que les agents de Mazarin ne cessaient cependant de reprŽsenter comme le serviteur le plus dŽvouŽ, le plus dŽsintŽressŽ, qu'on trouvait toujours prt ˆ s'accommoder avec tout le monde pour le service du Roi, et qui rŽellement s'Žtait ŽpuisŽ, pendant les cinq annŽes de troubles, Ç ˆ dŽfendre Blaye contre le parti de Monsieur le Prince, ˆ y tre bloquŽ dix-huit mois, ˆ y avoir payŽ la garnison, fourni des vivres, fait fondre du canon, muni la place, entretenu dedans cinq cents gentilshommes qu'il avoit ramassŽs, et fait plusieurs dŽpenses sans rien prendre sur le pays, et n'ayant tirŽ que du sien [310] È. La surintendance fit un simulacre de liquidation et expŽdia, pour le remboursement de ces Žnormes avances, une ordonnana de cinq cent mille livres ; mais le payement en fut retardŽ d'annŽe en annŽe : Foucquet allait le commencer lorsqu'il fut renversŽ par Colbert, et, jusqu'ˆ son dernier jour, le duc de Saint-Simon rŽclama en vain. Ce fut seulement en 1719, gr‰ce au concours heureux de la faveur du RŽgent et de la prospŽritŽ du Systme, que notre auteur fut remboursŽ de la crŽance de son pre.

On comprend en vŽritŽ l'amertume que tŽmoignent certaines lettres de Saint-Simon, entre autres celle du 27 juillet 1653, o, se plaignant ˆ Mazarin que la cour ne lui ežt pas donnŽ tout au moins le gouvernement de Bourg [311], il ajoutait :

Ç J'avoue que mon malheur est extrme d'tre traitŽ comme je le suis, parmi des services que j'oserai dire partout assez importants pour mŽriter quelque reconnoissance. J'Žprouve bien en cela, comme en plusieurs autres choses, qu'ils n'ont nulle considŽration envers vous, et que, pour tre retenu dans l'entier respect o les gens de bien et d'honneur doivent toujours vivre pour le Roi et les personnes qu'on honore aussi fidlement que je fais Votre ƒminence, on souffre et on p‰tit d'une faon trs-douloureuse. Diverses raisons m'ont mis en cet Žtat, et je suis pourtant autant que personne du monde, etc. [312] È.

Une telle ingratitude n'Žtait que trop bien faite pour rŽveiller les ressentiments de l'ancien favori de Louis XIII contre le Cardinal et la reine mre ; il eut de plus le chagrin de voir licencier une partie de son rŽgiment et de perdre les trois compagnies d'infanterie qui avaient ŽtŽ momentanŽment ajoutŽes ˆ la garnison de Blaye. C'Žtait bien ce que Saint-Maigrin avait prŽdit [313]. Dans les premiers jours de l'annŽe 1654, l'occasion se prŽsenta pour notre duc de faire preuve d'autant de dignitŽ et d'indŽpendance qu'il avait montrŽ de fidŽlitŽ durant les annŽes prŽcŽdentes. La cour, ayant perdu tout espoir de ramener ˆ elle le prince de CondŽ, entama contre l'illustre rebelle une procŽdure de haute trahison, et, par une lettre de cachet du 12 janvier, chaque pair fut convoquŽ au lit de justice qui devait recevoir le rapport des magistrats instructeurs. Saint-Simon prŽsenta des excuses trs-plausibles [314], et il ne se rendit point non plus ˆ la sŽance du 27 mars, o CondŽ fut condamnŽ avec ses quatre principaux adhŽrents. La cour dut facilement comprendre et admettre cette abstention du gouverneur de Blaye.

Des motifs d'un ordre diffŽrent l'empchrent d'assister au sacre du Roi (7 juin 1654). Ç On avoit rŽsolu, disent les MŽmoires [315], de confondre les ducs avec des seigneurs ou autres qui ne l'Žtoient pas, de la manire la plus solennelle, È et MM. de Tresmes et de Saint-Simon furent primitivement dŽsignŽs, avec deux autres chevaliers de l'Ordre non titrŽs, MM. d'Orval et de SouvrŽ, pour porter les offrandes ; mais l'un et l'autre s'abstinrent et furent remplacŽs par M. de Sourdis et par le marquis de Saint-Simon [316].

Retenu d'ailleurs ˆ Blaye par des craintes de conspiration, Claude de Saint-Simon ne put repara”tre ˆ la cour que vers la fin du mois de fŽvrier 1655, et la Muse historique de Loret [317] annona alors sa venue en termes qu'il faut citer :

Monsieur le duc de Saint-Simon,
Dont je tiens l'illustre et beau nom
Digne d'Žternelle mŽmoire,
D'autant qu'on peut dire ˆ sa gloire
Que, durant l'exŽcrable temps
O l'on vit tant de malcontents
Former mainte Žtrange cabale,
Il eut toujours l'‰me royale :
Quoiqu'il fžt fort sollicitŽ
De n'tre pas du bon cotŽ,
Il faudra que l'histoire aferme (sic)
Que toujours il demeura ferme,
QualitŽ rare en ce temps-lˆ.
Mais ne parlons plus de cela,
Et disons ceci pour nouvelle
Que ce duc constant et fidle,
Arrivant ici l'autre jour,
Fut reu de toute la cour
Avec des amitiŽs extrmes,
Tant par les puissances suprmes
(Dont je leur sais, ma foi! bon grŽ),
Que d'autres de moindre degrŽ.
En tŽmoignant de l'allŽgresse.
Chacun lui fit fte ou caresse.
Son mŽrite on exagŽra ;
Bref, Sa MajestŽ l'honora
D'un accueil extraordinaire.
Oh! que c'est bien fait de bien faire!

DŽfense des Ducs-Pairs

En 1659 et 1660, une affaire fort importante pour les ducs et pairs occupa Claude de Saint-Simon. DŽjˆ, dix ans auparavant, ses confrres l'avaient choisi, avec le duc de Schonberg, pour dŽfendre leurs intŽrts communs contre les soi-disant princes Žtrangers qui Žtaient leurs ennemis naturels, les la TrŽmo•lle, les Stuart, les Bouillon ; son zle, sa vivacitŽ n'avaient pas peu contribuŽ ˆ obtenir quelques lŽgres concessions et une promesse que les prŽrogatives de la principautŽ ne seraient plus accordŽes ˆ personne [318]. Mais les empiŽtements avaient repris de plus belle, et la pairie crut trouver une occasion favorable, lorsque le Roi se dirigea vers la frontire d'Espagne, o il devait rencontrer l'infante Marie-ThŽrse, pour demander justice et satisfaction. Un dŽputŽ, qui Žtait sans doute Claude de Saint-Simon, n'ayant rien pu obtenir du cardinal Mazarin avant que celui-ci se m”t en route, MM. d'Uzs, de Sully, de Luynes, de Lesdiguires, de Chaulnes, de Richelieu, de la Rochefoucauld, de Brissac et de Saint-Simon lui adressrent une lettre collective, suivie bient™t d'un mŽmoire que nous devons reproduire en partie, car non-seulement il est ˆ peu prs certain que c'Žtait l'Ïuvre de Claude de Saint-Simon, comme nous l'avons dŽjˆ dit [319], mais il semble qu'on y retrouve l'origine des sentiments passionnŽs et de l'argumentation chaleureuse qui deviendront si caractŽristiques chez notre auteur, toutes les fois que les intŽrts de la pairie seront en cause [320].

Aprs avoir rappelŽ le prŽcŽdent de 1649 et la promesse solennelle faite alors par la RŽgente et ses ministres, puis les raisons qui ont forcŽ les ducs ˆ s'abstenir de para”tre au sacre (1654) ou au voyage de Lyon (1658), de peur de se compromettre avec des gens Ç qui n'avoient aucune dignitŽ È, et enfin les rŽcentes dŽmarches de leur dŽputŽ auprs du Cardinal, le mŽmoire annonce qu'aucun duc ne pourra se rendre ˆ la suite du Roi,Ç Žtant persuadŽs qu'ils feroient un tort irrŽparable et honteux ˆ leur dignitŽ, s'ils ne faisoient ce qu'ils doivent pour en conserver les avantages È.

Ç Elle est dŽjˆ, continue le mŽmoire, oppressŽe d'une manire que, si on la nŽgligeoit encore en cet endroit, elle seroit abaissŽe de telle sorte que l'autoritŽ du Roi mme s'y trouveroit blessŽe, car, ces Messieurs Žtant les premiers officiers de la couronne et les grands de l'ƒtat, il est sans doute qu'il y a de l'intŽrt de Sa MajestŽ qu'ils soient maintenus dans le rang et les honneurs qui leur appartiennent.

Ç MM. les ducs et pairs savent fort bien qu'ils sont plus obligŽs que nuls autres d'tre auprs de la personne du Roi, et que la cour est la vŽritable assiette de ceux qui sont honorŽs de cette haute dignitŽ ; aussi leur inclination s'y accorde-t-elle tout ˆ fait, n'ayant pas une plus grande passion que de s'y ranger et d'y tre tousjours ; mais ils seroient dignes de bl‰me, s'ils y demeuroient au prix de leur honneur...

Ç Les ducs et pairs sont les grands officiers de la couronne et ont la premire dignitŽ de l'ƒtat. Un grand personnage les a nommŽs autrefois "les dehors de la royautŽ, qu'on ne peut blesser sans attaquer en quelque sorte la couronne." Ils ont l'honneur et l'avantage d'tre les conseillers nŽs et naturels de nos rois. Tous les gens de bon sens et qui ont la connoissance de l'histoire en conviennent, et nous voyons aussi que nos rois ne font point de dŽclarations pour le public sans y dire que c'est par l'avis des pairs de France.

Ç Cependant les choses sont venues aujourd'hui dans un tel dŽrglement, qu'il n'y a plus de ducs et pairs dans le conseil du Roi, bien qu'il y ait un grand nombre de ministres, parmi lesquels il y a au moins sept marŽchaux de France et plusieurs princes. MM. de Vend™me et de Guise le sont ; si M. d'ƒpernon y est, ce n'est ni en qualitŽ de prince, ni de pair, c'est une autre espce inconnue. Il y a deux ducs prŽtendus, qui sont MM. d'Arpajon et de Damville. Les marŽchaux de France sont MM. le marŽchal d'EstrŽes, le marŽchal de la Meilleraye, le marŽchal de Gramont, le marŽchal de l'Hospital, le marŽchal de Turenne, le marŽchal du Plessis et le marŽchal de Villeroy. M. de Senneterre est aussi ministre, en qualitŽ de chevalier de l'Ordre ; M. de Brienne et M. de Lionne, comme on le voudra penser. Il y en a, en un mot, de toutes les conditions, hormis de vrais ducs et pairs de France.

Ç Le feu roi Louis XIII, de trs-glorieuse mŽmoire, dit un jour une chose bien remarquable ˆ un gentilhomme de qualitŽ [321] qui avoit part en l'honneur de ses bonnes gr‰ces et avoit deux des principales charges de sa maison, sur le sujet d'une lettre qu'il Žcrivoit ˆ un duc et pair, soutenant qu'il lui devoit Žcrire Monseigneur, et que ce particulier le devoit faire par son intŽrt, s'il avoit assez d'ambition pour parvenir ˆ cette dignitŽ, mais qu'il vouloit qu'il le f”t par la considŽration de son service, les ducs et pairs, et les marŽchaux de France aprs, Žtant des gens qui faisoient un rang et un degrŽ entre les rois et les autres hommes en France, qu'il Žtoit obligŽ de maintenir en honneur et en respect parmi le monde. Ce prince Žtoit trs-savant pour les dignitŽs, charges, rangs et police de son ƒtat [322].

Ç La dŽsunion qu'il y a eue entre MM. les ducs et pairs, et le peu d'application qu'ils ont eu ˆ maintenir les prŽrogatives de la dignitŽ, est cause de l'abaissement o elle est tombŽe. Ils en ignorent presque tous entirement les droits, les privilges et les avantages, et, si quelqu'un ne prend le soin de les en instruire, ils sont en danger de demeurer toujours dans le honteux Žtat o ils sont. Ce seroit une action digne d'un homme d'honneur, qui obligeroit ˆ jamais les intŽressŽs, en Žternisant sa mŽmoire. Il est facile de rŽpliquer aux ennemis de la dignitŽ, qui disent que le nombre en est si fort augmentŽ, que c'est la cause de son avilissement. Cela n'est pas soutenable. L'Žtendue du Royaume est accrue, tout est multipliŽ : il n'y avoit anciennement que deux marŽchaux de France ; ils sont maintenant au nombre de seize ou dix-sept. Les provinces ont ŽtŽ divisŽes, et par consŽquent multipliŽes. Le Parlement n'Žtoit, dans sa crŽation, que de trois prŽsidents et quarante conseillers : ils sont, ˆ prŽsent, trois cents officiers et davantage, parmi lesquels il y a dix-huit prŽsidents. Il y a bien d'autres choses ˆ dire sur ce sujet, qu'on laisse aux plus intelligents ˆ exprimer. Il n'y a rien de si estimable que l'ordre et la rgle dans la cour et dans les ƒtats : la subordination y est entirement nŽcessaire ; mais tout est tombŽ en une telle confusion en France, qu'on n'y conno”t plus rien. Il est nŽanmoins important et trs-nŽcessaire de rŽtablir les dignitŽs, les rangs et le bon ordre en tout ; cette grande confusion menace de quelque chose de sinistre.

Ç La noblesse croit avoir fait merveille d'avoir rŽduit les grands du Royaume ˆ se ravaler ˆ des civilitŽs dans les visites et dans les lettres : ils n'ont pas compris encore qu'ils ont travaillŽ contre eux-mmes, car, si ceux qui sont dans les honneurs et dans les dignitŽs sont devenus Žgaux aux autres, quel avantage aura un gentilhomme d'honneur et d'ambition de parvenir aux charges de la couronne? Quand ils ont passŽ aux portes devant un homme de dignitŽ, qu'ils ont eu des premires places ˆ table, ou qu'ils n'ont point mis de Monseigneur dans une lettre, ils en font vanitŽ comme d'une espce de victoire obtenue. C'est un aveuglement pitoyable, car plus un gentilhomme a de mŽrite, de naissance, d'ambition, davantage il doit rendre les honneurs et les respects dus aux personnes qui sont ŽlevŽes dans les hautes dignitŽs et grandes charges de l'ƒtat, afin d'y avoir part quand ils auront l'honneur d'y tre parvenus. Ce qui s'est fait autrefois dans les Suisses contre la noblesse, et ce qui se passe aujourd'hui en Angleterre, doit faire comprendre ˆ tous les gentilshommes que nous avons grand intŽrt de nous maintenir dans l'ordre et dans la rgle.

Ç Quant ˆ la cour, comme il n'y a personne en France plus intŽressŽ ˆ l'autoritŽ du Roi et ˆ la grandeur de la couronne, que MM. les ducs et pairs, qui ont l'honneur d'en tre les grands officiers et de possŽder la premire dignitŽ, rien de leur dŽmarche ne doit dŽplaire ˆ Sa MajestŽ, leurs confŽrences n'ayant pour but que le rŽtablissement de la dignitŽ dans sa force et dans son lustre par l'autoritŽ de Sa MajestŽ. Et certainement, en demeurant unis et s'appliquant comme ils doivent ˆ cet ouvrage, ils parviendront ˆ ce juste dessein, dont Sa MajestŽ les louera, et toute la France les en estimera, Žtant l'intŽrt de toute la noblesse du Royaume, qui peut espŽrer d'y parvenir chacun ˆ son tour : si ce n'est ceux qui vivent aujourd'hui, ce seront leurs enfants, leurs petits-enfants, leurs petits-neveux, etc....

Ç Il est important de remarquer en quel temps la maison de Lorraine a obtenu l'avantage de se couvrir devant les ambassadeurs, et par quelle raison elle a emportŽ ce privilge. Apparemment que c'est depuis ce temps-lˆ que MM. les ducs et pairs de France ne se trouvent plus aux audiences des ambassadeurs, ayant toujours prŽtendu les mmes prŽrogatives que les plus ŽlevŽs de l'ƒtat ; aussi, de temps en temps, ils ont marquŽ leur mŽcontentement sur ce sujet, et fait paro”tre leurs prŽtentions.

Ç Il est ˆ propos aussi de dire quelque chose de ce que les ducs et pairs de France marchoient devant les princes du sang royal qui n'Žtoient reus pairs qu'aprs eux. Ce fut Charles IX ou Henri III qui voulurent que les princes du sang fussent ducs et pairs ds leur naissance, pour les mettre au-dessus des autres, cela Žtant fort raisonnable.

Ç Les annales de France et de certains petits livres curieux qui traitent de ces matires, peuvent apprendre beaucoup de choses concernant les dignitŽs, les rangs et les fonctions des grands de l'ƒtat, outre les histoires et les autres livres de cette natureÈ.

La question resta encore indŽcise, et pour longtemps : les ducs furent donc obligŽs de se tenir ˆ l'Žcart [323] ; mais, l'annŽe suivante, quand le mariage eut ŽtŽ conclu ˆ Saint-Jean-de-Luz, et que le couple royal revint ˆ petites journŽes vers Paris, Saint-Simon se trouva ˆ Blaye lors de son passage, et traita fort bien ses souverains (27 juin). Ç Il prŽsenta les clefs au Roi, que S.M. lui remit avec des paroles d'estime et de confiance, dignes de sa fidŽlitŽ et de ses services.... La cour fut si magnifiquement rŽgalŽe, qu'on peut dire qu'il n'a rien oubliŽ pour donner des marques de son respect et de son zle È. Le cardinal Mazarin, arrivŽ peu aprs le Roi et les reines, prit logement au ch‰teau, et, le matin suivant, on partit pour Brouage en chassant sur les terres du duc, sans doute dans le Marais de Saint-Simon [324].

Affaires familiales

Nous avons fort peu parlŽ de la famille de Saint-Simon et de sa vie intŽrieure. Rappelons seulement qu'en novembre 1659, la duchesse mit au monde une seconde fille [325], qui fut baptisŽe ˆ Saint-Sulpice de Paris le 7 octobre 1661 et reut les noms de Marie-Madeleine ; que l'a”nŽe, qui avait dŽbutŽ ˆ la cour en 1658, et qui n'avait pas moins de succs que sa mre dans les ballets de Benserade [326], se maria, le 17 avril 1663, avec le duc de Brissac : triste union, rompue ˆ l'amiable au bout de trois ans et demi [327] ; que Marie-Madeleine, dite Mlle de la FertŽ, mourut ˆ l'‰ge de cinq ans [328], et qu'enfin la duchesse elle-mme mourut ˆ Paris, le 2 dŽcembre 1670 [329], de la petite vŽrole. Elle n'avait que quarante ans et laissa, dit la Gazette, Ç un regret d'autant plus universel qu'elle Žtoit d'un mŽrite singulier È. Son corps fut transportŽ ˆ Senlis et inhumŽ avec une pompe extraordinaire. Le doyen des Lyons [330], qui avait mariŽ la duchesse, pronona son oraison funbre. Elle avait trouvŽ, dit l'orateur, Ç dans le sang de Saint-Simon, un mariage doux et bŽnin, qui ne lui a point ™tŽ, par sa grandeur et par ses richesses, la libertŽ et la facilitŽ de vivre en duchesse chrŽtienne È. Aussi l'avait-on vue fuir Paris pour se consacrer aux bonnes Ïuvres dans les terres ou les gouvernements de son mari, sacrifier sa magnifique chevelure dans un accs de piŽtŽ, travailler pour les pauvres, leur donner les deux tiers des six mille livres qui lui Žtaient assignŽes pour sa toilette, diriger les Ïuvres de charitŽ du faubourg Saint-Germain-des-PrŽs, s'occuper de conversions, rŽtablir l'h™pital de Blaye, supporter avec hŽro•sme des infirmitŽs continuelles ; mais jamais elle n'avait pu se consoler de la perte de deux de ses enfants [331]. De ce tŽmoignage rapprochons celui de Mme de SŽvignŽ, qui Žcrit, le 3 dŽcembre 1670, que la mort de Mme de Saint-Simon Ç laisse presque tout le monde affligŽ de la perte d'une si aimable personne. Moi, dit-elle, j'en suis touchŽe au dernier point. Vous savez l'inclination naturelle que j'avois pour elle [332] È.

Le duc Claude avait ŽtŽ amenŽ ˆ Paris, vers l'Žpoque o ce deuil vint le frapper, par l'Žtat de ses affaires [333]. Il ne s'en retourna qu'au milieu de l'annŽe 1671, et, avant de rentrer ˆ Blaye, alla prendre les eaux de quelque source en vogue contre les douleurs de nŽphrŽtique dont il venait de subir une trs-forte attaque. L'annŽe suivante, on le vit revenir ˆ Paris pour contracter la nouvelle alliance dont devait sortir, en 1675, l'auteur des MŽmoires. Le 17 octobre 1672, dans la chapelle de l'h™tel d'Angoulme, rue PavŽe, au Marais [334], fut cŽlŽbrŽ le mariage de Claude de Saint-Simon avec Charlotte de l'Aubespine de Ch‰teauneuf d'Hauterive [335].

Le contrat de mariage avait ŽtŽ passŽ les 15 et 16 octobre, avec le consentement et la permission du Roi et de la Reine, l'avis et le consentement du Dauphin, des duc et duchesse d'OrlŽans, de Mademoiselle, de la duchesse d'Angoulme, de l'archevque de Paris, du comte de Sagonne l'Aubespine, de la marquise de Champvallon, du duc de Mortemart, des marquises de Montespan et de Thiange, des Matignon, Villeroy, MŽdavy, Grancey et Senneterre, de Colbert, de Louvois et de Seignelay, du comte du Lude, etc.

Mlle d'Hauterive, qui avait perdu son pre en 1670, apportait trois cent mille livres, dans lesquelles la terre de Verrires en Berry comptait pour quatre-vingt-dix mille livres ; plus, vingt mille livres ˆ recouvrer en Hollande, et dix mille livres de pierreries. Sa mre, qui habitait le ch‰teau de Montrouge prs de Paris, avait ajoutŽ soixante-dix mille livres ˆ prendre aprs son dŽcs. Le douaire Žtait fixŽ ˆ huit mille livres de rente, avec habitation ˆ la FertŽ-Vidame [336].

Les MŽmoires ne disent mot de la famille o le duc Claude entrait par ce second mariage ; c'Žtait en effet une noblesse un peu trop rŽcente, quoique Tallemant des RŽaux rŽpute quelque part la maison de l'Aubespine Ç la meilleure de Paris È. Son premier auteur connu Žtait Claude de l'Aubespine, avocat au Parlement, bailli de l'abbaye Saint-Euverte d'OrlŽans, conseiller de cette ville en 1510, Žchevin en 1516, mariŽ, le 27 fŽvrier 1507, ˆ Marguerite le Berruyer, dame de la Corbillire [337]. Leur fils, nommŽ aussi Claude, s'allia encore bourgeoisement, en 1542, avec une fille de Guillaume Bochetel ; toutefois celui-ci Žtait secrŽtaire d'ƒtat, et il passa sa charge ˆ son gendre, qui en remplit les fonctions pendant vingt-cinq ans, avec beaucoup de zle. Le petit-fils, successivement conseiller au Parlement, ma”tre des requtes, ambassadeur en Angleterre, conseiller d'ƒtat, chancelier de la reine Louise de Lorraine, et enfin chancelier des ordres en 1606, acheva l'ŽlŽvation de sa famille. Outre le marquis d'Hauterive, pre de Charlotte, et le garde des sceaux Ch‰teauneuf, il laissa un fils, qui fut cŽlbre comme Žvque d'OrlŽans, deux filles, mariŽes au baron de Leuville et au comte de Vaucelas, et deux autres qui furent abbesses.

Les quartiers bourgeois de cette filiation des l'Aubespine Žtaient compensŽs, du c™tŽ de la marquise d'Hauterive, par de nombreuses alliances de la maison de Volvire, trs- ancienne par elle-mme, avec celles du Bois de la Roche, de Daillon, Mortemart, Saulx-Tavannes, Montrevel, etc. [338]. ƒlŽonore de Volvire, mariŽe le 17 novembre 1631 au marquis d'Hauterive [339], Žtait fille de Philippe de Volvire, marquis de Ruffec, et d'Aymerie de Rochechouart, sÏur du marquis de Mortemart et tante du premier duc de ce nom. Philippe de Volvire Žtait mort le 19 aožt 1604, des suites d'un duel o il avait tuŽ Fontaines-Chalandray, laissant un fils, une fille, qui fut abbesse, et ƒlŽonore. Le fils, Henri de Volvire, mourut d'horreur d'avoir fait assassiner son oncle l'abbŽ de la Couronne, ˆ l'instigation de Louis XIII : c'est du moins ce que raconte Tallemant des RŽaux [340]. RestŽe ainsi seule hŽritire, ElŽonore de Volvire apporta en dot au marquis d'Hauterive le marquisat de Ruffec et les baronnies ou seigneuries d'Aizie, EmpurŽ, Martreuil, Verrires, Charmes, etc. Leur contrat de mariage, confirmŽ plus tard par le testament de M. d'Hauterive (21 septembre 1669), stipula que l'a”nŽ de leurs fils aurait Ruffec et Žcartlerait les armes de Volvire avec celles de l'Aubespine.

Ruffec [341] Žtait alors une des terres les plus considŽrables de l'Angoumois, soit pour le revenu, qui allait ˆ dix-huit mille livres, et les forts, qui donnaient de magnifiques coupes de haut bois, soit pour la justice, qui comprenait trente-deux paroisses, et la mouvance, qui embrassait plus de cinquante terres nobles. Mais le fils a”nŽ, ˆ qui ce marquisat devait faire retour, Charles de l'Aubespine, dŽjˆ marquis de Ch‰teauneuf-sur-Cher, Žtait, ˆ ce qu'il para”t, un homme de dŽsordre, de trs-mauvaise conduite, Ç ruinŽ, et, comme le dit notre auteur, plaideur de sa famille [342] È. Son pre l'ayant fait lŽgataire universel et Žtant mort en 1670, le testament devint l'objet d'un premier procs, au cours duquel le Roi, Ç mal satisfait de la conduite de M. de Ch‰teauneuf È, l'exila ˆ Brive, et l'y maintint rigoureusement depuis le 17 janvier 1677 jusqu'au 12 mai 1693, c'est-ˆ-dire jusqu'aprs la mort de Claude de Saint-Simon [343]. Pendant ce temps, le marquis fut mis en possession de son legs, qui s'Žleva ˆ cinq cent soixante mille livres, sans compter cent mille Žcus qu'il avait eus en dot, comme sa sÏur.

Mais Mme d'Hauterive, craignant que la terre patrimoniale de Ruffec n'ežt le mme sort que celles de Ch‰teauneuf et de Hauterive, en Berry, dŽjˆ vendues ˆ Colbert par ce dissipateur [344], se h‰ta de passer une vente fictive au profit de la duchesse de Saint-Simon : celle-ci fut censŽe acquŽrir le marquisat de Ruffec moyennant une somme de cinq cent mille livres [345]. Ce fut l'occasion d'une nouvelle procŽdure, qui se joignit ˆ celles dont Mme de Saint-Simon ou Mme d'Hauterive avaient dŽjˆ obtenu l'Žvocation. Du fond de son exil, le marquis, frustrŽ dans ses droits ou ses espŽrances, s'adressa au Roi lui-mme, accusa Mme de Saint-Simon d'avoir circonvenu leur mre, aveugle et ‰gŽe de quatre-vingts ans, et s'opposa ˆ ce que la Chambre des comptes dŽlivr‰t acte de l'hommage que la duchesse s'Žtait h‰tŽe de rendre, le 30 avril 1683, pour sa nouvelle acquisition. Le procs fut repris encore plus tard, aprs la mort de Mme d'Hauterive, par M. de Ch‰teauneuf et par Mme de Champvallon, sa sÏur [346] ; nŽanmoins Ruffec resta ˆ la duchesse douairire de Saint-Simon, et l'on sait que notre auteur, aimant beaucoup cette terre, en fit prendre le nom successivement ˆ ses deux fils [347].

Les dŽtails que nous venons de donner sur le marquis de Ch‰teauneuf font comprendre aisŽment que Saint-Simon n'ait pas ŽtŽ tentŽ de parler de cet oncle plaideur, qui passait, ˆ l'Žpoque o dŽbutent les MŽmoires, pour avoir mangŽ plus de cent mille livres de rente et ne subsister que du bien de sa femme ou de quelques pensions [348], non plus que de son fils Louis-Franois, marquis de l'Aubespine, qui fut aussi processif, aussi chicaneur, ˆ ce qu'il semble [349]. En revanche, quels accents de profonde tendresse et de respectueuse vŽnŽration sa piŽtŽ filiale sait trouver lorsqu'il rencontre quelque souvenir de sa mre [350] !

En 1672, Charlotte de l'Aubespine avait dŽjˆ vingt-sept ans ; mais Claude de Saint-Simon en comptait plus de soixante-cinq, et le portrait de cette Žpoque le montre fort vieilli. Les mauvais plaisants commencrent donc ˆ se donner carrire sur cette disproportion d'‰ge [351] ; aussi le duc Žvita-t-il rŽsolument le sŽjour de la cour, o pourtant sa propre situation et les alliances de sa femme, surtout sa proche parentŽ avec Mme de Montespan, leur eussent assurŽ un bon rang ˆ l'un et ˆ l'autre : il Ç ne la voulut que pour lui È, et s'assura ainsi le bonheur domestique [352].

Fin de vie

Quelques faits seulement, parmi ceux qui concernent les relations du duc Claude avec la cour, pendant les vingt dernires annŽes de sa vie, peuvent tre relevŽs ici. Nous dirons, par exemple, qu'en mai 1675 et en septembre 1677, il reut ˆ Blaye et traita magnifiquement le jeune duc du Maine, allant aux bains de Barges ou en revenant, sous la conduite de la fidle Mme Scarron [353], et cela fera souvenir que, selon les MŽmoires, le gouvernement de Blaye tenta, en 1691, l'aviditŽ du comte d'AubignŽ, frre de la toute-puissante marquise, mais que cette demande fut fort mal accueillie du Roi [354]. En effet, une lettre de Mme de Maintenon (que l'Žditeur, il est vrai, a mal classŽe [355]) contient cette phrase : Ç Je ne crois pas que vous ayez Blaye, ˆ moins que le Roi ne change de vues lˆ-dessus È. Le Roi avait promis au duc de rŽserver Blaye ˆ son hŽritier.

On a vu que Claude et son frre a”nŽ furent longtemps les deux seuls chevaliers du Saint-Esprit qui survŽcussent du rgne de Louis XIII : Ç chose sans exemple dans aucun ordre [356] È. L'un et l'autre furent chargŽs de recevoir les preuves de quelques-uns des chevaliers nommŽs par Louis XIV. En 1686, Claude prŽsenta le prince de Conti, avec le duc de Chaulnes, et peu s'en fallut mme qu'il ne supplŽ‰t M. de Luynes pour le duc du Maine, ce qui prŽoccupa beaucoup, durant quelques jours, le jeune vidame de Chartres [357]. En 1688, il fut associŽ ˆ Montausier pour recevoir les preuves du duc de Vend™me, et ˆ Beringhen pour examiner celles de Charles d'AubignŽ. M. de Vend™me, Ç accoutumŽ aux nŽgligences avantageuses È, ne songeait point ˆ faire ˆ ses commissaires la visite de convenance : ils s'en plaignirent, et Louvois, comme chancelier de l'Ordre, trouva un moyen de faire venir le duc chez eux [358].

Quant aux preuves du comte d'AubignŽ, la publication rŽcente d'une partie des pices recueillies par Clairambault [359] a fait conna”tre par quels moyens Mme de Maintenon et son frre essayrent de se procurer les preuves de noblesse voulues, pourquoi les deux gŽnŽalogistes d'Hozicr et Chauvry se renvoyrent de l'un ˆ l'autre la responsabilitŽ de preuves qu'ils savaient fausses, et comment, en un mot, il est bien difficile que cette faussetŽ n'ait pas ŽtŽ connue des deux commissaires, ce qui ne les empcha pas de dŽclarer la famille du nouveau chevalier Ç une des plus considŽrables de la province d'Anjou, pour l'anciennetŽ de son origine [360] È.

En 1690, le duc de Saint-Simon [361] perdit son frre et hŽrita de ses gouvernements, mais non de sa fortune personnelle, car la veuve, selon l'expression des MŽmoires [362], sut Ç prendre les biens et laisser les dettes È aux hŽritiers naturels de son mari. Seule, la terre patrimoniale du Plessis-de-Rasse revint peut-tre, pendant quelque temps, au duc, car le Mercure et Dangeau racontent qu'un mois aprs la mort du marquis, le Roi fit ˆ son frre l'honneur de d”ner au Plessis en allant ˆ Compigne le 28 fŽvrier 1690 [363], puis, au retour, passa en revue les rŽgiments d'Asfeld et de Kšnigsmarck dans la prairie qui faisait face au ch‰teau [364] ; mais le Plessis ne resta pas aux mains de M. de Saint-Simon, quoique ce pžt tre une rŽsidence utile pour un gouverneur de Senlis : les crŽanciers en poursuivirent la vente, et ils le firent acheter au prix de trente-cinq mille livres (la terre ne donnait que mille livres de revenu) [365], par le financier Maximilien Titon, entrepreneur de la manufacture d'armes du faubourg Saint-Antoine, qui en fit don ˆ un de ses fils cadets, rŽcemment reu ma”tre des comptes [366]. Quant aux autres terres, la Versine, qui Žtait la demeure la plus habituelle de M. et Mme de Saint-Simon, fut vendue aussi ˆ la requte des crŽanciers et achetŽe par Monsieur le Prince ; Pont-Sainte-Maxence et les petites seigneuries voisines passrent peu de temps aprs, par la mort de la marquise [367], ˆ ses lŽgataires MM. de Crussol d'Uzs, et de lˆ aux la Vallire.

Succession et inventaires

Sans nous arrter sur la dernire partie de l'existence du duc Claude, o bien des dŽtails eussent permis de caractŽriser sa physionomie et de contr™ler l'exactitude du portrait fait par son fils [368], nous nous bornerons ˆ faire conna”tre les principales pices relatives ˆ sa succession, en commenant par la donation universelle entre-vifs qu'il signa, la veille mme de sa mort, le 2 mai 1693, au profit de son fils [369]. Cet acte, passŽ devant Me le Roy le jeune, notaire au Ch‰telet, dans l'h™tel de la rue Saint-Pre [370], dit que le duc,

Ç se voyant dans un ‰ge avancŽ, voulant se dŽcharger du soin de ses affaires et, en mme temps, donner des tŽmoignages de l'amitiŽ qu'il a toujours eue pour Messire Louis de Saint-Simon, vidame de Chartres, fils unique de lui et de trs-haute et trs-puissante dame Madame Charlotte de l'Aubespine de Ch‰teauneuf, marquise de Ruffec, son Žpouse, et marquer audit seigneur son fils la satisfaction qu'il a de sa bonne conduite et des respects et obŽissance qu'il lui a toujours rendus, et qu'il espre qu'il continuera de lui rendre, a, par ces prŽsentes, de sa franche et pleine volontŽ, donnŽ et donne par donation entre-vifs pure et simple.... audit seigneur Louis de Saint-Simon, vidame de Chartres, son fils unique et seul prŽsomptif hŽritier, mineur ŽmancipŽ d'‰ge, demeurant audit h™tel sus dŽclarŽ, ˆ ce prŽsent et acceptŽ (sic), assistŽ de Me Claude-Franois ChŽrier, procureur en Parlement, son curateur et tuteur nommŽ, en tant que besoin seroit, ˆ l'effet d'accepter conjointement avec lui toutes donations... suivant la sentence du Ch‰telet de ce jourd'hui... tous et chacuns les biens meubles, acquts, immeubles, propres et autres biens gŽnŽralement quelconques, mme tous droits et actions rescindantes et rescisoires, de quelque nature qu'elles soient ou puissent tre, qui appartiennent prŽsentement audit seigneur duc de Saint- Simon, et qui se trouveront lui appartenir au jour de son dŽcs ; dans lesquels biens immeubles sont compris la terre et duchŽ et pairie de Saint-Simon, les terres et ch‰tellenie de la FertŽ-Ernault et de Beaussart, le vidamŽ de Chartres, le fief de la Comtau et Marais de Saint-Simon en Guyenne, et domaine engagŽ de Vitrezay, la maison et jardins appelŽs la Cassine, le fief de Saint-Louis de la Rochelle, et la maison de Versailles appartenant audit seigneur donateur, situŽe dans l'avenue de Saint-Cloud ; toutes lesdites terres, seigneuries et maisons, avec leurs circonstances et dŽpendances et annexes ; et gŽnŽralement tous les autres biens et droits.... mme toutes les sommes qui peuvent tre dues au-dit seigneur donateur par ses fermiers, receveurs et autres dŽbiteurs.... Et pour la plus grande sžretŽ et validitŽ de la prŽsente donation, il sera fait incessamment un bref Žtat et inventaire, prisŽe et estimation des meubles meublants, vaisselle d'argent et autres effets mobiliers appartenant prŽsentement audit seigneur donateur, et qui sont dans lesdites maisons de Paris et Versailles, ch‰teau de la FertŽ, citadelle de Blaye et maison de la Cassine ; mme, description sommaire et inventaire des titres et papiers appartenant audit seigneur, autres toutefois que des titres honorifiques et anciens papiers de sa famille et des titres concernant les droits desdites terres et seigneuries, que ledit seigneur entend tre dŽlivrŽs sans inventaire audit seigneur vidame de Chartres, son fils, par toutes personnes qui en peuvent tre chargŽes.... Pour, par ledit seigneur vidame de Chartres, jouir, ordonner, faire et disposer desdits biens,... ˆ l'exception toutefois desdits meubles meublants et vaisselle d'argent, dont la jouissance ne commencera que du jour du dŽcs dudit seigneur donateur.... Cette donation entre-vifs faite ˆ la condition expresse de, par ledit seigneur vidame de Chartres, payer et acquitter toutes les dettes mobilires et immobilires dudit seigneur duc de Saint-Simon dont lesdits biens sont prŽsentement chargŽs, et de continuer les rentes constituŽes et autres charges annuelles qu'il doit.... Bien entendu toutefois qu'en la prŽsente donation ne sont point compris les pensions et appointements des gouvernements et charges dudit seigneur duc de Saint-Simon, donateur, qui en jouira pendant sa vie [371] .... È

Le duc mourut le jour suivant. Comme le disent les MŽmoires [372], il Žtait urgent d'obtenir la transmission ˆ son fils des divers gouvernements qu'il possŽdait, et que plus d'un courtisan convoitait : on cacha sa mort pendant les quelques heures nŽcessaires aux dŽmarches du vidame [373] ; mais le jour mme, 4 mai, la duchesse fit procŽder rŽgulirement ˆ l'apposition des scellŽs, puis ˆ leur levŽe immŽdiate, et les notaires commencrent tout aussit™t l'inventaire du mobilier qui garnissait l'h™tel [374]. Ils s'y reprirent ˆ deux fois et travaillrent pendant un mois et demi ; car les crŽanciers, prŽvenus trop tard et n'ayant pu intervenir que le 19 mai, obtinrent qu'il fžt procŽdŽ ˆ une nouvelle apposition de scellŽs et ˆ un rŽcolement gŽnŽral [375] : les premires opŽrations avaient ŽtŽ faites trs-lŽgrement, sans doute pour qu'elles fussent terminŽes avant le dŽpart du jeune hŽritier.

Cet inventaire fut dressŽ ˆ la requte de la duchesse, Ç non commune en biens et crŽancire de la succession, È et de son fils, ŽmancipŽ d'‰ge depuis le 23 avril prŽcŽdent. C'est pour nous une pice des plus curieuses, en ce qu'elle dŽcrit l'intŽrieur o venait de s'Žcouler la jeunesse du vidame.

L'h™tel [376], par lui-mme, n'avait rien de remarquable ; il n'Žtait point d'ailleurs la propriŽtŽ des Saint-Simon, qui n'en avaient que la location depuis le jour o le duc Claude, vendant sa charge de premier Žcuyer, avait quittŽ le Petit-Bourbon [377]. L'ameublement des principales pices Žtait trs-simple et se ressentait de l'‰ge du vieux duc ou de la raretŽ de ses sŽjours ˆ Paris ; la plupart des meubles les plus prŽcieux, lits, tentures, Žtoffes, dont la description ne serait pas sans intŽrt pour l'antiquaire, se trouvaient resserrŽs, entassŽs dans le garde-meuble. La chambre o Claude de Saint-Simon venait de mourir, et qui donnait sur la cour, Žtait tendue de brocatelle, avec un lit de damas vert ˆ franges d'or. La grande salle de rŽception, donnant sur la rue Taranne, avait pour tenture une tapisserie de haute lisse de Flandre reprŽsentant une Ç histoire profane, È sur laquelle se dŽtachaient d'une part le tableau de Pomone donnŽ en 1632 par le duc de Montmorency, d'autre part une Vierge, munis tous les deux de rideaux de taffetas vert. La cheminŽe avait pour toute garniture, comme on le voit si souvent dans les portraits et les descriptions de ce temps-lˆ [378], six tasses et gobelets de porcelaine de la Chine, entremlŽs de trois vases de cristal ˆ monture de vermeil. Dans un coin, se trouvait une table de trictrac.

A c™tŽ de la grande salle, mais donnant sur la cour, la chambre de la duchesse et un grand cabinet qui y attenait, et qui servait ˆ la rŽception, Žtaient mieux meublŽs. On y remarquait de nombreux tableaux, presque tous sujets de dŽvotion, et beaucoup de miniatures du mme genre, peintes par Mme de Saint-Simon elle-mme.

Le jeune vidame de Chartres occupait, au second Žtage, sur la cour, une chambre et un cabinet d'Žtude. La chambre Žtait aussi simple que celle de son pre : tenture de verdures de Flandre, meubles de noyer, une table et deux guŽridons, trois fauteuils garnis de brocard brun ˆ fleurs or et argent, ou blanc ˆ bandes violettes, or et argent ; quatre autres fauteuils et trois chaises, recouverts de housses de serge verte ; deux fauteuils Ç de commoditŽ È de damas rouge ; un petit Ç respect È couvert de tapisserie faon d'Angleterre, un petit guŽridon de bois peint faon de la Chine, un petit corps de cabinet ˆ quinze tiroirs, un petit coffre de toilette de bois de violette garni de cuivres dorŽs, un paravent de serge rouge, un miroir de trente pouces sur vingt, garni d'Žbne et de cuivres dorŽs, une garniture de feu de cuivre argentŽ. Dans un coin, un petit lit Ç brisŽ È d'armŽe garni de ses sangles, un sommier de crin, deux matelas remplis de laine et couverts de futaine et de toile, un traversin de coutil rempli de plume, une couverture de laine blanche, le tour du lit de damas vert, etc. Dans un autre coin, une couche ˆ hauts piliers de noyer, avec ses rideaux en bandes de tapisserie d'Angleterre, laine et soie, et de moire feuille-morte, doublŽs de damas blanc. Sur les murs, deux tableaux reprŽsentant une Vierge et un paysage, deux girandoles de cuivre argentŽ, ˆ garnitures de cornaline et d'agate blanche ; enfin trois coquilles et trois petites tasses de porcelaine sur la cheminŽe.

Le cabinet d'Žtude, tendu de brocatelle de Venise ˆ bandes rouges et noires, avait pour ornements une Sainte Catherine de Sienne et une Mort de SŽnque, douze cartes de gŽographie, un baromtre de bois dorŽ, deux sphres de carton.

A c™tŽ de la chambre du vidame Žtait celle de son gouverneur. Ses livres composaient une petite bibliothque, dont le catalogue, quoique dressŽ fort incorrectement par le notaire, fait assez bien conna”tre la direction donnŽe ˆ ses Žtudes :

Histoire de l'ƒglise. Imitatio Christi. Introduction ˆ la vie dŽvote. CatŽchisme de Grenade. Îuvres de Grenade. Îuvres de Ronsard. Essais de Montaigne. Tableaux de Philostrate. Histoire romaine. ThŽ‰tre de Corneille. Histoire d'Espagne. MŽtamorphoses d'Ovide. Fortification nouvelle, par Freitag. Les Figures de la Bible. Les MŽtamorphoses d'Ovide en rondeaux. Charles IX. Histoire du LuthŽranisme. TraitŽ de la Noblesse. Îuvres des peintres. Voyages de Tavernier. Voyages de Pitre de la VallŽe. Annales d'Angleterre. Recueil de MM. les Pairs. Stances de vers franais, en manuscrit. Histoire amoureuse des Gaules, en manuscrit. Lucien. CornŽlius Nepos, ad usum Delphini. Der Teutsche Hercules. Description du sige de Vienne. ClŽlie. AstrŽe. Pharamond. Cassandre. ClŽopˆtre. Instructions chrŽtiennes. TraitŽ de la ComŽdie. Grammaire allemande de Duez. Grammaire triple de Thomas Finy. Janua linguarum. Amurath (en allemand). ƒtat des princes d'Allemagne. Histoire de Sanson. Alma•de (roman allemand). Alphabet allemand. Miroir de la confession et communion. Fables d'ƒsope. L'Amoureux europŽen. Visions de Quevedo ou Îuvres de Philandre. Histoire du Grand Mogol. Histoire de Philippe. Histoire de France de MŽzeray. Îuvres de Voiture. Îuvres de Racine. Quatrains de Pibrac. Diogne de La‘rte. PensŽes diverses. Îuvres de Molire. Fables de la Fontaine. PoŽsies et contes de la Fontaine. Billets galants. Potes grecs, latins et franais. RŽflexions morales de SŽnque. Discours sur les PensŽes de M. Pascal. Discours de la Conversation. Conversations. Colloques de Cordier. Apologies de Tertullien. Instruction pour une jeune princesse. Instruction pour un jeune prince. Fables de Phdre. Liber Psalmorum. MŽmoires de Bassompierre. Critique de BŽrŽnice. Dictionnaire italien et franais. Description de l'univers. Dictionnaire franais de Danet. Dictionnaire latin. Justinus, ad usum ser. Delphini. Justimis, variorum. Petite mŽthode facile et curieuse de Bretonneau. Despautre. Rudiment. Aserra (sic) philologica. Histoire chronologique des empereurs turcs. Voyages divertissants (en allemand). CivilitŽ franoise. CatŽchisme historique. Nouveau Testament. Virgile, traduction du P. de la Rue. Lucain, commentŽ. Virgile, commentŽ. Florus, commentŽ. Histoire poŽtique. Indiculus universalis. Introduction ˆ la gŽographie. Synonymes, ou Dictionnaire pour les vers. Morale de JŽsus-Christ, par Dozenne. Parerga de M. Bachot. Dictionnaire allemand, franais et latin. TraitŽ du choix et de la conduite des Žtudes, par M. l'abbŽ Fleury. Lettres de M. de Bongars. Horace, traduction de Martignac. Satires d'Horace, traduction du P. Tarteron. Rgles de l'Žducation des enfants, par M. Coustel. Commentaires de CŽsar, commentŽs par M. d'Ablancourt. JuvŽnal et Perse, traduction de Martignac. JuvŽnal, commentŽ. Orationes de CicŽron, commentŽes. Îuvres du mme auteur, traduction de du Ryer. RhŽtorique de Joannes. L'art de parler. Merveilles de la ville de Rome.

L'inventaire et les pices qui y sont jointes font conna”tre les noms principaux de la domesticitŽ de l'h™tel : des Essars, Žcuyer de la duchesse ; Gobert, Žcuyer du duc, et la Palisse, son secrŽtaire ; Franois de la Fontaine, sieur des Fontaines, intendant ; Bassatte, chirurgien ; Mlle Meigret, fille de la duchesse ; enfin deux personnages dont les MŽmoires parlent plusieurs fois : L'un est ce gouverneur qui figure dans le rŽcit de la bataille de Nerwinde [379], et ˆ qui l'on peut attribuer l'Instruction pour le vidame de Chartres rŽcemment publiŽe par M. le baron JŽr™me Pichon [380]. Ce gouverneur s'appelait RenŽ de GoguŽ, Žcuyer, sieur de Saint-Jean ; il appartenait ˆ une famille noble du Perche, et son a•eul avait ŽtŽ ma”tre d'h™tel du duc d'Angoulme et gentilhomme ordinaire de la maison du Roi [381]. Il resta attachŽ ˆ la personne de Louis de Saint-Simon : en 1698, le conseil de famille le nomma encore tuteur spŽcial pour recevoir le remboursement de la charge de garde du TrŽsor royal possŽdŽe jadis par Nicolas de FrŽmont.

L'autre commensal de l'h™tel Žtait Guillaume le Vasseur, abbŽ commendataire de la petite abbaye de Notre-Dame d'Aubepierre, prs d'Argenton. Cet abbŽ, nous dit Saint-Simon, conduisit ses affaires, comme il avait conduit celles de son pre, Ç avec toute l'affection, la capacitŽ et la rŽputation qui se pouvoit dŽsirer [382] È. Il ne mourut qu'en 1709, aprs trente annŽes d'un service assidu [383]. Ainsi que le gouverneur Saint-Jean, l'abbŽ le Vasseur Žtait traitŽ fort familirement par le vidame de Chartres ; l'un et l'autre eurent l'honneur de signer l'acte de son mariage avec Mlle de Lorge [384], et une chronique du temps [385] fait entendre que l'abbŽ, ayant la haute main sur la maison du nouveau duc, ne la monta pas aussi brillamment qu'on l'ežt dŽsirŽ.

Un article de l'inventaire qui doit avoir Žgalement sa place ici, est celui de l'Žcurie, contenant, outre quatorze chevaux de voiture, six chevaux de selle et trois de b‰t, que le jeune vidame emmena, le 19 mai, ˆ l'armŽe de Flandres, et qui lui servirent ˆ la bataille de Nerwinde [386]. Les remises contenaient : un petit carrosse coupŽ, aux armes ducales, doublŽ de velours cramoisi, avec trois glaces fixes, coussins et Ç estrapontin ; È un grand carrosse de mme ; un autre grand carrosse ˆ housse de cŽrŽmonie ; deux chaises de poste, doublŽes de brocatelle de Venise aurore et de velours blanc ; deux chaises ˆ porteurs.

Pareil inventaire fut fait dans l'h™tel que le duc de Saint-Simon s'Žtait fait construire ˆ Versailles, avenue de Saint-Cloud, sur un terrain donnŽ par le Roi en 1685 [387] ; puis au ch‰teau de la FertŽ, ˆ Blaye, et ˆ la Cassine, dans le Marais de Saint-Simon. Les estimations du mobilier, dans ces demeures, s'Žlevrent ˆ cinquante et un mille cinq cent quarante-cinq livres deux sols trois deniers, pour l'h™tel de Paris ; trois mille huit cent cinquante-huit livres dix sols, pour celui de Versailles ; dix-huit mille neuf cent quatre-vingt-dix-huit livres cinq sols, pour la FertŽ ; quatre mille quarante-six livres dix-neuf sols, pour Blaye ; et deux mille huit cent vingt-quatre livres quatre sols, pour la Cassine. Dans l'ŽnumŽration des crŽances de la succession, on en remarque une de quatre cent six mille cinquante-sept livres quinze sols, sur le Roi, pour la solde avancŽe ˆ la garnison de Blaye, ou pour l'arriŽrŽ des pensions et appointements du duc, reprŽsentŽ par des billets de l'ƒpargne, des ordonnances ou des assignations que le TrŽsor n'avait pas payŽs [388].

Nous avons dit que le jeune vidame avait ŽtŽ ŽmancipŽ quelques jours avant la mort de son pre et placŽ sous l'autoritŽ d'un curateur, Claude-Franois ChŽrier, procureur au Parlement. Ce ne fut que pour la forme qu'on le pourvut momentanŽment d'un tuteur honoraire, le conseiller d'ƒtat JŽr™me Bignon, et d'un tuteur onŽraire, le procureur Nicolas Sauvage. Son curateur resta seul chargŽ de diriger toutes ses affaires litigieuses, et notamment les procs dont il avait dŽjˆ une assez grande quantitŽ ; l'un d'eux ne tarda pas d'ailleurs ˆ aboutir heureusement ˆ un arrt du parlement de Rouen, qui condamna les crŽanciers du duc de Brissac ˆ lui rembourser quatre-vingt-douze mille livres [389].

Le 18 mai, ˆ la veille de partir pour l'armŽe, Louis de Saint-Simon passa une procuration gŽnŽrale au nom de sa mre, et, le 9 juillet suivant, Žtant au camp de Lesheylesem (sic), il passa encore, par-devant les greffiers de la marŽchaussŽe des armŽes de Flandres, une procuration pour prendre livraison des titres de la succession paternelle [390].

Ce ne fut qu'au printemps suivant, le 5 mars 1694, qu'il rendit hommage entre les mains du chancelier, pour son duchŽ, pour les fiefs de Saint-Louis et du Marais de Saint-Simon, et pour la comtau de Blaye [391]. Aprs cette formalitŽ, il ne lui restait plus qu'ˆ prendre sŽance au Parlement comme duc et pair ; mais on ne pouvait s'y faire recevoir avant l'‰ge de vingt-cinq ans, et nous verrons qu'il attendit mme jusqu'en 1702.

 

Notes de fin



[1] La sŽrie @ https://archive.org/search?query="Boislisle",+MŽmoires+de+saint-simon

[2] MŽmoires, ci-dessus, p. 152 et 202.

[3] Nouvelle biographie gŽnŽrale, article Saint-Simon, par M. J.-J. Weiss, tome XLIII, col. 105.

[4] Voyez ci-aprs, p. 399-400.

[5] Ç Est ˆ noter que le Vermandois Žtoit lors de grande et ample Žtendue, contenant la plupart de Picardie en soi, jusqu'en Artois et au CambrŽsis, et enclouant le pays et comtŽ de Valois : qui fut une belle conqute pour la couronne et un assurŽ rempart pour la Gaule. È Bclleforest, Grandes annales (1579), fol. 422.

[6] Aujourd'hui aux Archives nationales, registre cotŽ JJ 23

[7] Recueil des Rois de France, Ždition de 1580, p. 72. Ñ Le texte latin a ŽtŽ publiŽ en entier dans le tome XIII du Recueil des historiens de la France (1778), p. 415-417 ; mais le P. Labbe, jŽsuite, en avait donnŽ une partie ds 1651, dans les MŽlanges curieux qui se trouvent ˆ la suite de ses Eloges historiques des rois de France, p. 684.

[8] Herbert IV, dont on place la mort en 1080.

[9] Frarius et Frarin, dans le texte original.

[10] Belleforest, dans ses Grandes annales (1579), fol. 421-422, a commentŽ le texte du document et expliquŽ ˆ sa manire cette intercalation dans le cartulaire de Philippe-Auguste. Avant Jean du Tillet, il n'y avait que des annalistes ou des gŽnŽalogistes fort peu autorisŽs, Paradin, Bouchet, Jean le FŽron, qui eussent parlŽ des Vermandois.

[11] Il n'y a que ceci dans le latin : Ç Odo Frarius, qui fuit pater Johannis de Sancto Simone, qui adhuc vivit ; È et plus loin : Ç Ab eodem Odone exivit alius Odo Frarin et de Odone filio exivit Johannes de Sancto Symone. È

[12] Les descriptions d'armoiries, qui n'existaient pas dans les premires Žditions du Recueil des Rois de France, ne se trouvent que dans celle de 1607 ; voyez p. 322.

[13] MŽmoires, ci-dessus, p. 146. Le travail de d'Hozier devait peut-tre aussi servir ˆ faire recevoir dans l'ordre de Malte le frre cadet du premier Žcuyer ; voyez ci-aprs, p. 427.

[14] Lorsque le duc Claude-Anne de Saint-Simon fit faire ˆ Madrid, en 1808 une gŽnŽalogie dont nous parlerons plus loin (p. 405), il avait cette pice entre les mains, avec les autres papiers de la famille, et il offrait de la communiquer aux personnes dŽsireuses de vŽrifier l'authenticitŽ de la filiation.

[15] MŽmoires, ci-dessus, p. 139 et note 3.

[16] Isaac de Saint-Simon (de la branche a”nŽe) descendait de Louis le Gros par Marie de SaarbrŸck, et la branche de Rasse (branche ducale) se trouvait aussi cousine des Bourbons par l'alliance du bisa•eul de Claude avec Antoinette de Mailly. Voyez ci-aprs nos tableaux gŽnŽalogiques. Les dŽdicaces de d'Hozier trahissent bien clairement son dŽsir de gagner les bonnes gr‰ces du favori.

[17] Histoire de SablŽ, p. 130

[18] Quittance signŽe le 30 juin 1635, par Isaac de Saint-Simon, au Cabinet des titres, dossier Rouvroy, pices originales. Voyez les MŽmoires, tome XIII, p. 389-391, sur le traitŽ d'union signŽ en 1649 par cent soixante-sept Ç seigneurs de la plus haute noblesse de France. È La premire signature : Saint-Simon Vermandois, que notre auteur croit tre celle de son oncle, nous parait venir plut™t du chef de la branche a”nŽe, qui prit encore le nom de Vermandois dans ses productions de noblesse de 1667, tandis que nous ne voyons nulle part que le marquis Charles de Saint-Simon l'ait jamais portŽ. Nous reviendrons sur ce point, en temps et lieu.

[19] Ci-aprs, appendice n¡ II, p. 438.

[20] Il ne faut pas oublier que le texte de ces lettres Žtait presque toujours prŽparŽ et fourni ˆ la chancellerie par l'impŽtrant. Voyez, dans les MŽmoires, tome VI, p. 320, comment le marŽchal de Boufflers adjoignit Saint-Simon et MM. de Lamoignon au secrŽtaire d'ƒtat la Vrillire pour dresser ses lettres de duc et pair ; et tome VII, p. 263, comment Villars employa au mme usage son beau-frre le prŽsident de Maisons.

[21] Jean de Saint-Simon, seigneur de Rouvray ; Alphonse de Saint-Simon, aussi seigneur de Rouvray, et enfin Mathieu de Saint-Simon de Rouvray, sont citŽs dans ces lettres.

[22] Voyez les tableaux dressŽs d'aprs du Bouchet et du Chesne, dans le dossier Rouvroy, au Cabinet des titres.

[23] La vŽritable origine de la seconde et de la troisime lignŽe de la maison royale de France, par J. du Bouchet (1646), p. 18-20.

[24] Auteur de la GenealogiÏ francic¾ plenior assertio (1654)

[25] Cet auteur, qui fit para”tre en 1667 un volume in-folio sur les Grandeurs de la maison de France, devait appartenir ˆ une famille de ministres rŽformŽs habitant Senlis, et dont parle la France protestante.

[26] Voyez le travail fourni au duc de Saint-Simon, en juin 1651, par Loberan de Montigny, dans les papiers de du Chesne conservŽs ˆ la Bibliothque nationale, vol. 17, p. 547 et 555-578.

[27] Cette notice se trouve dans le ms. Clairambault 1140, fol. 55-72.

[28] Cette famille Žtait du Vermandois : il y avait ˆ la collŽgiale de Saint-Quentin un chanoine du nom de Jean de Maubreuil, qui mourut vers la fin de l'annŽe 1682. Sous Louis XV, nous retrouvons, en 1718 et en 1726, un Maubreuil intendant et secrŽtaire du duc de Saint-Simon.

[29] Bibliothque nationale, mss. du Chesne, vol. 17, fol. 523-553. Le mŽmoire est datŽ du 25 aožt 1655.

[30] Histoire gŽnŽalogique de la maison de France (1647), tome I, p. 371.

[31] Tableaux gŽnŽalogiques de la maison de France (1649), p. 50-52 et 170.

[32] Un des meilleurs tableaux gŽnŽalogiques du dossier Rouvroy, fol. 13-21, est fait Ç selon le sieur Maubreuil, bailli de Saint-Simon, 1663 È ; et ailleurs, fol. 9, on trouve encore des ÇNotes extraites de la gŽnŽalogie imprimŽe, 1663È.

[33] Nous remarquons, sans rien conclure d'ailleurs de ce rapprochement, que le receveur du duchŽ de Saint-Simon, en 1642, s'appelait Artus Timmerman Carpentier (deux fois le mme nom ; le bas allemand Timmerman signifie Charpentier).

[34] Ou Histoire de Cambray et du CambrŽsis.... enrichie des gŽnŽalogies..., p. 977-988 ; publiŽe en 1661, et rŽŽditŽe en 1668.

[35] Belleforest (Grandes annales, fol. 421 v¡) avait dŽjˆ contestŽ la validitŽ de l'exhŽrŽdation. Ç .... Je laisse, disait-il, ˆ dŽvider cette fusŽe aux lŽgistes et jurisconsultes, s'il Žtoit loisible ˆ ces barons de disposer d'un hŽritage qui ne dŽpendoit d'eux, et faire la part au chef de la justice de leur terre, et si l'tre de grossier entendement, ou un peu fainŽant, est suffisante occasion de priver un prince de son hŽritage. È

[36] Ç Un homme de la cour qui n'a pas un assez beau nom, doit l'ensevelir sous un meilleur ; mais, s'il l'a tel qu'il ose le porter, il doit alors insinuer qu'il est de tous les noms le plus illustre, comme sa maison, de toutes les maisons, la plus ancienne.... Quelques-uns riront.... mais il les laissera rire ; d'autres en feront des contes, et il leur permettra de conter : il dira toujours qu'il marche aprs la maison rŽgnante, et, ˆ force de le dire, il sera cru. È Voilˆ bien le cas de Claude de Saint-Simon et de son nom royal de Vermandois. Nous ne voulons pas dire que la Bruyre l'ait eu en vue plut™t que tout autre prŽtendant de mme nature ; mais le rapprochement est trs-admissible. Ne pouvant Ç tenir aux princes lorrains, aux Rohans, aux Ch‰tillons, aux Montmorencis, È non plus que parler Ç de ducs, de cardinaux et de ministres, È les Rouvroy cherchaient ˆ Ç ensevelir leur nom sous un meilleur. È (Caractres, tome I, p. 305.)

[37] Le mot est de Marmontel, Histoire de la RŽgence, dans les Îuvres compltes, Žd. de 1819, tome XVIII, p. 58. Montalembert a dit : Ç Il n'est bien ˆ son aise pour louer la naissance que des familles Žteintes ; celles-lˆ ne font pas de jaloux. È ("La nouvelle Ždition de Saint-Simon", dans le Correspondant, 25 janvier 1857, p. 19-20.)

[38] Auteur du livre des Stemmata Lotharingi¾ ac Barri ducum, solennellement condamnŽ et lacŽrŽ en 1583.

[39] C'est ce que dit une rŽponse au mŽmoire de Saint-Simon sur les prŽrogatives des ducs, publiŽ ˆ la suite des MŽmoires, tome XIX, p. 368 : ÇL'auteur de ce mŽmoire ne doit sa grandeur qu'au tonnerre.... Peut-tre cependant que, prŽvenu et flattŽ par le petit cartouche qui est au bas de l'arbre gŽnŽalogique de la maison de France donnŽ par Thuret, il se croit descendu des anciens comtes de Vermandois. En ce cas, il pourroit disputer avec une maison souveraine de l'Europe les prŽtentions chimŽriques ˆ la couronne de France. È (Ms. Clairambault 1140, fol. 39.) On verra plus loin (p. 396) ce que signifie cette allusion aux armes que le prieur de Homblires, Antoine Thuret, avait donnŽes ˆ la race des comtes de Vermandois, dans sa Table chronologique et gŽnŽalogique des rois de France (1687 et 1706).

[40] Le comte de Saint-Simon Sandricourt (voyez ci-aprs, p. 422), ˆ qui certes l'on ne peut contester une ardeur pour l'action, un amour de l'humanitŽ, une activitŽ de pensŽe peu ordinaires, et qui ežt pu, dans d'autres circonstances, employer utilement pour son pays les facultŽs dont la nature l'avait si merveilleusement douŽ, le comte de Saint-Simon, disons-nous, racontait lui-mme ce rve, cette hallucination : Ç A l'Žpoque la plus cruelle de la RŽvolution et pendant une nuit de ma dŽtention au Luxembourg, Charlemagne m'est apparu et m'a dit : "Depuis que le monde existe, aucune famille n'a joui de l'honneur de produire un hŽros et un philosophe de premire ligne. Cet honneur Žtoit rŽservŽ ˆ ma maison. Mon fils, tes succs, comme philosophe, Žgaleront ceux que j'ai obtenus comme militaire et comme politique". È (Voyez son article dans la Nouvelle biographie gŽnŽrale.)

[41] Jean le Carpentier avait publiŽ, en 1661, un magnifique volume consacrŽ ˆ la gŽnŽalogie de ces Sohier. Les documents qu'il produit en leur faveur ont une forme fabuleuse qui tient du grotesque.

[42] Voyez le tableau donnŽ ci-dessus, p. 387.

[43] On a lu plus haut, dans le mŽmoire de Maubreuil (p. 390), que ce Jean de Saint-Simon aurait fait transport de ses droits sur le Vermandois ˆ Philippe-Auguste, et que l'acte s'en trouvait au TrŽsor des chartes. La seule pice dont il soit restŽ trace (elle est perdue aujourd'hui) Žtait une caution (securitas) fournie au Roi, en dŽcembre 1215, pour Baudouin du Prat, par Jean de Saint-Simon, en compagnie de plusieurs chevaliers de Vermandois. Voyez le Recueil des historiens de la France, tome XVII, p. 106 et l'Inventaire des layettes du TrŽsor des chartes, par Teulet, tome I, p. 422 a.

[44] Ms. Clairambault 1140, fol. 26 et 51-53.

[45] Le second acte fut reprŽsentŽ en original en 1726, et Clairambault constata qu'il portait encore le sceau de Mathieu de Rouvroy, chargŽ d'une croix ˆ cinq coquilles.

[46] Maubreuil dit que le Borgne de Rouvroy, en 1371, rendant aveu de la terre de Saint-Simon, devenue fief seigneurial, l'appelle Ç ma terre et seigneurie.... possŽdŽe par mes a•eux et anctres. È Ces formules sont constantes dans les aveux, alors mme que le mari n'est propriŽtaire que par sa femme.

[47] Ms. Clairambault 1140, n¡ 13 et 14.

[48] Ms. Clairambault 1140, n¡ 19, et Titres scellŽs de la mme collection, vol. 99, n¡ 7669. Le P. Anselme (Ždition de 1712, p. 1020) donne les mmes armes, brisŽes d'un lambel, aux deux Renaud de Rouvroy, pre et fils, qui avaient gouvernŽ la Navarre avant Alphonse.

[49] C'est aussi un rameau de cette dynastie qui porta plus tard l'ŽchiquetŽ d'or et d'azur. Le P. Anselme dit que ce fut Robert le Grand, comte de Dreux, troisime fils de Louis le Gros, qui substitua l'ŽchiquetŽ aux fleurs de lis de la maison royale, sans mme en rien conserver sur le chef.

[50] Recueil des Rois de France, Žd. 1607, p. 322.

[51] Jean le Carpentier s'exprime ainsi : Ç Hugues le Grand trouva bon de s'emparer de ses armes [de sa femme Alix de Vermandois], qui Žtoient ŽchiquetŽ dÕor et d'azur, lesquelles il commanda ˆ sa postŽritŽ de porter, avec dŽfense aux descendants dudit Eudes de se les s'attribuer ˆ l'avenir, comme s'il ežt conjurŽ de les dŽpouiller de toutes les marques et caractres de leurs puissants progŽniteurs. È (Histoire de Cambray, p. 984.)

[52] G. Demay, Inventaire des sceaux de l'Artois, n¡ 317-349.

[53] A la clef de vožte de la chapelle construite par Gilles dans l'Žglise de Notre-Dame de Senlis, sur un sceau de 1475 gravŽ dans l'Histoire gŽnŽalogique du P. Anselme, tome IV, p. 396, et dans un vitrail dessinŽ pour Gaignires, ms. Clairambault 1140, fol. 31.

[54] Voyez ci-aprs, p. 423.

[55] Voyez Blanchard, ƒloges de tous les premiers prŽsidents du parlement de Paris, p. 43 ; Demay, Inventaire des sceaux de l'Artois, n¡ 663 et 1431, et l' Histoire gŽnŽalogique, tome IV, p. 408 et 410.

[56] Le sceau de Franois est plaquŽ sur un dŽnombrement de l'annŽe 1581, aux Archives nationales, P37, n¡ 326 ; celui de Louis Ier est figurŽ dans l'Histoire gŽnŽalogique, tome IV, p. 408.

[57] Voyez, au Cabinet des titres, pices originales de Rouvroy, le tableau des huit quartiers de noblesse prouvŽs en 1626, pour la rŽception de Louis de Saint-Simon, frre de Claude, dans l'ordre de Malte. Sur le tout sont encore les armes de PrŽcy. D'Hozier, dans le frontispice d'une des tables gŽnŽalogiques dont nous avons parlŽ plus haut (1631), transforme le losange de PrŽcy en ŽchiquetŽ ; mais, en 1634, dans la liste des chevaliers de l'Ordre nouvellement promus (p. 39 et 52), il consacre officiellement les nouvelles armes de Saint-Simon Vermandois.

[58] Voyez leurs cachets aux Archives nationales, KK 1218, fol. 409 verso, et ˆ la Bibliothque nationale, mss. MŽlanges Colbert, n¡ 116 bis, fol. 830.

[59] Recherches historiques de l'ordre du Saint-Esprit, par M. du Chesne, publiŽes en 1695, par Haudicquer de Blancourt, tome I, p. 338. Ces supports n'avaient pas toujours ŽtŽ les mmes. Dans le sceau de 1581 indiquŽ plus haut, ce sont deux griffons, et le casque n'est sommŽ que d'un bouquet de plumes. Gaignires nous a conservŽ (ms. Clairambault 1140, n¡ 54) le dessin d'un sceau de Jean de Rouvray (sic), Žcuyer, seigneur de Saint-Simon, chambellan du roi Louis XI et neveu du bailli Gilles, o l'Žcu, portant la seule croix de Rouvroy, est soutenu par deux sauvages qui tiennent, d'un c™tŽ, la bannire de Rouvroy, et, de l'autre, une bannire armoriŽe d'un lion. Mais la lŽgende : Jehan de Rouvray s. de Sainct-Simon [bailly] du Vermandois, fait douter de l'authenticitŽ de ce monument, qui, du reste, n'appartiendrait pas ˆ la branche des seigneurs de Rasse.

[60] Tables gŽnŽalogiques des maisons des ducs et pairs, par Saint-Martin (1664). Les Saint-Simon Sandricourt mirent Žgalement un quartier de Vermandois dans leurs armes (Histoire gŽnŽalogique, tome IV, p. 402, et Histoire de la maison de Montmorency, par du Chesne, p. 292 et 297) ; mais, quoique la branche a”nŽe ežt pris, ds 1635, le nom de Vermandois, elle ne fit figurer que les armes de Rouvroy pures et simples dans le jugement qui reconnut sa noblesse d'ancienne extraction, le 21 mai 1667.

[61] C'est ainsi qu'il les fit enregistrer dans l'Armorial gŽnŽral de 1696, graver sur son cachet, frapper sur ses livres et ses fameux portefeuilles ; ce sont celles enfin que lui donnent les continuateurs de l' Histoire gŽnŽalogique du P. Anselme, tome IV, p. 411, et tome IX, p. 284. Nulle part, nous n'avons vu qu'il employ‰t les supports ou le cimier ; l'Žcu est simplement entourŽ du manteau de pair et sommŽ de la couronne ducale.

[62] Voyez les passages citŽs ci-dessus, p. 390-392.

[63] Selon les rgles de l'art hŽraldique, les armoiries patrimoniales devaient tre mises en premier rang, au premier quartier de dextre, et celles des alliances au second.

[64] Ç Ce seroit ici le lieu d'expliquer mon nom et mes armes, et comment, avec un nom que je ne porte point, et la moitiŽ des armes que j'Žcartle, c'Žtoit prŽtendre en effet tre de ma maison : la parenthse en seroit trop longue ; elle se trouvera mieux parmi les Pices, pour ne pas interrompre le fil de la narration. È (MŽmoires, tome V, p. 428.) Ñ Nous avons tout lieu d'espŽrer qu'avant la publication du volume de notre Ždition o se trouvera ce passage, nous aurons eu communication, au DŽp™t des affaires Žtrangres, de la pice dont parle ici notre auteur.

[65] ƒd. de 1674, tome I, p. 63-64.

[66] ƒd. de 1712, tome I, p. 35 ; Žd. de 1726, tome I, p. 52-53.

[67] Le Palais de l'honneur (1686), p. 612-613 ; Histoire des grands officiers, 2e Žd., tome II, p. 1524, et 3e Žd., tome IV, p. 389-413. La mme gŽnŽalogie parut ˆ la fois, en 1712, dans la seconde Ždition du P. Anselme et dans la treizime Ždition du Dictionnaire de MorŽri. Seulement, le Dictionnaire, moins scrupuleux que les continuateurs du P. Anselme, plaa en tte de la gŽnŽalogie de Rouvroy celle de Vermandois. Quant au reste, les deux textes sont identiques. Avaient-ils ŽtŽ fournis aux uns comme aux autres par un seul et mme rŽdacteur, c'est-ˆ-dire par le duc de Saint-Simon ? C'est une supposition que vient appuyer l'identitŽ de certaines expressions dans les MŽmoires et dans la gŽnŽalogie. Avant 1712, le MorŽri ne parlait pas des Vermandois et ne donnait qu'un trs-court paragraphe sur les Saint-Simon.

[68] MŽmoires, tome XIX, pices diverses, p. 331.

[69] MŽmoires, tome XVI, p. 320 : Ç Je ne me donne pas pour tre gŽnŽalogiste, mais je suivrai Imhof, qui passe pour exact et savant sur les maisons allemandes, espagnoles et italiennes, et fort peu l'un et l'autre sur les franoises. Peut-tre que si nous connoissions autant ces maisons Žtrangres que nous faisons celles de notre pays, cet auteur n'auroit pas pris tant de rŽputation. È Comparez tome III, p. 109.

[70] Ouvrage publiŽ en 1687, p. 198.

[71] Ç Accessit demum in memoriam originis Veromandensis hoc etiam deigma, scutum videlicet e caeruleo et auro tessellatum, cum cephalo liliis francicis sparso. È

[72] Ouvrage publiŽ en 1691 ; p. 176 (paginŽe par erreur 376).

[73] Il publia, en 1678, l' Histoire gŽnŽalogique des familles de la Croix de Chevrires.... et de Rouvroy. Le comte de Saint-Vallier (de la Croix de Chevrires) avait ŽpousŽ une Rouvroy du Puy (MŽmoires, tome II, p. 213).

[74] Nobiliaire de Picardie (1693 et 1695), p. 488-490. Il remonte jusqu'ˆ Olivier, seigneur de Rouvroy, chevalier, vivant l'an 1060.

[75] La rŽunion, dans les collections de Clairambault, d'un trs-grand nombre de pices concernant la gŽnŽalogie de Saint-Simon prouve que ce gŽnŽalogiste et son prŽdŽcesseur Gaignires s'occuprent de ce sujet, particulirement des points contestables. L'un comme l'autre, ils se sont abstenus de toute conclusion : c'est une forte preuve de leur respect pour le duc et pair, de leur dŽfŽrence pour un confrre en curiositŽ et en Žrudition. Clairambault est celui ˆ qui Saint-Simon fit communiquer les titres des Ç prŽtendus Rouvroy, È et, selon les MŽmoires (tome V, p. 431), il rŽpondit qu'il n'y aurait Ç jamais ombre de la moindre preuve, ni mme de remonter bien haut. È

[76] 4. L'un dit (Chansonnier, ms. Fr. 12 696, p. 147) : Je prends ce roquet au menton, Et je lui fais voir son grand-pre.

Un autre : Le petit duc de Saint-Simon Voudroit bien payer de son nom Pour le service de ses pres. On ne sauroit dire, hŽlas ! Aussi bien on n'en connoit gure ; Pour mieux dire, on n'en connoit pas.

Un autre encore : Saint-Simon, si fier de son rang Ne s'occupe que de son titre. Il est fripon, poltron, bŽlitre. Aussi sort-il d'un vilain sang.

Voyez une note des Žditeurs du Journal de Dangeau, tome XVIII, p. 396-398.

[77] Relation de la sŽance du 2 septembre 1715, par l'avocat PrŽvost.

[78] Voyez les MŽmoires, tome X, p. 394 et suivantes.

[79] Mort en 1694. L'article Saint-Simon est ainsi conu dans ces gŽnŽalogies : Ç Rouveron (sic) de Saint-Simon (il s'agit du duc Claude) est une petite noblesse. La dame de Saint-Simon est de pitre mine et de pauvre esprit. Le marŽchal de Bassompierre l'appeloit petit punais. Une tante paternelle de ce duc avoit ŽpousŽ un sergent de village, prs de Senlis, et une autre avoit ŽpousŽ un greffier, aussi de village. È Voyez le Cabinet historique. tome V, p. 98, et tome VI, p. 70.

[80] Voyez ci-aprs, p. 418..

[81] Voyez ci-dessus, p. 397

[82] 6. Nous ne savons de quelle gŽnŽalogie le libelle veut parler.

[83] C'est une allusion au mariage de Nicolas, comte de Saint-Simon (voyez ci-aprs, p. 409), avec Marie le Bossu de Charenton (1690), d'o une fille unique, mariŽe par sa mre, en mai 1710, ˆ l'avocat Billard de Laurire, fils d'un juge criminel de Mayenne et d'une le Bossu ; tout cela, de trs-petite bourgeoisie de robe. Ñ Cette partie du libelle, inintelligible sans un tableau gŽnŽalogique, a ŽtŽ Žtrangement dŽfigurŽe, soit dans les copies manuscrites, dont on possde une assez grande variŽtŽ, soit dans les textes imprimŽs, comme ceux de la Vie privŽe de Louis XV ou du Recueil A-Z.

[84] Addition au Journal de Dangeau, 29 avril 1716, tome XVI, p. 371.

[85] Ce mŽmoire a ŽtŽ publiŽ dans le Recueil A-Z, tome C, p. 73, et ailleurs.

[86] C'est du Nobiliaire de Picardie, p. 489, qu'on avait tirŽ cette rŽponse.

[87] Voici ce qu'Žcrivait, en mai 1716, un dŽfenseur de la pairie, bien instruit ˆ l'endroit des vieilles maisons, mais franc et vŽridique : Ç On sait que M. le duc de Saint-Simon est de la maison de Rouvroy ; on ne sauroit donc attaquer sa naissance. NŽanmoins, s'il tire de lˆ sa vanitŽ, il a tort. Si une fille de sa maison s'est mŽsalliŽe, si son pre, au rapport de Bassompierre, Žtoit punais, qu'est-ce que cela fait ˆ sa noblesse ? Le marŽchal de Schonberg (?) a pu avoir un Rouvroy pour Žcuyer ; le connŽtable de Montmorency avoit bien un Courtenay pour page, etc. È (Lettre publiŽe par les Žditeurs du Journal de Dangeau, tome XVIII, p. 393-405.)

[88] MŽmoires, tome VI, p. 272, et tome XII, p. 313. Voyez aussi (tome X, p. 77-79) ce qu'il dit de la grande maison de Croy et de son attache avec les rois de Hongrie ; ce cas, tel qu'il le prŽsente, serait singulirement analogue ˆ celui que nous venons d'exposer. Ailleurs (tome XII, p. 14), il reproche ˆ Louis XIV de ne pas conna”tre exactement la valeur des familles.

[89] Ci-dessus, p. 399.

[90] Tome III, p. 379-389

[91] Dans ce premier volume, Carlier n'avait parlŽ qu'incidemment des premiers Vermandois, ˆ propos du bienheureux Simon de CrŽpy, oncle maternel d'Eudes l'InsensŽ, et il avait dit, Ç par mŽgarde, È qu'Herbert de Vermandois et Adle de CrŽpy (qu'il appelle Hildebrante) n'avaient eu d'autre enfant que la fille mariŽe ˆ Hugues le Grand. Ce serait l'examen du cartulaire de Longpont (dont il produit plusieurs extraits) qui l'aurait engagŽ ˆ faire amende honorable au profit des hŽritiers d'Eudes l'InsensŽ.

[92] Voyez plus loin, p. 413.

[93] Armand Baschet, le Duc de Saint-Simon, p. 261.

[94] Il fut un des correspondants zŽlŽs du Cabinet des chartes et devint membre associŽ de l'AcadŽmie des inscriptions en 1785.

[95] Tome I, p. 658 et suivantes.

[96] Il concluait ainsi : Ç La maison de Rouveroy (sic) Saint-Simon actuellement subsistante en France est la plus proche agnate des anciens comtes de Vermandois, et descend, de m‰le en m‰le, du sang de Charlemagne. È

[97] Ç Il est bien digne du zle que tŽmoigne pour la gloire de son nom Monsieur l'Žvque d'Agde, d'Žclaircir la suite, encore un peu embrouillŽe, de ses augustes anctres, de ramasser les anneaux de cette longue cha”ne et de les renouer et souder ensemble sous le feu et l'Žclat dŽmonstratif de chartes et des autres pices qu'il a colligŽes de toutes part. È

[98] Ce qui ne permet pas de croire que cette gŽnŽalogie ait ŽtŽ fournie par l'Žvque d'Agde, c'est que l'article de ses frres et sÏurs est le plus incomplet de tous.

[99] Tome XV (1786), p. 524-541.

[100] Il y devint duc en 1814 ; voyez ci-aprs, p. 420.

[101] C'est une brochure in-4¡ de iv-120 pages et un tableau gŽnŽalogique (1808). Le dŽpartement des ImprimŽs de la Bibliothque nationale n'en possde point d'exemplaire. Un seul est arrivŽ, par donation, au Cabinet des titres.

[102] Ci-dessus, MŽmoires, p. 280.

[103] On conna”t surtout Avitus par le panŽgyrique que nous a laissŽ de lui son gendre Sidoine Apollinaire. Bossuet avait rŽsumŽ son rgne en deux mots, dans le Discours sur l'histoire universelle : Ç Il fut au-dessous de sa rŽputation. È AmŽdŽe Thierry a retracŽ sa biographie dans un article de la Revue des Deux Mondes, 1er mars 1852. Il n'est pas prouvŽ que saint Arnoul, Žvque de Metz, fžt le fils ou le descendant d'Avitus, quoique l'avocat auvergnat Audigier ait prŽsentŽ celui-ci, en 1676, dans son Origine des Franois, comme l'auteur commun des deux races carolingienne et capŽtienne ; mais, mme en Allemagne, certains Žrudits admettent que saint Arnoul Žtait le trisa•eul paternel du roi PŽpin, et qu'il appartenait ˆ la famille gallo-romaine et sŽnatoriale du patricien Tonantius Ferreolus, gendre du prŽfet Syagrius. Cette opinion s'appuie sur une gŽnŽalogie, ˆ demi officielle, dressŽe au temps de Charles le Chauve ; voyez les Monumenta Germani¾ historica, Žd. de Pertz, tome II, p. 308-312, et WarnkÏnig et GŽrard, Histoire des Carolingiens, tome I, p. 113.

[104] Ajoutons que d'ailleurs la gŽnŽalogie espagnole de 1808 contient des documents authentiques que le marquis de Saint-Simon avait emportŽs en Žmigration ; on y retrouve particulirement, sur notre auteur, sur son titre ducal, sa grandesse, ses hŽritiers, et sur les deux branches qui subsistent aujourd'hui du nom de Saint-Simon, une foule de dŽtails et de pices que nous aurons l'occasion d'utiliser.

[105] C'est le mot de Saint-Simon sur les Brissac ; ci-dessus, p. 208.

[106] Certaines gŽnŽalogies, qui semblent faites par les Rouvroy que rŽpudiait notre auteur, commencent ˆ un Raoul vivant sous Herbert II, comte de Vermandois, et d'o seraient venus, d'une part, ces Rouvroy, et, d'autre part, Mathieu le Borgne. (Cabinet des titres, dossier Rouvroy, fol. 19, 41 et 52.)

[107] Selon ces auteurs, Jean Ier de Saint-Simon, celui qui aurait renoncŽ ˆ ses droits en faveur de Philippe-Auguste, eut quatre fils, mentionnŽs en 1217 dans le cartulaire de Longpont. L'a”nŽ aurait fait la branche finie en la personne de Marguerite de Saint-Simon ; le second, Oger, Žpousant l'hŽritire d'un seigneur de Rouvroy, aurait pris le nom de cette terre, ainsi que ses descendants, Mathieu, Jarremond, Guy, et enfin Jean, lequel serait appelŽ ˆ tort Mathieu par le P. Anselme. Le tout rŽsulterait d'actes authentiques du cartulaire de Longpont, qui expliqueraient Žgalement la rŽunion des deux rameaux par l'alliance de Marguerite de Saint-Simon avec Jean (ou Mathieu), dit de Rouvroy. Mais aucun de ces actes ne se retrouve, soit dans les trois cartulaires de Longpont que nous avons vus ˆ la Bibliothque nationale, soit dans la chronique de l'abbaye, publiŽe par Muldrac (1646), et ils ne concordent nullement avec les pices dont Clairambault nous a transmis le texte, et qui seules nous semblent authentiques.

[108] Dictionnaire historique du dŽpartement de l'Aisne, par Mellevillc, tome II, p. 330 ; Colliette, MŽmoires du Vermandois, tome I, p. 660.

[109] Montalembert, "La nouvelle Ždition de Saint-Simon", dans le Correspondant, 25 janvier 1857, p. 40.

[110] Carlier a racontŽ l'histoire du bienheureux Simon, dans son Histoire du Valois, tome 1, p. 307-326, d'aprs le P. Labbe et les chroniqueurs.

[111] Il a paru vingt volumes de cette Ždition ; le vingt et unime comprendra, sous forme de supplŽment, une sŽrie de lettres de Saint-Simon et de pices diverses ˆ ajoutera celles qui ont dŽjˆ pris place dans le tome XIX, et de plus la Notice biographique sur Claude de Saint-Simon. La table analytique, prŽparŽe par M. Paul GuŽrin, formera le tome XXII et dernier.

[112] Ci-dessus, p. 143.

[113] Guillaume, fils de Gilles, Žpousa l'hŽritire du premier prŽsident Jean de la Vacquerie, dont les MŽmoires (tome X ; p. 401) rappellent les titres glorieux, sans laisser souponner d'ailleurs cette relation directe de parentŽ. De mme, MŽry, fils a”nŽ de Guillaume, Žpousa la fille d'un des personnages les plus puissants, sinon les mieux famŽs de son temps, le chancelier du Prat.

[114] Les circonstances de cette transmission de la charge de bailli ne sont pas bien clairement expliquŽes dans les mŽmoires et journaux du temps publiŽs par Adhelm Bernier, sous le titre de Monuments inŽdits de l'histoire.... de Senlis (1835) ; mais tous les rŽcits s'accordent sur le r™le jouŽ en cette occasion par les Saint-Simon.

[115] Ç Parce que son pre y avoit ŽtŽ bailli, È disent les rŽcits du temps

[116] Notamment le Journal de Mollet et le RŽcit vŽritable, publiŽs par Adh. Bernier, dans ses Monuments inŽdits de l'histoire de.... Senlis. Comparez le PrŽcis statistique sur le canton de Senlis, par Graves, p. 69.

[117] Histoire gŽnŽalogique, Žd. 1712, p. 1524-1533, au chapitre des Grands louvetiers ; Žd. 1729, tome IV, p. 410.

[118] Cette gŽnŽalogie dit que Franois de Saint-Simon figurait comme marŽchal de camp ˆ la prise de Saint-Denis en 1591, et que Louis de Saint-Simon Ç servit le roi Henri IV en toutes ses guerres depuis son avnement ˆ la couronne, se trouva ˆ la bataille d'Ivry et au sige de Paris en 1590, ˆ celui de Rouen en 1592, et, en 1597, ˆ celui d'Amiens. È Or, jusqu'en 1592 tout au moins, le RŽcit vŽritable et le Journal de Mallet prouvent l'un et l'autre que les deux Saint-Simon ne cessaient d'escarmoucher avec les royalistes de Senlis, de leur dresser des embuscades, et que le Plessis-de-Rasse Žtait une des retraites des ligueurs. Il faut donc entendre que, si le pre et le fils, selon l'expression des MŽmoires, Ç suivirent toutes les guerres de leur temps, È ce ne fut pas dans les rangs du parti royaliste, o d'ailleurs se trouvaient d'autres Saint-Simon, par exemple Titus de Saint-Simon, de la branche a”nŽe, qui combattit avec les royalistes ˆ la bataille de Senlis (17 mai 1589), et qui, ce sont encore les mmes termes, Ç servit le roi Henri IV en toutes ses guerres. È (Histoire gŽnŽalogique, tome IV, p. 400.)

[119] Franois de Saint-Simon testa au Plessis le 14 fŽvrier 1618, et y mourut le 17 octobre 1620.

[120] Voyez notre tome II, p. 33.

[121] Il devait tre nŽ vers 1568.

[122] Voyez ci-dessus, p. 415.

[123] Pour concilier la date de 1606, que les MŽmoires donnent trois fois sur quatre, avec celle de 1607, qui est adoptŽe gŽnŽralement par tous les gŽnŽalogistes, sauf peut-tre Charles-RenŽ d'Hozier, on peut considŽrer 1606 comme date de la naissance, 1607 comme date du baptme. Voyez ci-dessus, p. 23, note 2, et p. 137 et 350.

[124] Voir ci-dessus, p. 415, 426-427, et ci-aprs, p. 434.

[125] Ordonnance de Moulins (1560), article 112.

[126] Louis XIV lui-mme dit qu'en 1666 (voyez ses MŽmoires, Žd. Dreyss, tome I, p. 170), on y recevait Ç toutes sortes de personnes, È sans s'occuper aucunement de leur instruction, et qu'Ç un homme de qualitŽ ne croyoit plus y pouvoir entrer. È

[127] Nouvelles lettres de Madame la duchesse d'OrlŽans, publiŽes par G. Brunet, p. 146.

[128] MŽmoires de Pontis, p. 518-521.

[129] Ci-dessus, p. 143-144.

[130] Historiettes, tome II, p. 243.

[131] CitŽ par M. ChŽruel, dans Saint-Simon considŽrŽ comme historien, p. 101. Ñ Une autre pice du mme genre, la rŽponse au mŽmoire de Saint-Simon sur les prŽrogatives des ducs (1722), renferme une allusion moins intelligible : il Ç ne doit sa grandeur qu'au tonnerre, dont le ma”tre avoit grand'peur, et le page aucune ; cette fatale occasion (?) fut celle de sa fortune et de son ŽlŽvation. È (Ms. Clairambault 1140, fol. 39.)

[132] Ç Tous les premiers valets de chambre et tous les premiers valets de garde-robe Žtoient comme de petits favoris. È (Historiettes, tome VI, p. 194.)

[133] Richelieu a dŽtaillŽ longuement, dans ses MŽmoires (tome I, p. 425-429), les griefs qu'il avait contre Baradat, Ç jeune homme de nul mŽrite, venu en une nuit comme un potiron, non Žlu, mais.... reu du Roi. È

[134] Le Vassor, Histoire du rgne de Louis XIII, tome III, p. 81.

[135] Bassompierre, Journal de ma vie, tome III, p. 282.

[136] Tallemant, Historiettes, tome II, p. 244

[137] Îuvres de Malherbe, Ždition des Grands Žcrivains, tome III, p. 573.

[138] Beringhen l'acheta plus tard quatre cent mille livres.

[139] Historiettes de Tallemant, tome II, p. 139.

[140] Cet h™tel, situŽ ˆ l'est du Louvre, sur le bord de la Seine, servait de dŽpendance au palais, et le premier Žcuyer y avait son habitation.

[141] Le P. Anselme donne la date du 11 juin 1627 ; mais, d'aprs les documents conservŽs aux archives de Senlis, et que M. Flammermont a consultŽs pour nous, les provisions furent expŽdiŽes le 13 janvier 1627, et l'installation solennelle eut lieu le 7 dŽcembre. Ds le 10 juin 1620, M. de Saint-Simon avait ŽtŽ pourvu de la charge de ma”tre particulier des eaux et forts du bailliage de Senlis. (Bib. nat., ms. Fr. 20 293, n¡ 413.)

[142] Pension de quatre mille livres (1630), don de treize mille livres sur les salines de Peccais (1632), de douze mille livres sur l'ƒpargne (1634), etc.

[143] Cette charge venait aussi de la dŽpouille de Baradat.

[144] Sur cette dernire charge, voyez notre appendice IX. Le gouvernement de Meulan fut donnŽ ˆ Saint-Simon le 27 mai 1630, en remplacement d'un ancien ami du Roi, le marquis de Grimaud, qui venait de pŽrir en duel.

[145] Îuvres de Malherbe, tome IV, p. 68 et 77 ; Histoire du roi Louis XIII, par Ch. Bernard, liv. XI, p. 30 et 40 ; Mercure franois, annŽe 1627, p. 214-223, etc.

[146] Histoire de Louis XIII, liv. XII, p. 68 et 111 ; Mercure franois, 1628, p. 704 et 707 ; Histoire de la ville de Paris, par FŽlibien et Lobineau, t. II, p. 1344-1345, et tome V, p. 581 a et 583 a.

[147] L'historiographe Charles Bernard (Histoire de Louis XIII, liv. XII, p. 98) s'exprime en ces termes, ˆ propos de l'arrivŽe d'un corps de deux mille gentilshommes au quartier royal : Ç Le Roi commanda pareillement au sieur de Saint-Simon, son premier Žcuyer et premier gentilhomme de sa chambre, de se tenir prs de lui pour combattre en sa troupe, car la sagesse de ce gentilhomme, bien que fort jeune, avec la douceur de ses mÏurs et une probitŽ qui paroissoit en toutes ses actions, que ce grand monarque avoit dressŽ lui-mme, lui avoient procurŽ le premier degrŽ de faveur auprs de Sa MajestŽ. È

[148] Brevet du 30 dŽcembre 1628. Toutes les pices relatives ˆ cette concession se trouvent rŽunies, aux Archives nationales, dans le carton M 536 et dans le carton K 194, nos 39-41.

[149] Contrat passŽ ˆ la Rochelle, le 17 novembre 1628. dans la maison o logeait le Roi.

[150] Lettres patentes du 2 juin 1629.

[151] En vertu de lettres royales donnŽes ˆ Privas, le 7 octobre 1635, Ç eu Žgard ˆ ses recommandables services. È

[152] Une portion des terrains fut absorbŽe par les fortifications nouvelles, et Louis de Saint-Simon toucha, de ce chef, le 22 mars 1697, plus de trente mille livres. En 1700, il renouvela bail pour l'exploitation de ses droits domaniaux et seigneuriaux, sur le pied de cinq mille livres ; en 1771, sa petite-fille, Mme de Valentinois, en tirait sept mille livres.

[153] En revanche, les relations Žtaient trs-difficiles avec une si grande multitude de tenanciers et de censitaires, particulirement avec les congrŽgations religieuses, carmes, oratoriens, etc., Žtablies sur divers points du fief. On ne saurait nombrer les procs que Claude de Saint-Simon et son fils eurent ˆ la Rochelle ; il en est restŽ beaucoup de factums intŽressants, dans quelques-uns desquels nous aurons l'occasion de retrouver les traces de l'intervention personnelle de notre auteur, de son humeur assez processive et de son expŽrience en chicane.

[154] On remarquera que, dans un passage des MŽmoires (tome III, p. 187), il s'Žlve fortement contre toute attribution de la grandesse espagnole ˆ une terre sise en France : Ç opŽration, dit-il, ˆ laquelle on ne peut donner de nom. È

[155] Lettres du mois de mai 1724.

[156] Voyez ci-dessus, appendice n¡ I, p. 421, et le livre de M. Baschet sur le Duc de Saint-Simon, p. 179-180.

[157] On verra dans l'appendice IX, o nous parlons plus longuement de Blaye, comment Claude de Saint-Simon reut, en 1632, la jouissance de la comtau de Blaye et de la seigneurie de Vitrezay. La capitainerie de Saint-Germain et Versailles comportait Žgalement la jouissance de la seigneurie du Pecq, du bois de Fourqueux et du domaine de Saint-Germain mme, ce qui faisait, selon le Journal d'Olivier d'Ormesson (tome I, p. 286), un revenu de dix ˆ douze mille livres de rente. M. de Maisons paya cette capitainerie quarante-trois mille Žcus.

[158] Ainsi, en 1635, il eut la concession de tous les Ç bateaux ˆ selle et ˆ laver lessive È qui couvraient la Seine dans l'Žtendue de Paris et des faubourgs ; mais l'Žchevinage intervint activement pour protŽger les intŽrts des laveuses, et l'on s'en tira sans doute moyennant une compensation d'argent pour le concessionnaire. (Registres de l'H™tel de ville.)

[159] Ci-dessus, p. 154 : Ç Il fut toujours modeste et souverainement dŽsintŽressŽ, il ne demanda jamais rien pour soi, etc. È

[160] Ci-dessus, p. 150.

[161] Contrat passŽ le 13 septembre 1634, devant le Cat et le Semelier, notaires au Ch‰telet

[162] Il avait portŽ le nom de cette terre, et s'Žtait appelŽ jusque-lˆ tant™t Saint-Simon Vaux, tant™t Saint-Simon Rouvray.

[163] Voyez la gŽnŽalogie, ci-dessus, p. 409.

[164] Acte passŽ devant le Semelier et le Cat, notaires au Ch‰telet de Paris, le 12 janvier 1635. Voyez Colliette, MŽmoires pour servir ˆ l'histoire du Vermandois, tome 1, p. 670.

[165] L'abbŽ de Dangeau, dans une notice chronologique sur le duchŽ de Saint-Simon (ms. Fr. 22 720, fol. 38), raconte ˆ peu prs comme les MŽmoires de quelle manire Claude de Saint-Simon obtint cette suprme consŽcration de sa faveur : Ç ƒtant premier Žcuyer et premier gentilhomme de la chambre, voyant que Puylaurens allait tre duc, il dit au Roi : "Sire, je n'aurois jamais osŽ demander cet honneur ˆ Votre MajestŽ ; mais, puisqu'elle le veut accorder au favori de Monsieur son frre, je crois qu'un homme que Votre MajestŽ honore de ses bonnes gr‰ces, le doit avoir pour l'honneur de Votre MajestŽ". Le Roi eut bien de la peine ˆ l'obtenir du cardinal de Richelieu ; il fallut qu'il s'y opini‰tr‰t. È

[166] Tome IV, p. 389.

[167] On les trouve dans les registres des cours o la transcription de ces lettres Žtait obligatoire, et dans divers recueils, tels que ceux de l'abbŽ de Dangeau, mss. Fr. 22 716, fol. 84, et 22 720, fol. 58.

[168] Ci-dessus, p. 388, note 6.

[169] D'autres textes portent : Rouvroy. Cette variante en ay se trouve dans tous les temps.

[170] Gazette de 1635, p. 60.

[171] Voyez l'Žpisode des lettres du marŽchal duc de Boufflers, tome VI, p. 320.

[172] Fait duc-pair en fŽvrier 1634, par renouvellement de la crŽation primitive de 1581, et reu le 14 mars suivant.

[173] Le comtŽ de la Rochefoucauld avait ŽtŽ ŽrigŽ en duchŽ-pairie au mois d'avril 1622.

[174] MŽmoires, tome VII, p. 264, tome VIII, p. 314, 352 et suivantes, et tome X, p. 86-87, 145 et suivantes

[175] Ci-dessus, p. 407.

[176] Nous n'avons trouvŽ jusqu'ici qu'une pice notariŽe du 30 avril 1699, qui fait conna”tre que Saint-Simon se prŽparait ˆ faire faire dans l'Žglise du chef-lieu de son duchŽ des rŽparations ŽvaluŽes ˆ onze cents livres.

[177] Ci-dessus, p. 152.

[178] Ç Cette dignitŽ, squelette le plus chŽri et le plus prŽcieux de tous les biens que je tienne des libŽralitŽs royales. ...È (MŽmoires, tome VIII, p. 388.)

[179] M. Armand Baschet a bien voulu nous communiquer l'analyse du contrat de vente, aujourd'hui conservŽ dans le minutier de Me Prudhomme, notaire ˆ Paris. Toutes les terres Žtaient alors affermŽes ˆ douze mille cinquante livres par an, et le prix de vente fut de quatre cent quarante et une mille livres francs (sic). Le mobilier du ch‰teau ne valait pas quatre cents livres.

[180] Celui-ci Žtait mort, pendant les opŽrations judiciaires, en 1633. Claude de Saint-Simon, qui avait pris le bail judiciaire du domaine ds 1632, resta seul adjudicataire, le 19 mai 1635, et consigna la somme le 14 juillet suivant. Voyez le dossier de l'adjudication, aux Archives nationales, Xib 9620. Il ne rendit hommage au Roi, de qui les deux ch‰tellenies relevaient ˆ cause de sa grosse tour de Chartres, que le 1er juin 1646. (Arch. nat., P 182, n¡ 293.)

[181] Voyez notre tome II, p. 14-15.

[182] Lettres patentes de novembre 1731, Žrigeant le comtŽ de la FertŽ-Vidame. (Arch. nat., P 2432, p. 617.)

[183] Cette ma”trise Žtait aux mains du bailli mme du seigneur, et Louis de Saint-Simon, gr‰ce aux ministres ses amis, put se faire confirmer un privilge si exceptionnel, si important pour la conservation de sa chasse et de ses bois. (Archives nationales, arrt du 11 fŽvrier 1708, E 789.)

[184] Ms. Clairambault 1131, fol. 83.

[185] Ci-dessus, p. 22, note 5.

[186] Transaction du 8 mai 1638.

[187] Voyez ci-dessus, p. 22, note 5. Aprs les deux personnages citŽs dans cette note, le titre de vidame de Chartres avait ŽtŽ portŽ par un calviniste important dans son parti, grand ennemi des Guises et du pouvoir royal, Jean de Ferrires-Maligny, dont la vie a ŽtŽ Žcrite en 1858, par M. de Bastard.

[188] Voyez les MŽmoires, tome II, p. 97-98.

[189] Lettres d'Žrection du mois de novembre 1731, enregistrŽes ˆ la Chambre des comptes le 11 septembre 1734. (Arch. nat., P2432, p. 617.) La petite-fille de Saint-Simon porta l'un et l'autre titre dans la maison de Valentinois.

[190] MŽmoires, tome I, p. 334, tome V, p. 35, et tome XII, p. 402-403.

[191] Quand il avait ŽtŽ nommŽ premier gentilhomme de la chambre, Richelieu s'Žtait empressŽ d'Žcrire cette lettre au Roi : Ç Je ne saurois assez tŽmoigner ˆ Votre MajestŽ la joie que m'a apportŽe la nouvelle que M. Bouthillier m'a mandŽe de l'honneur qu'il vous a plu faire ˆ Monsieur le Premier de le gratifier de la charge du feu sieur de Blainville. J'estime la rŽsolution qu'elle a prise en cela beaucoup meilleure que la premire qu'elle avoit de la supprimer. Quelque bien qu'elle fasse ˆ une personne qui a les conditions de Monsieur le Premier, sera toujours bien employŽ, l'ayant toujours connu si sincre, si reconnoissant en votre endroit, et si courtois envers tout le monde, que je rŽpondrois bien en mon propre et privŽ nom que jamais il n'en abusera. C'est le propre des rois, ˆ l'imitation de Dieu, de faire du bien ˆ leurs crŽatures, etc. È (Lettres du cardinal de Richelieu, tome III, p. 59.)

[192] On a deux portraits de Claude, dans la collection de lavis formŽe par Gaignires et Clairambault (ms. 1140, fol. 5 et 6, rŽpŽtŽs en double dans le ms. 1234, fol. 96 et 97) : l'un est fait par Simon Vouet, en 1634, et n'offre qu'une figure vulgaire ; l'autre, datŽ de 1672, le reprŽsente beaucoup plus vieux, en armure, et moins dŽsagrŽable. Il faut rapprocher de ces portraits les tŽmoignages des contemporains. Malherbe, dans la lettre citŽe plus haut (p. 433 et note 1), avait d'abord Žcrit : Ç Un sieur Simon, beau gar..., È puis a biffŽ ces deux derniers mots, avant de les achever. Tallemant le compare ˆ un ramoneur (Historiettes, tome IV, p. 463), et dit ailleurs qu'il Ç n'y a point d'ŽpŽe dans son baudrier bleu È (ibidem, tome VII, p. 454). Bassompierre le qualifie, comme on sait, de Ç petit punais È, et, dans le langage de convention des ministres, on lui donnait le surnom peu obligeant de Stercoral. Tout cela donne une mŽdiocre idŽe de ses agrŽments. NŽanmoins, le mme Tallemant le cite parmi les tenants les plus favorisŽs d'une illustre belle, Mme de Montbazon (dont les MŽmoires parlent au tome IX, p. 332-333), et d'une charmante provinciale, Mme d'Anguittard, voisine de Blaye (Historiettes, tome IV, p. 461) ; son fils lui-mme (ci-dessus, p. 163) dit qu'il Žtait Ç jeune et galant. È

[193] Voyez les bulletins de la cour, dans la Gazette de 1633 ˆ 1635.

[194] Voyez une lettre fort vive, en date du 10 juin 1635, dans le recueil publiŽ par Avenel, tome V, p. 52-53.

[195] Lettre du 25 novembre 1635, analysŽe dans le mme recueil, tome V, p. 955, et dans le Catalogue de la collection de lettres autographes de M. PŽcard (1873), p. 87. Cette lettre est Žcrite ˆ propos de la belle conduite de Saint-Simon dans la campagne de Lorraine, conduite dont la Gazette rend compte fort en dŽtail, p. 650, 681-682 et 712.

[196] Mars 1636. Voyez les MŽmoires de Monglat, p. 30, et Victor Cousin, Mme de Hautefort, 4e Ždition, Appendice, p. 31-42.

[197] Ci-dessus, p. 159-161.

[198] Historiettes, tome II, p. 23.

[199] Charles de Saint-Simon Žtait capitaine du ch‰teau de Chantilly depuis que Louis XIII en avait fait une rŽsidence royale.

[200] Lettres du cardinal de Richelieu, tome V, p. 638-640 ; Histoire de Louis XIII, par le Vassor, tome V, p. 210-212.

[201] C'est le Roi lui-mme qui le lui annona en sortant du Conseil.

[202] Dans le Vassor, c'est ˆ Roye, et non ˆ Senlis.

[203] Sans doute Charles de Saint-Simon et les la Fontaine d'Esches.

[204] Comparez les MŽmoires de Richelieu, tome III, p. 78.

[205] Histoire de Louis XIII, tome V, p. 211-212.

[206] Voyez les MŽmoires de Mademoiselle, tome I, p. 46, et ceux de Bassompierre, octobre 1636, tome IV, p. 211 : Ç Furent aussi disgraciŽs les Saint-Simon, et le jeune, qui Žtoit un fant™me de favori, commandŽ de se retirer ˆ Blaye È.

[207] Ci-dessus, p. 497 : Ç Il songea donc bient™t ˆ s'en retourner ˆ Blaye, o il vivoit en grand seigneur, aimŽ et recherchŽ de tout ce qu'il y avoit de plus distinguŽ ˆ Bordeaux et dans les provinces voisines. Il s'y retira donc aprs, pour non revenir de longtemps È.

[208] Lettres de Richelieu, tome V, p. 640-641.

[209] Lettres de Richelieu, tome V, p. 650 ; lettre du 1er novembre, ˆ M. de Chavigny. Par une lettre de 1638 (tome VI, p. 93), on voit que M. le Bailleul avait ŽtŽ un de ses inspirateurs ou de ses complices.

[210] La livrŽe royale des pages.

[211] Cabinet des titres, dossier Rouvroy, fol. 94.

[212] Son nouveau rŽgiment, composŽ de cinq compagnies de chevau-lŽgers et une de mousquetaires, subsista jusqu'en 1660. Le gŽnŽral Susane en a donnŽ les Žtats de services dans l'Histoire de la cavalerie franaise, tome III, p. 133. C'est ce corps que commandait, comme lieutenant-colonel, la Roque Saint-Chamaran, dont il est question dans l'Žpisode du duel avec Vardes, ci-dessus, p. 217.

[213] Commission et lettre du 6 mars 1638

[214] Gazette de 1638, p. 342 et 394-395 ; le Vassor, Histoire de Louis XIII, tome V, p. 556.

[215] Voyez le rŽcit particulier de ses faits d'armes dans la Gazette de 1639, p. 788.

[216] DŽp™t des affaires Žtrangres, France, vol. 100 ˆ 103.

[217] Bib. nationale, ms. Fr. 3843, fol. 99.

[218] Ci-dessus, p. 181.

[219] Le Vassor, Histoire de Louis XIII, tome VI, p. 680.

[220] Bib. nationale, ms. Fr. 3778, fol. 37 v¡.

[221] Ci-dessus, p. 181-187.

[222] Services qu'attestent, entre autres, des lettres de Saint-Simon conservŽes au DŽp™t des affaires Žtrangres, France, vol. 104, fol. 5, 13 et 18.

[223] Un des tŽmoins qui ne quittaient pas le chevet du moribond, le confesseur Dinet, dit, dans la relation que le Cabinet historique a publiŽe en 1866 (tome XII, p. 249), que Louis XIII Ç n'oublia qui que ce fžt de ses domestiques, non pas mme le garon qui boulangeoit le pain des chiens È. C'est Chavigny qui Žcrivait ces legs sous la dictŽe du Roi.

[224] Voyez notre note 4 de la page 186. On retrouve les mmes on dit consignŽs, presque dans les mmes termes, dans une dŽpche de l'ambassadeur vŽnitien Giustiniani ˆ son gouvernement.

[225] Ci-dessus, p. 224, et tome III, p. 248 et suivantes ; MŽmoires du duc de Luynes, tome VII, p. 343. Ñ Il est juste de faire remarquer, ˆ l'honneur d'un prince qu'il serait difficile de rŽhabiliter sur beaucoup d'autres points, que cet exemple de gratitude gardŽe ˆ sa mŽmoire n'est pas le seul ; chacun sait quel attachement le savant et vŽnŽrable hŽritier du connŽtable de Luynes professait encore, de notre temps, pour la mŽmoire du bienfaiteur de sa famille.

[226] Ci-dessus, p. 224 ; tome VI, p. 28 ; tome VIII, p. 181-185, 386-387 ; tome XII, p. 216. De 1693 ˆ 1745, Saint-Simon alla cinquante-deux fois ˆ cet anniversaire, sans jamais, dit-il, y voir personne.

[227] Archives nationales, K 1249, liasse n¡ 2, fol. 46.

[228] C'Žtait un cousin du duc, Claude de Rouvroy Saint-Simon, plus tard ŽvŽque de Metz, connu pour avoir ŽtŽ le compagnon de notre auteur dans son voyage en Espagne et le lŽgataire de ses manuscrits.

[229] Tallemant des RŽaux, Historiettes, tome I, p. 386.

[230] Lettre d'Henri Arnauld au prŽsident Barrillon, 1er avril ; ms. Fr. 3778, fol. 64 v¡.

[231] On se rappelle que la marquise de Saint-Simon Žtait tante du prince de CondŽ, et que, de plus, le premier Žcuyer avait failli, en 1632, faire nommer celui-ci premier ministre, ˆ la place de Richelieu ; voyez ci-dessus, MŽmoires, p. 166-168.

[232] Journal d'Olivier d'Ormesson, tome I, p. 97, 105-107 et 162 ; factum imprimŽ de M. de la Vieuville, dans le ms. Dupuy 631, fol. 227-232.

[233] Journal d'Olivier d'Ormesson, tome I, p. 153.

[234] Ci-dessus, p. 151 et 194.

[235] Addition n¡ 48, ci-dessus, p. 370.

[236] Les fianailles et la signature du contrat eurent lieu au Palais-Royal, le 7 septembre 1644, avec l'assistance de toute la cour ; le mariage fut cŽlŽbrŽ le 26, au ch‰teau de la Versine, que le marquis de Saint-Simon, beau-pre de la mariŽe et frre du mariŽ, possŽdait depuis 1636.

[236b] NDE Cf. ChŽruel Adolphe, 1876, Notice sur la vie et les MŽmoires du duc de Saint-Simon, pp. vi-viii (voir les dŽveloppements dans ChŽruel, 1865, Saint-Simon considŽrŽ comme historien de Louis XIV, Chp. 3-5):
Si l'on en croyait le tŽmoignage de son fils, il [le Duc Claude] aurait reu de Louis XIII mourant la charge de grand Žcuyer, que les perfides menŽes de Chavigny, d'Anne d'Autriche et de Mazarin lui auraient enlevŽe. Ce rŽcit, que l'auteur des MŽmoires tenait probablement de son pre, mais que rien ne confirme jusqu'ici, nous para”t peu vraisemblable.
Des documents authentiques permettent de faire conna”tre la conduite de Claude de Saint-Simon pendant la Fronde. Ce sont des lettres Žcrites par lui ˆ Chavigny, en 1649, que l'on trouvera ˆ la suite de cette notice, [Appendice I, pp. ic-cvi) et d'o l'on pourrait conclure qu'il Žtait restŽ l'ami du secrŽtaire d'Etat de qui il prŽtendait avoir tant ˆ se plaindre, si l'on ne savait combien parfois ont peu de sens les formules de politesse les plus humbles et les plus expressives. Il ne se rŽsignait pas facilement ˆ n'tre que gouverneur de Blaye, et il avait espŽrŽ, ˆ la faveur des troubles, jouer un r™le important en s'unissant avec Chavigny et avec la cabale des Princes pour renverser Mazarin. Aussi, lorsque le Cardinal, qui surveillait les menŽes de cette faction, se rŽsolut ˆ frapper un coup dŽcisif et fit arrter, le 18 janvier 1650, le prince de CondŽ, son frre le prince de Conti et son beau-frre le duc de Longueville, Claude de Saint-Simon s'enfuit prŽcipitamment de Paris et alla s'enfermer dans sa citadelle de Blaye. Il Žcrivit de lˆ ˆ Mazarin pour lui offrir son ŽpŽe. Le Cardinal, parfaitement informŽ des causes de sa fuite, lui rŽpondit avec ironie, le 26 janvier: Ç Vous pouviez changer la forme de ce dŽpart, et particulirement dans la conjoncture prŽsente, o il a donnŽ matire au peuple de faire diverses spŽculations et de craindre de mauvaises suites de la sortie de la cour d'une personne de votre qualitŽ, sans avoir pris congŽ de Leurs MajestŽs. È
Claude de Saint-Simon se trouva alors dans l'embarras que produit toujours une conduite Žquivoque: suspect ˆ la cour, il fut accusŽ de trahison par le parti des Princes, lorsqu'il refusa de leur livrer Blaye. La princesse de CondŽ, Claire-ClŽmence de MaillŽ-BrezŽ, le somma d'exŽcuter la promesse qu'elle prŽtendit qu'il avait faite ˆ son mari et ˆ ses beaux-frres: le duc soutint qu'il n'avait jamais pris d'engagement avec ce parti, et il lui ferma les portes de Blaye. J'insiste sur ce point parce que l'auteur des MŽmoires, acceptant avec une confiance aveugle les rŽcits de son pre, n'a rien dit de ses relations avec le parti de la Fronde, et l'a prŽsentŽ comme un modle de fidŽlitŽ ˆ la cause royale. D'ailleurs l'amertume de l'ambitieux courtisan, dŽu dans ses dernires espŽrances, n'a pas ŽtŽ sans action sur l'humeur chagrine et l'esprit caustique de son fils. Claude de Saint-Simon ne revint ˆ la cour qu'aprs la fin des troubles.

[237] CŽrŽmonial franois, tome II, p. 448.

[238] Journal d'Olivier d'Ormesson, 27 janvier 1648, tome I, p. 431.

[239] Bib. nationale, carnet XII de Mazarin, p. 97.

[240] Journal d'Olivier d'Ormesson, tome I, p. 589 et suivantes.

[241] Une partie de cette correspondance a ŽtŽ publiŽe par M. ChŽruel, dans son Žtude sur Saint-Simon considŽrŽ comme historien de Louis XIV, p. 242 et suivantes.

[242] Suite du journal des assemblŽes du Parlement, p. 33.

[243] Dossier Rouvroy, fol. 94, au Cabinet des titres.

[244] Voyez les MŽmoires, ci-dessus, p. 198.

[245] Mazarin a notŽ cela sur son carnet n¡ XIII, p. 74.

[246] Voyez les rapports tirŽs par M. Tamizey de Larroque de la correspondance de Mazarin (Arch. nat., KK 1217-1221), et publiŽs dans les Archives historiques du dŽpartement de la Gironde, tomes II et suivants.

[247] DŽp™t des affaires Žtrangres, Lettres de Mazarin, vol. 33, fol. 105 ; Saint-Simon considŽrŽ comme historien, par M. ChŽruel, p. 252.

[248] MŽmoires de P. Lenet, p. 242 et 249.

[249] MusŽe Britannique, mss. Egerton, n¡ 13, fol. 167-168.

[250] Correspondance de Claude de Saint-Simon, Bib. nat., ms. Fr. 8563, fol. 7.

[251] Minute ; ms. Fr. 8563, fol. 6 v¡.

[252] Etienne Filzjean (ou Fitzjean), grand maire de Donnemarie, avait, en 1635, un fils dans la compagnie de M. de Saint-Simon (Revue historique et nobiliaire, 1869, p. 105).

[253] Saint-Simon considŽrŽ comme historien, p. 259. Voyez aussi les MŽmoires de P. Lenet, p. 275.

[254] MŽmoires, ci-dessus, p. 198.

[255] Les minutes de lettres sont conservŽes dans la correspondance de Claude de Saint-Simon, ms. Fr. 8563 ; nous avons retrouvŽ l'original d'une lettre au garde des sceaux Ch‰teauneuf (datŽe du 4 mai) au MusŽe Britannique, dans le ms. Egerton 13, fol. 95.).

[256] Il est impossible toutefois de croire, comme le disent les MŽmoires (ci-dessus, p. 221-222), qu'on put faire confusion entre l'assistance donnŽe par le frre a”nŽ ˆ sa proche parente et la prŽtendue promesse Žcrite par le duc de livrer la ville de Blaye.

[257] Ci-dessus, p. 198-199.

[258] Archives nationales, KK 1218, fol. 249-251.

[259] Mme de Motteville raconte qu'il refusa huit cent mille livres. (MŽmoires, tome III, p. 196.)

[260] C'Žtait le principal intermŽdiaire du parti des Princes avec l'Espagne, et un rapport envoyŽ par le duc d'ƒpernon le dŽsignait comme chargŽ de faire les offres ˆ Saint-Simon.

[261] Lenet dit au contraire (p. 265) que le dŽbarquement ne put avoir lieu, et, dans un autre endroit (p. 293), il s'exprime ainsi, en parlant du baron de Watteville, qui reprŽsentait l'Espagne et devait commander le dŽbarquement projetŽ : Ç Quand il avoit paru dans la rivire pour mugueter Bordeaux et Blaye, sur ce qu'on lui avoit dit que le duc de Saint-Simon Žtoit dans nos intŽrts, il s'en retira d'abord et sema le bruit qu'il avoit des sommes immenses, qu'il auroit dŽposŽes ˆ Blaye, si ce duc l'y avoit voulu recevoir. Nous avons pourtant su depuis.... qu'il n'y portoit autre chose que des paroles pour l'embarquer dans le parti par les espŽrances d'une grande fortune È.

[262] Arch. nat., KK 1218, fol. 256 ; pice publiŽe par M. Tamizey de Larroque, dans les Archives historiques de la Gironde, tome III, p. 421-422.

[263] MŽmoires de P. Lenet, p. 265.

[264] La minute (Bib. nat., ms. Fr. 8563, fol. 12 v¡) est beaucoup moins longue que l'original (Arch. nat., KK 1218, fol. 264), qui a ŽtŽ publiŽ par M. Tamizey de Larroque, tome III, p. 426.

[265] Archives nationales, KK 1218, fol. 272 ; publiŽ par M. Tamizey de Larroque, tome III, p. 272.

[266] Bib. nat., ms. Fr. 8564, fol. 159. Ce second volume du recueil de lettres adressŽe au duc de Saint-Simon et de minutes prŽparŽes par lui se termine par un certain nombre de lettres de son frre, du plus haut intŽrt ; malheureusement, le dŽchiffrement en est des plus pŽnibles, et il n'y a aucun ordre dans les pices, qui n'ont gŽnŽralement pas de date, et souvent sont mutilŽes.

[267] Voyez les MŽmoires, tome IV, p. 113.

[268] Bib. nat., ms. Fr. 8563, fol. 14, lettre du 25 mai.

[269] Lettre du 5 juin 1650, publiŽe par M. Tamizey de Larroque, tome IV, p. 456.

[270] MŽmoires de P. Lenet, p. 274.

[271] Lettre du 11 juin 1650, dans le ms. 8563, fol. 19.

[272] Ms. 8563, fol. 23. Il y avait six ans (DŽp™t de la guerre, vol. 82, n¡ 603) que le duc demandait ˆ lever un rŽgiment d'infanterie.

[273] La garnison ordinaire n'Žtait que de cent cinquante hommes, et encore avait-on retranchŽ deux mois de montre en 1647.

[274] Archives nationales, KK 1218, fol. 489, lettre du 1er septembre 1650, publiŽe par M. Tamizey de Larroque, tome IV, p. 528.

[275] Ç Le duc de Saint-Simon avoit tirŽ aussi au Cardinal une bonne somme d'argent pour se ranger de son c™tŽ, et il avoit cru le pouvoir faire d'autant plut™t qu'outre que c'Žtoit la mode, dans ce temps-lˆ, de se faire bien payer pour tre fidle, il n'Žtoit pas riche, quoique le feu roi, dont il avoit ŽtŽ favori, l'ežt comblŽ d'une infinitŽ de bienfaits, car il lui avoit donnŽ en moins de rien la charge de premier Žcuyer de la petite Žcurie, celle de premier gentilhomme de la chambre, le gouvernement qu'il avoit prŽsentement, avec quantitŽ d'autres gratifications, sans compter la dignitŽ de duc et pair, qu'il avoit mise encore dans sa maison. Pour rŽcompense nŽanmoins de toutes ces gr‰ces, ˆ peine avoit-il eu les yeux fermŽs, qu'il avoit pris parti contre son fils : tant il est vrai qu'on ne se fait pas trop de scrupule d'tre ingrat, quand on se flatte qu'on tirera quelque fruit de son ingratitude È. (MŽmoires de M. de Bordeaux, par G. des Courtilz de Sandras, tome III, p. 231-232.)

[276] Le comte du Dognon, qui reut, en avril 1653, le b‰ton de marŽchal, un brevet de duc et pair, et cinquante mille louis d'or, pour se dŽmettre de ses gouvernements (MŽmoires de Saint-Simon, tome IX, p. 313).

[277] La preuve en est dans un Žtat des crŽances actives de son fils, dressŽ lors du mariage de celui-ci avec Mlle de Lorge, en 1695.

[278] MŽmoires de Retz, tome III, p. 66 et 67.

[279] Archives nationales, KK 1219, fol. 32. A la lettre originale, publiŽe par M. Tamizey de Larroque (tome VI, p. 430 et 431), est joint un plan manuscrit de la rivire, qui explique l'importance de la position de Blaye.

[280] Archives nationales, KK 1219, fol. 79.

[281] Ci-dessus, p. 199 : Ç Il fit fondre force canon, mit cinq cents gentilshommes bien armŽs, habilla et paya la garnison, fut dix-huit mois comme bloquŽ, sans avoir jamais rien voulu prendre sur le pays ; aussi contracta-t-il de grandes dettes pour toujours È. Comparez les MŽmoires de P. Lenet. p. 320, 323, etc.

[282] Leur frre cadet, commandeur de l'ordre de Malte.

[283] La fin de la lettre du marquis est inintelligible ; Bib. nat., ms. Fr. 8564, fol. 164.

[284] La Muse historique, n¡ du 25 aožt 1650. On trouve dans un recueil de la Maison du Roi (Arch. nat., 01 2, fol. 15) la copie d'une lettre de cachet qui fut sans doute adressŽe au commandeur en cette occasion : Ç Votre conduite m'ayant appris que vos intentions n'Žtoient pas moins contraires ˆ mon service que votre sŽjour dans Paris, j'entends qu'incontinent cette lettre reue, vous en partiez, et que vous vous en alliez droit ˆ Malte È.

[285] Voyez son article ci-dessus, appendice n¡ I, p. 416 et 426-427.

[286] Une premire fois (MŽmoires, tome III, p. 328), Retz parle de Ç la misŽrable fortune du commandeur de Saint-Simon, chef des criailleurs du parti des Princes È. Une seconde fois (tome IV, p. 203 et 207), il dit encore : Ç Pesche Žtoit tous les jours dans la cour de l'h™tel de CondŽ, et le commandeur de Saint-Simon ne bougeoit de l'antichambre. Il faut que ce dernier se soit mlŽ d'un Žtrange mŽtier, puisque je, nonobstant sa qualitŽ, n'ai pas honte de le confondre avec un misŽrable criailleur de la lie du peuple È.

[287] MŽmoires sur Mme de SŽvignŽ, par Walckenaer, tome II, p. 32-35.

[288] Il fut baptisŽ ˆ l'Žglise Saint-Sulpice de Paris.

[289] Ms. Fr. 8564, fol. 170.

[290] Ms. Fr. 8564, fol. 166.

[291] Lacune dans le manuscrit.

[292] La Rochefoucauld (tome II, MŽmoires, p. 257) raconte en effet que Ç la Reine nioit d'avoir jamais ŽcoutŽ la proposition de Blaye, et accusoit M. Servien de l'avoir faite exprs pour rendre les demandes de Monsieur le Prince "si hautes qu'il lui fut impossible de les accorder" È.

[293] Les lettres du comte d'Harcourt au duc sont pleines d'Žloges. Ç Il n'appartient qu'ˆ vous, lui disait-il, ˆ servir le Roi avec cette ponctualitŽ È (Ms. Fr. 8563, fol. 45 et suivants).

[294] On lit dans la Muse historique de Loret, lettre du 19 novembre 1651 : La duchesse de Saint-Simon, BeautŽ de merveilleux renom, Fait Žclater sa bonne mine Dans cette citŽ poitevine.

[295] La Gazette (p. 1431, correspondance du 16 dŽcembre 1651) consacra ˆ cet enfant l'article nŽcrologique que voici : Ç La semaine passŽe, le marquis de Portes, fils unique du duc de Saint-Simon, ‰gŽ de quinze mois seulement, Žtant mort ici (ˆ Paris), son corps fut conduit, dans un carrosse ˆ six chevaux, par des ecclŽsiastiques, et accompagnŽ de plusieurs gentilshommes ˆ cheval, en la ville de Senlis, o il a ŽtŽ mis au tombeau de ses anctres dans l'Žglise cathŽdrale, ˆ la porte de laquelle tout le clergŽ le reut, le prŽsidial, la maison de ville et les officiers de l'Žlection s'Žtant trouvŽs ˆ cette cŽrŽmonie, pour tŽmoigner leur affection ˆ la maison de Saint-Simon, dont le chef est leur gouverneur... È.

[296] Loret dit, dans sa lettre du 10 dŽcembre : Saint-Simon, aimable duchesse, A dans le cÏur grande tristesse, Et va nuit et jour lamentant Monsieur son fils, qu'elle aimoit tant, Et que la mort, cruelle et dure, A mis trop t™t, en sŽpulture.

Le mois suivant, dans sa lettre du 21 janvier 1652 : Mademoiselle de Bouillon Et Madame de Saint-Simon Pour le point d'honneur contestrent Et l'autre jour se picotrent Sur cet important argument.

[297] Muse historique, 18 fŽvrier 1652.

[298] Voyez ci-aprs, p. 170, note 1. Ñ Un rŽcent historien du cardinal de Retz, M. Chantelauze (le Cardinal de Retz et l'Affaire du chapeau, tome I, p. 339), a dit qu'un Ç secours espagnol appelŽ par le prince (de CondŽ) Žtait entrŽ dans Blaye È. Nous croyons qu'il y a eu lˆ une confusion de localitŽs.

[299] Lettre du duc au Cardinal, 5 mars 1652.

[300] Ms. Fr. 8564, fol. 172. L'adresse est : Ç Pour M. de Saint-Paul, en cour È.

[301] DŽp™t de la guerre, vol. 132, n¡ 134 bis. Les considŽrants Žtaient ainsi conus : Ç Tant parce qu'il a le commandement de la plus importante place du pays et de plusieurs troupes de cavalerie et d'infanterie employŽes ˆ la garde d'icelle et des lieux voisins, que par le crŽdit que sa qualitŽ et sa bonne conduite lui ont acquis en ces quartiers-lˆ, et surtout pour avoir ŽprouvŽ, en divers emplois que nous lui avons confiŽs, qu'il a toute la grande capacitŽ, valeur, etc. È.

[302] Lettre ˆ Mazarin du 2 avril 1652 ; Arch. nat., KK 1219, fol. 275 ; publiŽe par M. Tamizey de Larroque, tome VIII, p. 363.

[303] Tome IV, p. 117 et 118.

[304] Watteville voulait qu'on lui rem”t la place (MŽmoires de Balthazar, Žd. Moreau, p. 3-42 ; V. Cousin, Mme de Longueville pendant la Fronde, 2e Ždit., p. 259 et 260, et Souvenirs du rgne de Louis XIV, par M. le comte de Cosnac, tome V, p. 83 et 137-139.) Comparez la lettre de Lenet au prince de CondŽ, 16 septembre 1652, dans la 3e partie des MŽmoires de P. Lenet, p. 571.

[305] Papiers Lenet, ms. Fr. 6707, fol. 36 et 75.

[306] Sur le curieux incident d'un convoi de marchandises d'Angoumois ou de Poitou arrtŽ au passage, et dont le conducteur prŽtendit se rŽclamer de Madame la Princesse, voyez une lettre de celle-ci (de Bordeaux, 17 octobre), ms. Fr. 8563, fol. 111, et la rŽponse de notre duc (de Blaye, le 18), ibidem, fol. 113. Ñ Ç .... Les marchands de Bordeaux, Žcrit-il ailleurs, seroient trop heureux, en faisant la guerre au Roi, de pouvoir mettre leurs marchandises en sžretŽ, et que ceux qui sont dans l'obŽissance souffrissent tous les jours des pertes È (Ms. Fr. 8564, fol. 179).

[307] Voyez ci-dessus, p. 455, note 5.

[308] ArrivŽ ˆ Blaye en fŽvrier 1653. Pendant cette dernire pŽriode, Saint-Simon et ses agents firent des menŽes actives ˆ Bordeaux, pour h‰ter la fin de la crise. Voyez, outre sa correspondance, un mŽmoire du P. Berthod, dans les mss. Conrart, ˆ la bibliothque de l'Arsenal, tome XII, in-folio.

[309] Ci-dessus, p. 201-203. Lenet (p. 249) parle d'une mission de Saint-Maigrin (qu'il appelle La Vauguyon) ˆ Blaye, mais sans en indiquer l'objet prŽcis.

[310] MŽmoires, tome XVI, p. 254 ; comparez notre tome I, ci-dessus, p. 199.

[311] Place forte sur la Gironde, que les Frondeurs avaient livrŽe ˆ l'Espagne, et qui venait d'tre reprise. Ce gouvernement avait ŽtŽ jadis uni ˆ celui de Blaye dans les mains du duc de Luxembourg.

[312] Arch. nat., KK 1220, fol. 373 ; publiŽ par M. Tamizey de Larroque, tome XV, p. 366.

[313] MŽmoires, ci-dessus, p. 202, et Addition n¡ 48, p. 370-371.

[314] Ç ... Je me mettrois en Žtat d'obŽir, comme je ferai toute ma vie, ˆ tous ceux (les commandements) dont il plaira ˆ S.M. de m'honorer, si le bien de son service ne m'attachoit ici au devoir de ma charge, dans la jalousie que nous donne le traitŽ de paix qu'on dit tre conclu entre l'Angleterre et la Hollande.... De plus, ma santŽ n'est pas assez bonne pour me permettre de satisfaire ˆ cet ordre avec la diligence qu'il faudroit... È (Bibl. nat., ms. Fr. 8564, fol. 89).

[315] Tome XIX, p. 67.

[316] Voyez ci-dessus, p. 206 et note 2. Quand les MŽmoires parleront plus longuement de cet Žpisode, ˆ propos du sacre de 1722, nous expliquerons comment certaines relations, mme du temps et mme officielles, font figurer dans cette cŽrŽmonie le duc de Saint-Simon au lieu du marquis. Les lettres de convocation (DŽp™t des affaires Žtrangres, France, vol. 152, fol. 26) ne laissent point de doute sur ce point ; mais notre auteur a tort d'attribuer l'erreur ou la Ç friponnerie È au grand ma”tre des cŽrŽmonies de Louis XV, comme si c'ežt ŽtŽ une affaire d'ƒtat.

[317] Lettre du 27 fŽvrier 1655

[318] Voyez sa lettre du 6 septembre 1649 ˆ Chavigny, dans Saint-Simon considŽrŽ comme historien, p. 245-246. Les MŽmoires, tome II, p. 77-78, et tome XII, p. 328, expliquent ˆ quelle occasion la noblesse et les ducs, excitŽs par Monsieur et par CondŽ, rŽclamaient contre les tabourets de gr‰ce des Rohan et des Senecey et contre les honneurs de la maison de Bouillon.

[319] Ci-dessus, p. 163, note 2.

[320] Copie de Clairambault, aux Archives nationales, dans le recueil de la Pairie, KK 597, p. 381-388. En marge est cette note : Ç Ce mŽmoire a ŽtŽ fait ˆ la fin de 1659 ou commencement de 1660 È. Et au-dessus, Clairambault a encore Žcrit au crayon : Ç M. de Saint-Simon È. La lettre ˆ Mazarin et la rŽponse de celui-ci sont dans le mme recueil, fol. 369.

[321] En marge, de la main de Clairambault : Ç Cet officier Žtoit M. de Saint-Simon. Je le lui ai ou• dire È.

[322] Comparez les MŽmoires, ci-dessus, p. 162-163.

[323] En 1664, ils chargrent l'abbŽ Jean le Laboureur de rŽunir les ŽlŽments d'une histoire de la pairie. Saint-Simon est un des dix signataires de la commission officielle dŽlivrŽe pour cet effet au fameux gŽnŽalogiste (Arch. nat., KK 597, fol. 75l).

[324] Gazette de 1660, p. 625 ; Loret, la Muse historique, 10 juillet.

[325] La Muse historique, lettre du 8 novembre 1659.

[326] Loret parle souvent d'elle et ne tarit pas en louanges hyperboliques.

[327] Ci-dessus, p. 206 et 209.

[328] Des gŽnŽalogies la qualifient de Ç religieuse È. Peut-tre cette enfant Žtait-elle destinŽe ˆ la vie monastique, ou bien ŽlevŽe dans un couvent. On a, au MusŽe Britannique, ms. Additionnel 21 509, la lettre de condolŽance que le grand CondŽ Žcrivit ˆ sa cousine, le 12 novembre 1665, ˆ propos de la perte qu'elle venait de faire.

[329] Ci-dessus, p. 210 ; Gazette des 6 et 27 dŽcembre 1670, p. 1168 et p. 1232-1233. Le compte rendu des obsques, datŽ de Senlis, le 25 dŽcembre, est ainsi conu : Ç Le corps de la duchesse de Saint-Simon, qui Žtoit en dŽp™t en l'Žglise de Saint-Sulpice de Paris, sa paroisse, en ayant ŽtŽ levŽ le 18 de ce mois par le curŽ, avec les cŽrŽmonies qui s'observent en pareille occasion, fut mis dans un chariot couvert de deuil, tirŽ par six chevaux caparaonnŽs jusques ˆ terre, pour tre amenŽ ici (ˆ Senlis). Il Žtoit prŽcŽdŽ de trente-six estafiers, aussi vtus de deuil, chacun tenant un flambeau de cire blanche, le pole portŽ par quatre pages ˆ cheval, entre lesquels il y avoit quatre aum™niers en rochet et bonnet, et suivi de soixante gentilshommes, pareillement ˆ cheval, la marche Žtant fermŽe par trente carrosses ˆ six chevaux. Le soir, il fut dŽposŽ en l'Žglise du village de la Chapelle, ˆ une lieue de cette ville ; et le lendemain, sur les neuf heures du matin, Žtant arrivŽ en notre faubourg, il fut reu hors la porte par notre Žvque, ˆ la tte de son clergŽ sŽculier et rŽgulier, avec tous les magistrats de la ville, dont les Žchevins portoient les quatre coins du pole, et, au son de toutes les cloches des paroisses et des monastres, conduit en la cathŽdrale, toute tendue de noir, avec deux lŽs de velours chargŽs d'Žcussons aux armes de la dŽfunte, et ŽclairŽe d'une infinitŽ de flambeaux. La messe y fut pontificalement cŽlŽbrŽe par notre prŽlat, et l'oraison funbre prononcŽe par le sieur des Lyons, doyen et thŽologal de cette Žglise, avec un applaudissement gŽnŽral de son auditoire. Ensuite le corps fut inhumŽ dans la chapelle que les anctres du duc son Žpoux y ont richement fondŽe, il y a plus de deux cents ans : ce qui se fit en prŽsence de la noblesse de la province, du prŽsidial, des autres magistrats, de toutes les communautŽs sŽculires et rŽgulires, et d'une foule incroyable de peuple È.

[330] Jean des Lyons (1615-1700) remplit les fonctions de doyen et de thŽologal de Senlis de 1638 ˆ 1692. Il est bien connu pour ses ouvrages sur la liturgie et pour sa correspondance avec Arnauld.

[331] Cet Žloge fut imprimŽ et dŽdiŽ ˆ la duchesse de Brissac.

[332] Lettres, tome II, p. 16 et 20.

[333] Voyez sa correspondance avec Colbert, ms. Clairambault 1218, fol. 11, etc.

[334] Cet h™tel passa aux Lamoignon. Il fait l'angle de la rue PavŽe et de celle des Francs-Bourgeois, en pendant au jardin de l'h™tel Carnavalet.

[335] Voyez ci-dessus, p. 212-214, et le Dictionnaire critique de Jal, p. 1136. La Gazette relate le mariage en ces termes (p. 1088) : Ç Ces jours passŽs, le duc de Saint-Simon, pair de France, Žpousa la demoiselle de Ch‰teauneuf d'Hauterive, dans l'h™tel d'Angoulme, o elle a ŽtŽ ŽlevŽe par la duchesse de ce nom, qui l'a toujours considŽrŽe non-seulement comme sa parente, mais comme sa propre fille È. Des relations d'amitiŽ existaient dŽjˆ entre les deux familles ; car nous avons trouvŽ, dans le rŽpertoire d'autographes que possde M. Etienne Charavay, la mention d'une lettre affectueuse de Claude de Saint-Simon au marquis d'Hauterive, alors rŽsidant ˆ BrŽda.

[336] L'original de ce contrat est conservŽ dans le minutier de Me Galin, notaire ˆ Paris. Une copie se trouve aux Archives nationales, dans le registre des Insinuations Y 226, fol. 95.

[337] Selon une autre lŽgende, un certain Gilles, natif du village de l'AubŽpine, prs Bonneval, en Beauce, fut bailli de Brou en 1337, et son fils Simon, devenu prŽv™t et maire de Chartres, fut anobli en 1374. (Arch. nat., MM 818, fol. 58 v¡.)

[338] Voyez un tableau des trente-deux quartiers paternels et maternels de Louis de Saint-Simon, dans le dossier Rouvroy, au Cabinet des titres, fol. 51 v¡ et 146. On trouvera de nombreuses gŽnŽalogies ou pices, avec plusieurs portraits des l'Aubespine, soit dans le dossier de cette famille, soit dans le ms. Clairambault 1126,fol.121-217. La Chenaye des Bois a insŽrŽ une bonne gŽnŽalogie de la maison de Volvire dans le tome XV de son Dictionnaire de la Noblesse, p. 633-638, ˆ c™tŽ de la gŽnŽalogie de Saint-Simon.

[339] Voyez Ç deux ou trois plaisants contes È sur M. d'Hauterive, dans les Historiettes de Tallemant, tome I, p. 492-493.

[340] Historiettes, tome IV, p. 212.

[341] Ruffec Žtait venu aux Volvire, en 1356, par une hŽritire des anciens comtes d'Angoulme. C'est aujourd'hui une ville de plus de trois mille habitants. Voyez ci-dessus, p. 213, note 4.

[342] Voyez ci-dessus, p. 25, note 1.

[343] Voyez les lettres de cachet dans les registres de la Maison du Roi, aux Archives nationales, O1 21, fol. 12 v¡, 21, 63 v¡ et 283 v¡ ; 27, fol. 197 ; 37, fol. 109 v¡ ; et les lettres Žcrites au ministre par le marquis et par l'intendant de Limoges, dans le ms. Clairambault 1126, fol.155-165.

[344] Colbert acheta ces deux terres en 1679, et Žtablit un haras ˆ Hauterive.

[345] Acte passŽ le 14 septembre 1682, devant le notaire Arouet.

[346] Voyez les mss. Clairambault 1126, fol. 168-170, et 1218, fol. 98-106.

[347] Sa petite-fille le vendit, en dŽcembre 1762, au fameux comte Charles-Franois de Broglie, qui y fut exilŽ, comme jadis l'avaient ŽtŽ les Ch‰teauneuf, dans un vieux ch‰teau fŽodal dont on voit encore les restes.

[348] Papiers du P. LŽonard, MM 825, fol. 141.

[349] Ce marquis de l'Aubespine reprit, en 1705, une instance commencŽe par sa mre, pour se faire rembourser par la duchesse douairire, sur les revenus de Ruffec, les sommes que Louis de Saint-Simon avait payŽes aux crŽanciers d'ƒlŽonore de Volvire avec les deniers dotaux de sa propre femme. Notre auteur n'en sortit qu'en 1713, en payant cinquante mille Žcus ˆ son cousin germain. Voyez une lettre du tome XIX de l'Ždition de 1873, p. 263.

[350] Ci-dessus, p. 214. Comparez le dŽbut des MŽmoires, p. 23 et 25.

[351] La duchesse de Saint-Simon Est fort belle et fort agrŽable ; Elle a ŽpousŽ un barbon, Et l'on dit qu'il est redoutable. La duchesse a du dŽpit, etc....(Chansonnier, ms. Fr. 12 687, p. 24.)

[352] Ce doit tre uniquement pour parer ˆ certaines ŽventualitŽs des innombrables procs dont il a ŽtŽ parlŽ plus haut, qu'ils obtinrent, le 16 mai 1677, une sŽparation de biens.

[353] Correspondance gŽnŽrale de Mme de Maintenon, tome I, p. 276 et 352.

[354] MŽmoires, ci-dessus, p. 136.

[355] LavallŽe (Correspondance gŽnŽrale, tome II, p. 63) a datŽ cette lettre d'aožt 1679, sans s'apercevoir qu'il y Žtait parlŽ de Pontchartrain comme contr™leur gŽnŽral. On peut donc la reporter au mois d'avril 1691, temps o le duc de Saint-Simon avait ŽtŽ malade, et mme tenu pour mort (ci-dessus, p. 132, note 2).

[356] Ci-dessus, p. l51.

[357] MŽmoires, tome X, p. 221.

[358] Addition au Journal de Dangeau, 28 dŽcembre 1688, tome II, p. 239.

[359] Article de M. Sandret, dans la Revue historique-nobiliaire, annŽe 1875, p. 125-136 ; article de M. H. Bordier, dans le Cabinet historique, mars 1877, p. 81-97.

[360] La filiation qu'on leur prŽsenta Žtait de vingt degrŽs, remontant jusqu'en 1060. Elle se trouve au Cabinet des titres, dossier AubignŽ, fol. 106-113.

[361] Voyez ci-dessus, p. 142. Ñ Charles de Saint-Simon mourut au Plessis-de-Rasse, le 25 janvier, Ç environ neuf heures du soir È, ‰gŽ de quatre-vingt-neuf ans et sept mois. Sa veuve se retira aussit™t ˆ la Versine, o les Žchevins de Senlis allrent la complimenter dans la matinŽe suivante. Le 27, de bonne heure, les entrailles du dŽfunt furent ensevelies dans le chÏur de l'Žglise de Chamant, aprs un service solennel. Aprs midi, la ville vint rendre les honneurs au corps, qui Žtait embaumŽ et exposŽ dans une petite salle voisine de la chapelle du ch‰teau. Les obsques solennelles eurent lieu ˆ Senlis, le samedi 31, au soir. La porte de l'h™tel de ville et les deux principales entrŽes de la porte Saint-Rieul avaient ŽtŽ tendues de noir, avec les armes de Saint-Simon et celles de la ville. Le corps, escortŽ par cinquante paroissiens de Chamant portant chacun un flambeau ardent, fut reu par les Žchevins en deuil, accompagnŽs des officiers royaux et prŽcŽdŽs de douze pauvres de l'h™pital gŽnŽral et des quatre petits officiers porte-casaques de la ville, chacun tenant un flambeau de cire blanche. A l'Žglise cathŽdrale, le corps fut descendu dans la sŽpulture des Saint-Simon, aprs les vigiles dites. Le jour suivant, une grand'messe fut cŽlŽbrŽe, en prŽsence des trois chapitres, des huit paroisses et de toutes les communautŽs religieuses, par M. des Lyons, doyen et thŽologal. L'oraison funbre fut prononcŽe par un prtre de la Mission, principal du collge, qui Ç s'en acquitta trs-bien È. (Notes communiquŽes par M. Flammermont, d'aprs le registre de l'h™tel de ville de Senlis BB 7, fol. 213-215. Ñ Registres paroissiaux de Chamant).

[362] Ci-dessus, p. 142, et tome I, Žd. 1873, p. 245.

[363] Journal de Dangeau, tome III, p. 71, d'aprs le Mercure, mars 1690, p. 251-252.

[364] Mercure, mars 1690, p. 259, et Dangeau, tome III, p. 73.

[365] Ms. de l'abbŽ de Dangeau, Fr. 22 763, fol. 218 v¡

[366] Jean-Jacques Titon, seigneur du Plessis et de Chamant, reu ma”tre des comptes le 18 septembre 1692, puis pourvu de la charge de grand ma”tre des eaux et forts au dŽpartement du Berry, et mort le 6 mars 1740. C'Žtait un des frres du littŽrateur ƒverard Titon du Tillet. Leur pre possŽdait la terre d'Ognon, ˆ c™tŽ de Senlis, et acheta le Plessis le 18 fŽvrier 1691, des mains du curateur crŽŽ ˆ la succession vacante (Arch. nat., P 21, n9 1446).

[367] 19 avril 1695.

[368] On trouvera des renseignements intŽressants sur les gr‰ces pŽcuniaires et les faveurs que Saint-Simon obtenait malgrŽ sa retraite de la cour, et sur les spŽculations financires, dans la Notice biographique que rŽsume cet appendice.

[369] Voyez ci-dessus, p. 133 et note 3.

[370] L'acte dit : rue Taranne. La situation de l'h™tel justifie cette confusion de noms, qu'on retrouve trs-frŽquemment.

[371] Cette donation fut enregistrŽe au registre des Insinuations du Ch‰telet, le mardi 5 mai. (Arch. nat., Y 261, fol. 269 v¡.) L'original, signŽ : Le duc de Saint-Simon, et Louis de Saint-Simon, vidame de Chartres, est conservŽ dans le minutier du notaire ; voyez ci-contre, p. 485, note 3

[372] Ci-dessus, p. 134-136.

[373] Ç L'on a cachŽ un jour la mort du duc de Saint-Simon, afin que son fils ežt le temps de demander ses gouvernements. Le Roi les lui accorda le plus obligeamment qu'il se puisse. Celui de Blaye lui est extrmement nŽcessaire pour faire valoir les marais qu'il a dans le voisinage et qui, par ce moyen, lui valent jusques ˆ quarante mille livres de rente. Ce jeune duc jouira de plus de cent mille livres de rente l'annŽe prochaine, parce que, ayant atteint sa vingtime annŽe, les biens de sa sÏur du c™tŽ de pre, la duchesse de Brissac, lui reviendront. C'est, je crois, l'H™tel-Dieu qui en jouit en attendant È (Papiers du P. LŽonard, MM 827, fol. 142.). Comparez le Journal de Dangeau, tome IV, p. 278-279.

[374] Cette pice et tous les autres actes passŽs ˆ partir de 1693 nous ont ŽtŽ trs-obligeamment communiquŽs par Me Galin, successeur actuel du notaire Claude le Roy, lequel, ayant reu de son prŽdŽcesseur Franois Arouet, pre de Voltaire, la clientle des Saint-Simon, la conserva jusqu'en 1720.

[375] Ces crŽanciers Žtaient des gens considŽrables : les conseillers d'ƒtat Pussort et de Fieubet, Claude-Henri Dorieu, conseiller au Parlement, la marquise de Saint-Simon, la comtesse de Chavigny, etc. Saint-Simon dira (voyez notre tome II, p. 78) qu'ils voulurent Ç mettre le feu ˆ ses affaires È, encore qu'il n'y ežt Ç aucune dette criarde È, et qu'il dut se faire donner, quelques mois plus tard (le 30 octobre), les lettres d'ƒtat qui sauvrent les ducs et pairs en 1694. Voici en quels termes le P. LŽonard (ms. MM 827, fol. 142) raconte l'intervention des crŽanciers : Ç Aprs la mort de son mari, la duchesse fit apposer le scellŽ, et, un jour ou deux aprs, le lever et clore l'inventaire. Les crŽanciers voulant s'opposer, on leur dit qu'ils Žtoient venus trop tard. M. Pussort, qui en Žtoit un, prŽsenta requte en demandant un nouveau scellŽ. On le lui a permis. Cette duchesse chargea M. de Pontchartrain, secrŽtaire d'ƒtat et contr™leur gŽnŽral, d'une requte contre cet arrt. Ce ministre la rapportant au conseil des finances, M. Pussort, qui Žtoit prŽsent, sourit pendant le rapport et dit au Roi : "La personne dont on se plaint et qu'on accuse d'tre chagrine, c'est moi". M. de Pontchartrain reprit sa requte et n'en parla plus È.

[376] Cet h™tel a ŽtŽ dŽtruit tout rŽcemment, afin de faire place au boulevard Saint-Germain. L'occasion nous a semblŽ favorable pour rappeler ˆ qui de droit que la ville de Paris n'avait jamais pensŽ au nom de Saint-Simon lorsqu'il y avait eu lieu de chercher une dŽnomination pour quelque voie nouvelle, et que le quartier o s'Žcoula la vie tout entire du grand Žcrivain serait heureux de voir enfin rŽparer un oubli aussi regrettable.

[377] Ci-dessus, p. 194 et 453. Voyez la Topographie historique du vieux Paris, par Berty et Tisserand, tome III, p. 223.

[378] Voyez les Lettres inŽdites de Mme de SŽvignŽ, publiŽes par M. Capmas, tome II, p. 177.

[379] Ci-dessus, p. 249.

[380] Ci-aprs, appendice V, p. 503.

[381] Le pre s'appelait Josias de GoguŽ, sieur de Moussonvilliers (dŽpartement de l'Orne). La famille avait pour armes : d'azur au cygne d'argent, au chef cousu de gueules, chargŽ de trois croix d'or (Cabinet des titres, dossier GoguŽ).

[382] MŽmoires, tome VII, p. 151.

[383] Le duc et la duchesse de Saint-Simon lui avaient fait donner, en 1686, son abbaye, qui rapportait six mille livres, et l'avaient envoyŽ ˆ Ruffec pour rŽtablir l'ordre dans cette terre, depuis longtemps abandonnŽe et pillŽe. Il y eut beaucoup de peine, et, ˆ plusieurs reprises, les tenanciers se plaignirent des rigueurs, des cruautŽs mme de certains officiers seigneuriaux employŽs par lui : on parlait de vassaux condamnŽs au bannissement, d'homme mangŽ par les chiens des sergents, etc. Mais l'intendant de la province, M. de Saint-Contest, plus indulgent que ne l'avait ŽtŽ son prŽdŽcesseur, M. de Gourgue, rŽpondit que l'abbŽ Žtait un homme de beaucoup d'honneur et de mŽrite, fort attachŽ aux intŽrts de son ma”tre, et le secrŽtaire d'ƒtat Ch‰teauneuf Žtouffa l'affaire (Arch. nationales, TT 449, et Correspondance des contr™leurs gŽnŽraux avec les intendants des Provinces, tome I, n¡ 198). Avant cet abbŽ, Claude de Saint-Simon avait eu pour intendant le financier Grouchy, dont son fils parle aussi en trs-bons termes (tome X, p. 105, et Addition au Journal de Dangeau, tome XVI, p. 2).

[384] Dictionnaire critique de Jal, p. 1137.

[385] Voyez notre tome II, p. 140, note 2.

[386] Ci-dessus, p. 249-250. Les chevaux de selle s'appelaient : le Barbe, blanc ˆ tous crins ; le Petit-Coureur, bai ˆ courte queue, de six ans, celui sur lequel Saint-Simon fit les trois premires charges ; le Capitaine, coureur gris, de sept ˆ huit ans, sans doute ce Ç trs-joli cheval gris È sur lequel il termina la journŽe ; le Normand, gris pommelŽ de six ans ; le Polacre, courtaud gris ; la DŽlicieuse, jument baie de six ans. Les courtauds ne furent estimŽs que deux cent cinquante livres, et les autres trois cents. Les chevaux gris avaient probablement fait partie de l'Žquipage du vidame, lorsqu'il Žtait entrŽ dans la premire compagnie des mousquetaires.

[387] Brevet du 18 janvier 1685. L'inventaire fut fait le 5 mai 1693, par Bobire de Chars, greffier de la prŽv™tŽ de l'h™tel du Roi. Louis de Saint-Simon conserva cet h™tel jusqu'en 1755 ; voyez l'Histoire des rues de Versailles, par M. le Roi, p. 235.

[388] Voyez ci-dessus, p. 469-470.

[389] Cabinet des titres, dossier Rouvroy, pices originales.

[390] Actes signŽs : Louis duc de Saint-Simon, dans le minutier de Me Galin.

[391] Arch. nationales, P 21, n¡ 1471. Le dŽnombrement du Marais ne fut prŽsentŽ que le 16 septembre 1699 (ibidem, M 536).